Chapitre 14 - Harper

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Aujourd'hui est le grand jour.

Je me rends en France, après des années à en rêver.

Enfin, nous nous rendons en France.

Pour passer une seule semaine à Cannes, je dois emmener des dizaines et des dizaines d'affaires. Je suis tellement chargée que je me demande si je ne pars pas plutôt pour un an sans faire le moindre lavage.

Cependant, le Festival de Cannes est synonyme de nombreuses collaborations avec des marques et c'est, pour moi, l'occasion de m'afficher dans des tenues toutes plus belles les unes que les autres.

Ainsi, je dois changer un nombre incalculable de fois de tenue au cours de la semaine, pour les shootings, la montée des marches, les dîners professionnels, et toutes occasions qui seraient bonnes.

Enfin arrivés à l'aéroport, nous nous dirigeons vers l'enregistrement des bagages. Cependant, mes trois énormes valises sont difficiles à guider avec deux mains seulement.

Tyler, lui, a fait l'exploit de ne venir qu'avec une valise.

Forcément, les choix de costumes sont moins variés que les robes, surtout quand on s'appelle Tyler Brooks et qu'on déteste tout ce qui a de la couleur.

Je suis certaine qu'il se promène avec dix ensemble de costumes noirs sans différence si ce n'est la marque et le prix.

Intérieurement, je me marre, ce qui me fait perdre l'équilibre.

Je me rétame au milieu de tout ce monde dans un vacarme pas possible.

Nous devions garder la tête basse et rester discrets afin de ne pas attirer les regards vers nous, mais je crois que je viens de ruiner toutes nos chances de garder notre anonymat.

Tyler tente de me rattraper, mais réagit trop tard.

Il éclate de rire en me voyant étalée au sol, mes valises sans dessus-dessous autour de moi.

Mais il ne se moque pas.

C'est un vrai rire.

Sincère et réel.

Le genre de rire auquel on ne s'attend pas venant d'un homme aussi froid que lui.

— T'es pas très douée, quand même, rit-il de bon cœur.

Pour la première fois depuis notre rencontre, la tension n'est pas désagréable.

Pour la première fois depuis notre rencontre, j'apprécie presque ce moment.

À mon tour, je lâche un rire en me cachant le visage.

— J'ai vraiment deux pieds gauches, bon sang, déclaré-je honteuse.

— Personne ne l'a vu.

Je plante mes iris dans les siens.

— Personne ? Tu te fous de ma gueule ? demandé-je en désignant les personnes autour de nous qui se sont arrêtés pour observer la scène, un sourire en coin.

— OK. Quelques personnes. (Je lui lance un regard sévère.) Oui bon, tout le monde t'a vu. Et alors ? T'es humaine, ça arrive de chuter.

Je secoue la tête.

— Pas d'une manière aussi merdique.

— Je te l'accorde, se moque-t-il gentiment en m'observant alors que je suis toujours par terre.

— Tu vas m'aider à me relever ou tu vas te foutre de ma gueule longtemps ?

Un rire guttural s'échappe de sa gorge alors qu'il se penche enfin vers moi pour m'aider à me redresser.

Nos corps sont proches l'un de l'autre, nos souffles se mélangent, nos yeux sont plantés les uns dans les autres, et nous sommes incapables de bouger, trop perturbés par cette situation.

Soudain, Tyler se penche vers moi.

Un instant, je fronce les sourcils.

Que fait-il ? Pourquoi ai-je l'impression qu'il va m'embrasser d'un instant à l'autre ?

Mon cœur se met à battre plus vite alors qu'il ne le devrait pas.

Ma respiration, elle, devient plus chaotique.

Mon espoir retombe à mes pieds quand sa bouche finit sa course à mon oreille.

— Je comprends pourquoi tu es devenue célèbre aussi vite, déclare-t-il. Ton jeu d'acteur est particulièrement bon. Continue comme ça, parce qu'on nous filme. Soit amoureuse de moi, Harper.

Mes yeux me piquent, comme si j'avais envie de pleurer.

Je retiens ma grimace.

Putain, que m'arrive-t-il ? Je le hais.

Comment peut-il créer autant de bordel dans ma tête ?

Comment peut-il autant influencer mes états d'âme ?

Alors je prends ses paroles au pied de la lettre et j'adopte mon meilleur jeu d'acteur, bien que celui-ci est particulièrement difficile avec le flot d'émotions vagues et mélangées qui me parcourt.

Je lui adresse mon plus beau sourire et l'embrasse pour rendre fous les gens qui nous entourent.

Vous vouliez du spectacle ? Vous vouliez encore vous introduire dans notre vie ? Voilà. Vous avez ce que vous voulez.

— Bien sûr, chéri. Allons-y, on va finir par rater notre vol.

Comprenant que j'adopte enfin mon rôle de fausse petite-amie, il sourit à son tour.

Il m'aide alors à récupérer mes bagages et, comme s'il était un super héros, porte mes valises ainsi que la sienne.

De ses deux seules mains.

Pourquoi est-ce si sexy ? Pourquoi cela me plaît-il autant ?

Bordel.

Grâce à la priorité de la première classe, nous passons l'enregistrement en tout juste quelques minutes, et de même pour la douane.

Nous pénétrons rapidement dans la loge VIP jusqu'à ce que l'embarquement de notre vol soit ouvert.

Ici, la nourriture est à volonté, et je ne cache pas que ce départ à dix-huit heures ne m'a pas laissé le temps de manger comme je l'aurais voulu.

Ainsi donc, je me sers dans plusieurs plats et me constitue une assiette intéressante contenant la culture de plusieurs pays différents.

— Tu vas manger ça ? me juge Tyler en zieutant le pain à l'ail dans mon assiette, abandonnant les bonnes manières avec moi maintenant que nous sommes loin des yeux du monde.

Il ne parle cependant pas assez fort pour laisser paraître un quelconque désaccord entre nous. Même si peu de personnes se trouvent dans les loges, nous ne sommes pas complètement seuls, et nous devons toujours faire attention.

Les caméras ont des yeux comme les murs ont des oreilles.

— Oui, et alors ? Ça te pose un problème ?

— Évidemment ! s'exclame-t-il en gardant tout de même bas le volume de sa voix. On va devoir s'embrasser, tu vas puer de la gueule. Putain de sorcière !

Encore ce surnom à la con dont il m'a affublée peu après notre rencontre.

Je lève les yeux au ciel.

— On arrive demain matin, je me serai lavée les dents deux fois d'ici-là. Laisse-moi tranquille. Bite sur pattes.

Il grimace, aimant aussi peu son surnom que moi quand je l'entends me traiter de sorcière.

— T'as intérêt, se contente-t-il de répondre avant de tourner son attention vers son propre repas.

Je ne rétorque pas et décide plutôt de brancher mes écouteurs à mon téléphone pour écouter de la musique tout en lisant un livre et en mangeant.

Ce repas ressemble au repas parfait, du genre que j'adore.

Si seulement Tyler ne se trouvait pas en face de moi.

Scandal [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant