Chapitre 24

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Après quelques minutes à marcher entre les troncs d'arbres, ils arrivèrent finalement en ville. Et l'effervescence de la cité émerveilla Kyoka. Il faisait nuit et tout le monde était supposé dormir. Mais ce n'était pas le cas. Des milliers de lumières de toutes les couleurs étaient allumées. Elles éclairaient les marchands de nuit ainsi que les promeneurs. Il y avait beaucoup de monde et beaucoup de bruit. Il y avait aussi de la musique. La professeure se précipita vers un groupe qui était entouré par quelques personnes, lâchant la main de son guide.

C'était merveilleux. Leur musique était tellement entraînante qu'elle applaudit en rythme. À la fin de leur petit concert, les troubadours s'inclinèrent devant leur auditoire. L'un d'eux enleva sa vieille casquette et fit le tour des spectateurs, dans l'espoir de recevoir un peu d'argent. La majorité avait déposé quelques pièces, Kyoka y compris. Denki fit de même à côté de la noiraude, heureuse comme une enfant devant des sucreries. Puis, elle s'exclama tout en pointant un étalage qui brillait. Sans attendre le blond, elle s'y précipita.

Des bijoux de toutes sortes scintillaient à la lumière des lanternes. C'était un régal pour les yeux de la jeune femme. Elle avait même repéré un collier qui s'accorderait parfaitement avec l'une de ses robes. Mais elle n'eut pas le temps de l'admirer plus car un magicien faisait des tours de passe-passe pour amuser les passants. Rapidement, elle se précipita pour le voir à l'œuvre et tenter de découvrir comment il faisait. Cet amateur serait vite percé à jour. Connaissant de vrais pratiquants de magie, Kyoka aurait vite fait de deviner ses techniques. Derrière elle, Denki ne suivait pas.

Ils allaient être en retard pour la pièce si elle continuait à s'émerveiller devant tout et n'importe quoi. Ça allait bientôt commencer! Alors qu'elle était prête à partir admirer le marchand de fleurs, Kaminari la retint en lui tenant la main. La jeune femme se retourna, étonnée.

- Ce n'est pas ce que je voulais te faire voir. Dit-il.

- Et qu'est-ce que tu voulais me faire voir?

- Une pièce de théâtre.

- Du théâtre?! Pourquoi ne pas l'avoir dit plus tôt?!

- Je pensais que tu refuserais de m'y accompagner.

- Mais quel nigaud! J'aime beaucoup le théâtre!

- Vraiment?

- Oui! Pressons-nous!

Tous deux coururent jusqu'à l'entrée du théâtre où ils jouaient une autre version de Roméo et Juliette. Sur les murs, des affiches étaient placardées, indiquant le nom de la pièce, l'heure de la représentation et le prix des places. Kyoka ne tenait plus en place et pressait Denki qui payait à l'entrée. Quand il eut fini, elle passa son bras en-dessous du sien pour le tirer vers une bonne place. Très vite, les lumières s'éteignirent et les rideaux se levèrent.

La pièce avait pour titre Rosaline. Et selon ce que Kyoka avait lu à l'entrée du théâtre, ladite Rosaline serait l'ancienne amante de Roméo. Un spectacle qui promettait d'être drôle. La jeune femme avait beaucoup ri. Si la véritable histoire de Roméo et Juliette avait été comme celle-ci, ça aurait été moins dramatique.

À la fin de la représentation, tout le monde sortit dans le calme et la bonne humeur. Denki avait réussi à briser la glace avec elle et ils marchaient doucement dans les rues, bras dessus bras dessous.

- Alors, comment as-tu trouvé cette pièce? Demanda-t-il.

- C'était plaisant.

- Mais par contre, pourquoi n'avons-nous pas pris les places au premier rang?

- On aurait regardé l'orchestre dans la fosse au lieu des acteurs.

Le blond hocha la tête. Dans n'importe quelle situation, kyoka Jirou réfléchissait toujours. Il n'y avait pas un seul instant où elle n'analysait pas son entourage. Un vrai professeur. Mais la promenade ne dura pas longtemps, étant donné qu'il fallait bien rentrer à un moment ou à un autre. Tous deux marchèrent alors ensemble, les pas synchronisés, en direction de la forêt. Mais précipitamment, Kyoka poussa Denki et ils se cachèrent derrière un carrosse.

- Hein? Pourquoi...?

- Tais-toi.

Ne comprenant pas la soudaine attitude de la jeune femme, le prince jeta un regard dans la direction où elle regardait et y vit son ami accompagné. Ils marchaient doucement, plongés dans leur petite bulle romantique.

- Oh, c'est Eijiro et Mina. Ils viennent sûrement de sortir du théâtre. Allons les saluer.

- Non, tu ne vas nulle part.

- Pourquoi cela?

- S'ils nous voient ensemble en pleine nuit, ils vont se méprendre sur la raison de notre venue. Surtout Mina.

- Bon...

Ils prirent un autre chemin pour éviter de croiser les deux tourtereaux. Mais à un croisement, Denki poussa Kyoka dans une ruelle et attendit, paniqué.

- Ils sont là? Demanda Kyoka, dans le même état que lui.

- Non. Cette fois, c'est Shoto et Momo. S'il me voit ici, il ira me dénoncer à mon père.

- Ils sont aussi venus voir la pièce de théâtre? Comment est-ce possible de croiser ces personnes en particulier pendant la même soirée?

- Eh bien... Je savais que Shoto y serait.

- Et l'idée que tu puisses le croiser ne t'a pas traversé l'esprit?

- Honnêtement, non.

- Imbécile! Rentrons vite avant de croiser quelqu'un d'autre.

ils sortirent de la ruelle et regardèrent de tous les côtés. Mais à peine avait-il fait un pas que Kyoka le tira par le col de sa chemise et il se retrouva contre elle, les mains plaquées sur le mur au niveau de sa tête. Leur proximité était plutôt gênante. La noiraude leva la tête et son regard tomba sur celui du prince. Son cœur fut le premier à réagir. C'était la même sensation que lorsqu'il lui a offert la broche, mais en un peu plus fort. Devant son silence, Denki esquissa un sourire. La première pensée qui vint à Kyoka fut qu'il était beau.

- Tu sais, Jirou, il y a plusieurs moyens de se rapprocher de moi. Nul besoin d'être aussi agressive.

- Quoi? Que j'essaie de... Non! Pas du tout! J'ai vu Toru passer! Si elle m'avait vu, ça aurait été pire.

Remarquant qu'elle avait toujours les poings crispés sur le col de la chemise de Denki, elle le repoussa et s'en alla vite. Le prince la talonna et ils regagnèrent la forêt sans que plus personne ne les croise. Ils étaient enfin au calme.

- Je suis désolée pour tout à l'heure. Je n'avais pas l'intention de faire des gestes déplacés. S'excusa-t-elle.

- Ce n'est pas grave.

- Et merci pour la soirée, Kaminari.

- C'était un plaisir. Et j'ai un petit cadeau pour toi.

Il s'arrêta et se mit face à elle. De sa poche, il sortit un collier en argent. Un trèfle à quatre feuilles violet brillait à la lumière de la lune. Kyoka regarda le bijou qu'elle avait vu plus tôt. Il était magnifique.

- Mais avant de te l'offrir, est-ce que donner un collier à une fille a un sens particulier? Je veux dire, comme la broche. Je ne veux surtout pas qu'il y ait de malentendu entre nous.

Kyoka sourit. Quelle prévenance.

- Ne t'en fais pas, ça n'a pas de signification particulière.

- Tant mieux. Alors, je ne sais pas si les trèfles violet portent chance, mais j'ai trouvé qu'il était joli. En plus, tu semblait le vouloir.

La jeune femme allait fondre. Oui, ça n'avait rien d'une demande en mariage ou autre, mais ça avait atteint son cœur. Personne n'avait jamais été aussi gentil avec elle. C'était la première fois de sa vie qu'elle vivait un tel instant. Étonnement, elle faisait beaucoup de choses pour la première fois avec lui. Il lui avait offert sa première broche, elle était sortie de nuit pour la première fois et il lui offrait un collier. Et surtout, il avait éveillé quelque chose en elle. Quelque chose qu'elle n'avait jamais connu avant.

Denki s'approcha alors d'elle et accrocha le bijou à son cou. Le contact de ses doigts effleurant sa nuque la fit frissonner. Quand il eut fini, il la regarda. Elle était belle avec ce collier. Elle était belle avec ce sourire. Elle était belle peu importe la situation. On pourrait lui montrer un milliard de princesses, Kyoka serait toujours la plus belle.

- Merci beaucoup, Kaminari.

Apprenti princeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant