Chapitre 54 - Harper

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Mon cœur se brise pour Tyler.

Tous ses comportements avec moi, avec les autres s'expliquent soudain.

Sa nature à repousser les gens pour qu'il ne soit pas trop apprécié par qui que ce soit, pour qu'il n'aime pas de peur d'avoir mal, de peur de faire du mal.

— Je ne savais pas comment aimer de nouveau, m'explique-t-il. C'est comme si je faisais face à un mur qui m'empêchait d'avancer assez loin. Et à côté de ça, je fuyais parce que j'avais peur qu'on s'attache à moi, que je fasse de nouveau du mal. C'est pour ça que je n'étais qu'un con avec toi.

J'aimerais lui dire que rien de tout ça n'est de sa faute, qu'à cinq ans, tu n'as pas conscience du danger. Mais je ne peux pas non plus dire que ses parents sont en tort, ils voulaient seulement faire plaisir à leur enfant.

Aucun d'eux n'est réellement à l'origine de cet accident, quand bien même ils avaient conscience du danger.

Finalement, l'origine de cet accident n'est que la météo. Personne n'aurait pu prédire à quel point ce serait violent, et encore moins que la voiture dévierait vers l'autre côté de la route, résultant à un face à face avec une autre voiture qui s'est aventurée malgré les avertissements des météorologues.

Des orages et tempêtes, notamment au Michigan, il y en a régulièrement. Ce n'était pas sa faute ni même celle de ses parents.

— Qu'est-ce qui a changé ? lui demandé-je alors qu'au fond, j'aurais préféré que rien ne change.

J'aurais préféré qu'il continue à se protéger des autres et à être incapable d'aimer.

Tout aurait été tellement plus simple.

Si ça avait été le cas, jamais je n'aurais eu tant de mal à lui avouer mes torts, à lui avouer mon erreur qui aurait pu lui coûter tellement plus qu'une fausse relation.

S'il me détestait, s'il m'avait repoussé autant qu'il le faisait au début, jamais nous n'aurions été dans une telle situation. Jamais nous n'aurions fini par être pris de trop de sentiments pour l'autre, mettant en danger tout ce pour quoi nous avons travaillé. Cette histoire aurait été réglée si facilement.

Jamais je n'aurais eu besoin d'être honnête avec lui, parce que jamais je ne lui aurais dû quoi que ce soit.

Mais aujourd'hui, comment pourrais-je vivre sans lui dire ?

Pourtant, alors que c'est le moment parfait, alors qu'enfin je devrais lui avouer, je n'en fais rien.

Comme une lâche, je me tais, et j'espère pouvoir encore gagner du temps précieux avec lui.

J'ai tellement peur de le perdre alors que ça ne serait que récupérer la monnaie de ma pièce.

— Je ne sais pas. Je sais que tu es différente. Qu'aux yeux de mon cœur, tu mérites d'avoir une chance. Que je suis prêt à souffrir tant que je peux avoir une seconde de bonheur à tes côtés.

Cette phrase me poignarde un peu plus, me rendant encore plus pitoyable, encore plus mauvaise.

Je sais que plus le temps passe, plus je devrais lui dire.

Plus le temps passe, plus je ferais du mal.

À lui comme à moi.

Parce qu'au fil du temps, il s'accroche encore plus à cette fausse image parfaite de moi, et qu'à cause de cela, il tombera de plus haut encore.

Il me détestera encore plus.

Ce sera encore plus difficile pour qu'il me pardonne.

Mais je n'ai pas la force de faire face à sa haine envers moi.

Je n'ai pas la force de le voir souffrir à cause de moi.

Et le pire dans tout cela, c'est que je ne regrette pas un instant d'avoir agi comme je l'ai fait.

À cette époque, il le méritait.

Mais surtout, si je n'avais pas fait ça, qui me dit qu'aujourd'hui, nous ressentirions de telles choses l'un pour l'autre ?

Et si, sans ça, nous serions restés à un statut où nous nous détestions, purement et simplement, sans la moindre arrière pensée, sans le moindre sentiment enfoui ?

Je secoue alors la tête.

— Je ne peux pas t'offrir ça, Tyler.

— Si, tu le peux. En fait, t'es la seule à le pouvoir. T'es la seule femme que mon coeur a décidé d'aimer. Je ne peux plus résister, Harper. Et si je n'essaie pas, je sais que je souffrirais. Alors je préfère essayer et en souffrir que ne pas avoir goûté à une seconde de bonheur avec toi. Si on ne tente rien, je sais que je t'aurais perdu une fois que la promotion du film sera terminée. Je veux accepter mes sentiments et ne plus les combattre.

— Tu as raison, acquiescé-je sans réfléchir.

Bordel, était-ce réellement une bonne idée de dire ça ? Alors que je sais qu'à un moment ou à un autre, il découvrira ce que j'ai fait, et l'un comme l'autre, nous en souffrirons.

Mais tout comme lui, j'ai envie d'être égoïste, j'ai envie de vivre cet amour sans barrière, sans restriction, quitte à me brûler les aîles. Goûter au bonheur, même le temps de quelques minutes.

Après tout, peut-être qu'il me pardonnera. Peut-être que ses sentiments sont assez forts pour encore me regarder en face après avoir appris ce que j'ai fait.

— Moi aussi, je veux vivre intensément avec toi. Moi aussi je veux prendre le risque de souffrir. Moi aussi, je veux connaître la joie d'être à tes côtés, et pas seulement pour les caméras. Pour moi. Pour toi. Pour nous.

Demain, je regretterai sûrement mes paroles, me détestant d'avoir été si égoïste de ne voir que le bonheur que pourrait me procurer Tyler alors que je sais que je vais le détruire encore plus.

Mais quand ses lèvres se posent sur les miennes et que nos langues se mélangent, j'oublie tout.

J'oublie que je ne suis qu'une connasse sans cœur.

J'oublie que je vais détruire Tyler et que tout le chemin qu'il a fait jusqu'ici aura été inutile.

J'oublie que je ne veux pas retourner dans le passé pour changer les choses.

J'oublie que depuis deux mois, je le repousse constamment pour qu'aucun d'entre nous ne se fasse mal.

J'oublie que cette fois, j'ai été trop faible.

Et je l'embrasse, aussi intensément que possible.

Me consumant dans ses bras, appréciant bien trop le moment pour me haïr.

— Je vais t'emmener à notre premier date, déclare-t-il lorsqu'enfin, nous arrivons à nous lâcher.

Je me marre.

— Nous en avons déjà eu un.

— Premier vrai date, se corrige-t-il donc. Qu'est-ce que tu en dis ?

Alors que je devrais refuser, alors que je devrais lui dire que ce n'est pas une bonne idée, j'accepte.

— Très bien.

— Dans trois jours ?

— Dans trois jours, confirmé-je.

Il me sourit et m'embrasse une nouvelle fois.

Jamais je ne me suis sentie aussi heureuse et malheureuse à la fois.

Scandal [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant