Chapitre 19 - Harper

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Même si j'ai l'habitude de voir Tyler dans un costume, je dois avouer que celui-ci me marquera sans doute à jamais.

Je pensais qu'il était du genre à ne porter que de simples costumes noirs, mais ce soir, il est affublé d'un sublime costume bleu pastel qui fait ressortir ses yeux plus que jamais.

Ce genre de couleur est peu démocratisé chez les hommes dès qu'il s'agit d'être habillé classe, mais je dois dire que lorsqu'on voit Tyler, on ne peut que craquer devant sa beauté.

Pour ce repas, j'ai décidé de rester léger en prenant du poulet rôti avec des pommes de terre.

Hors de question que je sois ballonnée aujourd'hui, même si les nombreux burger frites proposés sur le menu me tentaient bien plus.

Et puis, que diront les médias si je prends du poids et que l'on m'aperçoit en train de manger un tel repas ?

Ce qui arrivera arrivera, être célèbre, c'est ne pouvoir jamais avoir la main sur sa vie, autant en public qu'en privé.

Ainsi, si j'avais pris ce burger, ignorant la probabilité que je sois ballonnée, je sais que les médias en auraient fait un article complet tout en détruisant mon image. Parce que c'est bien connu, si l'on est une femme connue, on ne doit que manger des salades et des soupes faibles en énergie pour que notre corps ne prenne jamais un gramme – voire maigrisse.

Savent-ils qu'à cause d'eux, qu'à cause de ces nombreux articles sur le poids et le corps de telle ou telle célébrité, ils causent des dégâts irréparables ?

Savent-ils qu'à cause de leurs mots, des rumeurs sur la santé mentale des uns et des autres circulent constamment entre deux événements ?

Savent-ils que leurs paroles mènent à des maladies graves voire à la mort dans les cas les plus extrêmes – bien trop nombreux à mon sens ?

Se rendent-ils compte un seul instant à quel point la moindre remarque sur le physique de quelqu'un peut avoir des conséquences irréparables ?

Je hais ce monde qui a démocratisé le poids idéal quand la seule chose qui importe vraiment, c'est le bonheur et la santé mentale et physique.

Je hais que même en ayant une voix, personne ne m'entend, personne ne m'écoute, et personne ne le veut.

Je hais que même en ayant une voix, je suis incapable de faire changer les choses, même d'un millimètre.

— Tu aurais pu prendre quelque chose de meilleur, remarque Tyler en zieutant mon assiette tandis qu'il a pu se permettre de prendre un burger frites.

Parce qu'évidemment, seules les femmes n'ont pas le droit à leur liberté quant à leur corps.

Tu couches avec trop d'hommes, tu es une pute, alors qu'à l'inverse un homme est un champion.

Tu es musclée, tu n'es pas attrayante, mais si tu es maigre ou grosse, tu ne l'es pas non plus.

Alors quand le sommes-nous ? Quand pouvons-nous faire ce qui nous plaît à nous, sans être constamment victimes de critiques si normalisées qu'elles viennent de notre famille, de nos amis, ou de parfait inconnus ?

— Je ne suis pas un homme, réponds-je simplement.

Il secoue la tête.

— Du peu que je te connais, je sais une chose : tu ne te laisses pas marcher sur les pieds. Alors pourquoi est-ce que tu t'inquiètes des critiques sur ton poids ?

— Parce que j'en ai reçu toute ma vie.

— Alors pourquoi tu ne dis rien ? m'interroge-t-il.

— Parce que c'est inutile. Ceux qui critiquent le poids des autres n'arrêteront pas parce que je décide de me soulever. J'ai essayé, et ça n'a rien changé. Les gens continuent, la presse continue. Cela fait des années que les femmes se battent pour être considérées de manière égale aux hommes, mais cela ne change pas. On a réussi à obtenir des lois qui sont censées nous protéger, mais dans les faits, cela n'est pas suffisant. On est toujours traitées comme des objets sexuels. Merde, on a inventé les vagins en plastique et même électriques pour être remplacées, mais ce n'est toujours pas suffisant.

Scandal [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant