Il fut difficile de trouver un endroit où se cacher, étant donné qu'ils étaient en pleine forêt. Mais heureusement, ils avaient trouvé un vieux cabanon à l'abandon. Le petit groupe avait erré entre les troncs d'arbres pendant deux jours avant de la trouver. Le bâtiment n'apparaissait dans aucune carte que Todoroki avait étudiée. Plus tard, quand tout reviendrait à la normale, il la ferait démolir, pour ne pas donner un abris aux voleurs.
C'était une vieille maison délabrée, et les termites avaient déjà grignoté une bonne partie du bois. La pluie avait aussi fait son travail, faisant que le sol poisseux et recouvert de mousse à certains endroits grinçait sous leurs pas. Le vent glacial du début de soirée filtrait à travers les interstices du mur où quelques insectes entraient et sortaient. Les fauteuils étaient dans le même état que le sol, ne donnant pas envie de s'asseoir dessus. Un escalier montait vers l'étage où des oiseaux avaient fait leurs nids.
Après leur arrivée, Mina et Eijiro s'en allèrent pour chercher des vivres. Le reste du groupe resta dans la maison. Fatiguée de la longue marche, Kyoka s'assit sur l'un des fauteuils sans penser à l'état de sa robe. Peu lui importait si elle était sale. C'était le cadet de ses soucis. La jeune femme était toujours attachée et ne disait rien, pensant à un moyen d'entrer dans le château et arrêter Kyotoku. C'était un homme têtu qui n'écoutait personne à part lui-même. Quelles étaient leurs chances de le convaincre de faire le bien et être ami avec tout le monde? Il était évident qu'ils n'avaient aucune chance.
Et s'ils venaient à bout de lui, l'envoyer en prison serait pareil à le laisser en liberté. Avec sa magie, il pourrait facilement s'en échapper et se venger. Alors, il n'y avait plus qu'une seule solution. Kyoka ressentit un pincement au cœur en pensant à cela, mais c'était le mieux à faire. C'était pour le bien de tout un royaume. La jeune femme n'était plus assez égoïste pour faire passer ses propres besoins avant ceux de ces villageois innocents. En repensant à eux, elle espérait qu'ils ne soient pas blessés.
La jeune femme était perdue dans ses pensées. Elle ne voyait même pas le prince la regarder depuis le couloir. La voir dans un état pareil lui fendait le cœur, mais il n'avait pas d'autres choix. Il ne pouvait plus avoir confiance en elle. Denki devait s'assurer de sa bonne foi avant de prendre n'importe quelle décision. Shoto le rejoignit, n'étant pas parti avec ses deux amis. Le conseiller du prince savait que la décision du blond concernait Kyoka. Même dans cette situation, son univers tournait autour d'elle.
- Qu'est-ce que tu comptes faire? Demanda-t-il.
- Sauver notre royaume.
- Comment? Jusque là, je ne comprends toujours pas ce que tu fais. La cachette et les vivres étaient indispensables, mais pour quoi faire, l'instrument de musique?
Denki soupira. Il ouvrit la bouche, mais rien n'en sortit. Les mots restaient coincés dans sa gorge, la rendant douloureuse et faisant monter ses larmes. En fait, il n'y avait qu'un seul mot en travers de sa gorge. Un seul nom. Un nom qui lui faisait mal. Le prince n'avait même plus la force de prononcer le nom de la professeure. Il ravala sa salive et se contenta d'utiliser un pronom.
- Elle m'a dit qu'elle savait comment vaincre son père.
- Et tu la croies?
- Bien sûr que non. Après ce qu'elle a fait, c'est impossible de la croire. Mais c'est notre seule solution pour l'instant.
- Et qu'a-t-elle dit?
- Que son père lui a jeté un sort qui l'empêchait de toucher n'importe quel instrument de musique. Et que si elle parvenait à lui donner le trône, il la libérerait.
- C'est vrai que c'est difficile à croire. Ils ont travaillé main dans la main pour nous piéger. Mais d'un autre côté, ça pourrait être vrai. Elle a l'air vraiment misérable, assise sur ce fauteuil rongé par des termites.
C'était pour cette raison que Denki ne lui faisait pas confiance. Elle pouvait afficher la plus innocente des expressions et vous poignarder dans le dos après. Mais comme il l'avait dit, c'était leur seule option pour l'instant.
- Donc, c'est pour prouver ses dires, l'instrument.
- Oui.
- Et s'il s'avère qu'elle dit la vérité?
- Elle nous mènera à Jirou. Elle le connait plus que nous et sait comment le vaincre. Si elle fait ne serait-ce qu'un seul faux pas, je te la laisse.
- Je te demande pardon?
- Fais-en ce que tu veux. L'envoyer en prison, la décapiter, tout ce qui te fera plaisir. Je sais que tu en meurs d'envie.
Effectivement, Shoto voulait punir cette traîtresse. Mais le regard de Denki était contradictoire à ce qu'il disait. Si Kyoka finissait en prison, il ne resterait pas de marbre. Il cacherait probablement ce qu'il ressentait, mais il ne pourrait pas le garder pour lui très longtemps. Denki allait craquer et s'effondrer. Et encore une déception amoureuse... Il ne pouvait pas trouver pire.
Un peu plus tard dans la soirée, Mina et Eijiro étaient de retour, les mains chargées de sacs en tissu pleins à craquer. Kirishima déposa ses affaires par terre et sortit de trombe de la maison. La rose soupira et déposa également les siens.
- Qu'est-ce qu'il a? Demanda le prince.
- Ça ne l'a pas réjoui de voler les marchands. Et franchement, à moi non plus.
Denki venait de réaliser qu'ils n'avaient pas un sou en poche. Les deux soldats avaient été obligés de voler pour avoir des vivres. Eijiro Kirishima était un homme droit et juste, qui n'a jamais commis la moindre infraction depuis qu'il le connaissait. Il aimait la justice et protégeait les plus faibles. Alors, voler au peuple qu'il protégeait avait sûrement été douloureux pour lui. Le prince regrettait un peu de lui avoir confié cette tâche. Puis, Ashido lui tendit un violon crasseux auquel il manquait une corde.
- Tiens. Je l'ai volé à un mendiant.
Denki prit maladroitement l'objet et Mina se frotta les mains contre son pantalon. Elle n'avait pas aimé faire ça. La soldate se sentait sale, de l'intérieur comme de l'extérieur. Tout ça à cause de Kyoka.
- Si vous me cherchez, je serai dehors avec ton père et Eijiro.
- Attend. Maintenant que tout le monde est là, on peut poursuivre.
Mina leva un sourcil et appela les deux hommes assis dehors. Quand tout le monde fut présent dans ce qui était probablement la salle à vivre, Kyoka se leva également. Le blond ordonna à son conseiller de défaire les cordes qui retenaient les poignées de la jeune femme. Quand elles tombèrent sur le sol humide, Denki serra les poings. La professeure se massait les poignées, déjà entourés de bleus. Ça lui faisait mal de lui faire cela, mais c'était pour s'assurer qu'elle ne leur échappe pas.
Prenant un air se voulant strict, il tendit le vieux violon à Kyoka. Et regarda ce dernier et un frisson lui parcourut la colonne vertébrale.
- Prend ça. Ordonna Denki.
- Pourquoi?
- Pour prouver que tu es réellement victime d'un sortilège.
La noiraude posa les yeux sur l'objet. Elle se rappelait bien de la douleur après avoir tenté de jouer d'une harpe. Elle ne voulait plus ressentir ça. Jamais. Mais les circonstances la forçaient et elle devait regagner - ne serait-ce qu'un tout petit peu - la confiance de Denki. C'était tout ce qui lui fallait pour pouvoir vaincre Kyotoku Jirou. Elle prit une grand inspiration, légèrement coupée par l'odeur de la moisissure, et saisit fermement le manche du violon. Ses doigts commencèrent alors à trembler, et elle se mordit la lèvre inférieure.
C'était la même sensation. La même impression de brûler de l'intérieur. Son corps voulait arrêter. Sa peau souffrait le martyr. Ses doigts la suppliaient de lâcher le violon. Mais Kyoka raffermit sa prise pour que tout le monde voit qu'elle ne mentait pas. Plus elle tremblait, plus ils pouvaient voir apparaître une marque au fer rouge sur le dos de sa main. C'était comme si elle avait du fer sous la peau, et la lumière orangée produite par ce métal se reflétait sur le dos de sa main.
Tout le monde était choqué en voyant les courbures orangée sur la main du professeur. À bout de force, Kyoka lâcha l'objet qui tomba dans un bruit sourd sur le sol. Elle se tint la main et espérait que la douleur s'en aille le plus rapidement possible.
- Voilà, vous avez tout vu.
- Très bien. Quel est ton plan? Demanda Denki.
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Apprenti prince
Fanfic"- Soyons honnêtes, votre majesté. Votre fils n'a pas les épaules qu'il faut pour vous succéder au trône. - Je ne le sais que trop bien. mais que faire? - J'ai une solution." Évidemment, personne ne veut d'un prince incompétent. C'est pour cette r...