Chapitre 21

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Munie d'un crayon et d'une règle, Kyoka dessinait avec précision sur une feuille. Quelques jours plus tôt, elle avait renvoyé le corbeau avec un message pour son père. Elle n'avait pas encore fini ce qu'il lui avait demandé de faire. Il lui fallait un peu plus de temps. Et connaissant l'impatience de Kyotoku Jirou, elle devait se presser. Concentrée sur ses affaires, elle n'entendit pas la porte de la salle d'études s'ouvrir, ni le bonjour du prince. Ce dernier s'approcha d'elle et regarda par-dessus son épaule.

- Qu'est-ce que tu fais? Demanda-t-il.

La jeune femme sursauta et tenta de cacher du mieux qu'elle pouvait ce qu'elle dessinait.

- Ça ne se se fait pas de surprendre les gens de cette manière!

- Je suis désolé. Alors, que fais-tu?

- Je prépare ton nouvel examen.

- Quoi? Déjà? Jirou, parfois je pense que ton but est de me tuer et non m'enseigner.

Kyoka plia sa feuille et leva les yeux au ciel. Est-ce qu'elle allait vraiment arriver à être plus gentille et plus patiente avec lui? Ça allait être difficile. Bientôt, le cours débuta et elle fit de son mieux pour pour être moins grincheuse, ce qui semblait marcher. Denki semblait beaucoup plus concentré et il portait intérêt au cours de mathématiques. Bon, pas beaucoup, mais il faisait l'effort de ne pas énerver son professeur. Au bout de quatre heures de cours, il n'avait pas explosé, malgré les moments où il se grattait la tête devant une impasse. Et quand c'était le cas, Kyoka venait l'aider.

Si on lui avait dit quelques jours plus tôt que Kyoka Jirou était capable d'être aussi gentille, il en aurait ri. Mais là, c'était à la fois plaisant et choquant. Elle ne lui criait pas dessus, elle ne se mettait pas en colère et elle ne l'insultait pas. Pourquoi faisait-elle cela? Pas que ça lui déplaise, mais il avait l'impression de regarder une autre personne. Pendant qu'elle expliquait en pointant les équations, il s'était adossé à son siège et avait levé le regard vers elle. Qu'est-ce qui lui arrivait? Quant à elle, se sentant observée, elle baissa les yeux vers lui. Leurs regards s'accrochèrent pendant l'espace d'une seconde avant que Kyoka ne brise ce contact, les joues roses.

- Que... Qu'est-ce que tu regardes?

Denki ne put s'empêcher de la trouver mignonne. Kyoka était vraiment mignonne quand elle était gentille. Ça lui donnait envie de la prendre dans ses bras et de la serrer fort. Bonté divine, d'où lui venait cette idée farfelue? Kyoka aurait vite fait de lui décocher un uppercut s'il osait s'approcher de trop près. L'instant de silence se termina quand la noiraude lui donna un coup sur la tête.

- Arrêtes de rêvasser.

- Désolé! Dit-il en reprenant sa plume et en se concentrant sur ses exercices.

Quand le cours toucha à sa fin, Kyoka prit la feuille et corrigea ses exercices. Toujours assis sur sa chaise, Denki priait pour qu'il y ait au moins une réponse correcte. Pour la première fois, il s'était réellement investi dans cette discipline. Il espérait que ses efforts n'étaient pas vains. Kaminari n'osa plus bouger quand la jeune femme se leva de son siège pour le rejoindre, le visage impassible. Elle s'arrêta devant sa table et leva la main. Appréhendant un autre coup sur la tête, le prince ferma les yeux, prêt à recevoir sa sentence. Encore une fois, il n'avait pas été à la hauteur de ses attentes.

Mais la main de Kyoka se posa doucement sur le haut de son crâne pour lui caresser les cheveux. Denki rouvrit les yeux et leva la tête, étonné par ce geste. Quand il regarda son professeur, elle souriait. Mais pas comme quand elle avait une idée machiavélique en tête. Ça ne ressemblait pas non plus à celui qu'elle avait quand elle se moquait de lui. C'était un tout autre sourire. Quelque chose de nouveau. Alors comme ça, Kyoka Jirou était capable de faire ce genre de sourire. Denki le lui rendit tout en appréciant le contact de sa main dans ses cheveux.

- Tu es moins bête que ce que j'avais pensé.

- Tu en doutais?

- Et pas qu'un peu.

- Continue.

- Que je continue de douter de toi?

- Non. Continue de me caresser la tête, c'est agréable.

Kyoka le regarda puis rougit. Il avait l'air d'un enfant. Un enfant très mignon. Les yeux fermés, il souriait. Pour elle ne savait quelle raison, ce sourire lui faisait penser à un chat. C'était un miracle si elle ne saignait pas encore du nez. Mais elle retira vite sa main, sentant que ça devenait gênant. Denki rouvrit les yeux et afficha une mine boudeuse.

- Pourquoi tu as arrêté?

- C'est que...

- Tu sais quoi? On va faire comme ça. Tu me donneras une récompense à chaque fois que je réussis à répondre aux questions. Et c'est moi qui choisis quelle sera ma récompense.

- Tu ne vas pas un peu trop loin?

- Pas du tout! Pour qu'un âne avance, il faut lui tendre une carotte.

- Excellente comparaison.

- J'aurais dû ne rien dire. Répondit-il en soupirant.

Mais cette méthode n'était pas non plus une mauvaise idée. Si elle lui promettait quelque chose de bien en échange, il pourrait peut-être évoluer. Par contre, elle ne pouvait pas le récompenser à chaque bonne reponse. Ça ne serait pas drôle. Elle voulait le voir trimer comme jamais auparavant. Une récompense, ça se mérite.

- Je suis d'accord. Dit-elle.

- Vraiment?!

- Mais uniquement après chaque examen hebdomadaire.

- Quoi? Non! Je veux mes récompenses dans les plus brefs délais!

- Et moi, je dois envoyer tes résultats au roi chaque semaine. S'il est satisfait de tes notes, tu auras ce que tu veux.

Ça semblait équitable. Après tout, une semaine, ce n'est pas beaucoup. Denki hocha la tête et tendit la main pour serrer celle que Kyoka. Il allait devoir faire des efforts pour avoir ce qu'il veut. Et il avait déjà une petite liste en tête. Le cours prit fin sur cet accord et tous deux allèrent déjeuner. En direction de la cuisine, Kyoka se fit intercepter par sa femme de chambre, toute souriante.

- Ouh, Kyoka, quel est ce petite sourire en coin que tu as?

- Quel sourire? Je ne souris pas.

- Mais si, mais si. Que s'est-il passé?

- Rien.

- Je ne te crois pas.

- Et Mina? Comment va-t-elle?

- Tu esquives la question, mais on y reviendra. Mina ne s'est pas rasé la tête, heureusement. Comme je l'avais dit, Kirishima éprouve les mêmes sentiments qu'elle. Ils sont donc en train d'apprendre à être un couple. C'est fou ce qu'ils sont gênés quand ils sont ensemble!

Toru oublia vite Kyoka et parla de tout et de rien. C'était un soulagement pour la noiraude.

Apprenti princeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant