Il est mannequin. Elle est étudiante en mode.
Le destin s'amuse à bouleverser les plans d'Eden. La voilà contrainte de loger chez une parfaite inconnue qui s'avère être... la grand-mère d'Orion Montgomery, mannequin tourmenté en pleine ascension.
Dè...
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♫ Sinners, Ari Abdul
De trop.
Aujourd'hui, c'était la fois de trop.
Est-ce que je m'y attendais ? Évidemment...
Est-ce que j'étais pour autant prête à ça ? Non, évidemment que non.
On a beau avoir enchainé les chutes les unes après les autres, on ne se fait jamais vraiment à la douleur des rotules sur le goudron.
Les yeux noyés par les larmes, aucune d'entre elles n'entament pour autant sa course sur ses joues. Aaliyah ne bouge pas d'un cil, figée sur le pas de la porte, les doigts crispés sur la poignée...c'est presque comme si le temps avait cessé de faire claquer l'aiguille des secondes sur l'horloge.
Et moi ?
Pauvre âme échouée sur le trottoir, je boucle non sans mal mon dernier sac, en équilibre entre le vide et le dernier morceau libre de ma valise. Mes gestes sont capricieux, maladroits. Je hais ces secondes qui semblent durer des heures, je hais le regard de ma meilleure amie peser sur moi comme ultime châtiment. Je hais, encore et encore, sans interruption, du lever du soleil à la nuit tombée.
Par-dessus tout, je me hais moi. Du moins, ce qu'il en reste...
— Je suis désolée, Eden, mais je ne peux plus supporter tout ça. Te voir te détruire, te morfondre...s'en est trop pour moi. Je t'aime, tu le sais ça ? Mais je hais voir ce que tu t'infliges...
Cette fois-ci, les larmes roulent enfin sur ses joues. Je ne lui réponds pas, à ma jolie afro-américaine. Parce que les mots ne suffisent pas pour lui faire comprendre.
— C'est peut-être égoïste de ma part, tu sais...de te lâcher quand tu en as le plus besoin. Mais honnêtement, je n'ai jamais été d'une grande aide pour toi. N'est-ce pas ? Je n'ai jamais su te tenir la main. Je suis tellement impuissante, Eden...
Alors tu préfères me laisser sombrer loin de toi, pour ne plus avoir à supporter cette image que tu t'es faite de moi.
La fille qui se laisse bercer par sa douleur.
La fille qui s'oublie dans ses affres.
La fille que tu ne comprends pas, et a qui tu ne peux apporter aucune aide.
— Je n'ai pas les épaules pour toi, conclut-elle.
— Je ne les ai pas plus que toi, Aaliyah. Mais je ne peux pas me fuir, moi.
Comment te dire que tu ne peux pas m'aider ? Pas plus que je ne m'aide.
Je regroupe mes sacs sur mon épaule droite, les anses s'emmêlent et tirent sur mes ondulations blondes. De mon bras libre de tout poids, j'attrape ma valise, sur laquelle tiennent à peu de choses d'autres sacs, ma vie entière entassée dans ces bagages étroits, et m'engage sur l'asphalte abimée par le passage trop successif des voitures dans l'allée étudiante.