Après trois pauvres heures de sommeil, le réveil fut un supplice. Aimée ronchonna en s'enroulant sous la couette, tandis que Lila étirait son bras pour éteindre la maudite sonnerie.
— Je vais pas y arriver, marmonna-t-elle.
— Pense à ce qui t'attend sur ton canapé.
Les yeux de Lila s'ouvrir en grand. La veille, la soirée s'était éternisée jusqu'à l'aube. Elles avaient dansé comme elles ne l'avaient plus fait depuis longtemps. Johan n'avait pas été en reste. Il s'était enfilé les coupes de champagne coup sur coup et, fatalement, l'alcool avait eu raison de lui. Il s'était déchaîné sur la piste de danse et monopolisé le micro du karaoké.
Au bout d'un moment, le sommeil a tout de même fini par les rattraper un à un. D'autant que Lila s'était rabattue sur l'eau minérale, pensant déjà aux quelques patients qu'elle devrait obligatoirement voir le lendemain.
Après avoir aidé Tony a fermé le bar, Lila, Johan et Aimée s'étaient retrouvés tous les trois sur la place du village, frigorifiés. Johan leur proposa de les raccompagner en voiture avant de rentrer chez lui.
— Hors de question, était intervenue Lila en lui dérobant ses clés. Mon canapé fera très bien l'affaire.
Johan, encore ivre, ne s'était pas fait prier et se montrait même assez satisfait de son sort :
— Vous imaginez, les filles, la chance que j'ai ? Combien de mecs rêveraient d'être à ma place ?
— Mollo, Don Juan, l'avait calmé Aimé, hilare. Je pense que tu vas ronfler avant même qu'on soit au lit !
Elle avait vu juste. À peine étaient-ils arrivés dans l'appartement de Lila, que Johan s'était jeté sur son lit de fortune. Il s'était endormi tout habillé en moins de temps qu'il ne fallait pour le dire. Les deux amies s'étaient fait un malin plaisir à prendre quelques photos compromettantes, tout en pensant à lui donner un oreiller confortable, ainsi qu'une couverture.
Lila se leva sans bruit. Elle attrapa les premiers vêtements qui lui tombèrent sous la main et fila dans la salle de bain. Son anti-cerne eut du mal à masquer les stigmates de sa courte nuit, alors elle insista sur le blush. Une fois prête, elle repassa par sa chambre pour dire au revoir à sa meilleure amie. Elle la trouva assise, appuyée contre la tête de lit, en train de consulter son téléphone.
— Tu as le droit de te rendormir, tu sais ? chuchota Lila.
— Je vérifiais si Lewis avait répondu à mon texto de bonne année. Eh bien, toujours pas !
— Laisse-lui le temps, il est super tôt ! Raphaël attend aussi une réponse de ma part.
— What ? s'écria Aimée à voix pas si basse que ça. Ce trou duc t'a envoyé un message ?
Au beau milieu de la soirée, le téléphone de Lila avait affiché le prénom de son ex-compagnon. Elle avait choisi de l'ignorer, n'ayant ni la force, ni l'envie d'affronter ses mots alors qu'elle s'amusait si bien. En rentrant, la curiosité l'avait remportée pendant qu'Aimée se démaquillait.
Lila tendit son écran à sa meilleure amie afin de lui laisser apprécier la teneur du message.
De : Raphaël
Ma Lila, je te souhaite le meilleur pour cette nouvelle année. Je voulais aussi te dire que tu me manques beaucoup et que je suis désolé. J'ai merdé, mais malgré tout, je tiens énormément à toi et j'aimerais qu'on puisse en discuter de vive voix. Appelle-moi, je t'embrasse.
Ça ne l'avait pas heurtée ou tracassée comme d'habitude. Les mots avaient glissé sur elle, incapables d'atteindre leur cible. Le frisson de douleur qui la traversait chaque fois qu'elle recevait un message de Raphaël avait été remplacé par l'indifférence. Était-ce le signe qu'elle était enfin guérie de lui ? Après des mois de tristesse, de colère et de confusion, elle avait atteint un stade où sa présence dans sa vie n'était plus qu'un vague mirage.
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Tu as pris ton temps
RomanceEn faisant sa tournée habituelle à travers les rues étroites du village, Lila, infirmière à domicile, rend visite à Arlette Guichard, veuve d'un patient décédé. En plein tri dans sa grande maison, Arlette se fait une joie de partager ses souvenirs d...