Chapitre 46

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Depuis la dernière lettre envoyée à son père, Kyoka n'avait pas reçu de nouvelles. Elle se doutait bien qu'il n'était pas très content de recevoir ce genre de nouvelles. Quelques fois même, la professeure regrettait d'avoir envoyé ce courrier. Elle savait qu'il allait réagir excessivement. Et ce serait sur elle que retomberait toute sa colère. Elle n'osait imaginer ce qu'il allait bien pouvoir lui faire... La vision du sous-sol de sa maison lui revint en tête, ainsi que les heures passées à être fouettée. Plus jamais elle ne voulait revivre une telle chose. Peut-être devait-elle lui présenter ses excuses?

— Kyoka?

— Hm?

— Tu écoutes?

— Oui, bien sûr.

Mais quand elle était avec Denki, tous ses malheurs semblaient ne pas exister. Elle avait l'impression de pouvoir tout surmonter. D'autant plus qu'il avait promis de tout faire pour la rendre heureuse. Certes, il ne pourrait pas faire face à son père, mais ses paroles étaient réconfortantes. Le prince lui sourit et elle le lui rendit, tristement.

— Dis-moi, Denki... Est-ce que tu me pardonnerais si je t'avais caché quelque chose de très important?

Le blond réfléchit à la question. Elle avait l'air bien sérieuse.

— Je serais en colère contre toi, naturellement. Mais oui, je te pardonnerais.

— Pourquoi?

— Parce que je sais que c'est toi et que tu ne fais pas les choses sans bonnes raisons.

— Et si je t'avais caché quelque chose de vraiment grave? Est-ce que ce sera encore le cas?

— Pourquoi me poses-tu toutes ces questions? Il y a quelque chose que tu m'as caché?

Devait-elle lui dire? S'il était au courant des plans de Kyotoku Jirou, il pourrait peut-être aider la jeune femme à s'en sortir. Mais d'un autre côté, peut-être qu'il ne lui pardonnerait pas. Après tout, Kyoka était sur le point de commettre une trahison. La trahison était punie par la peine de mort. D'autant plus que Denki n'était pas roi. S'il l'était, elle aurait peut-être une réduction de peine. Mais puisque c'était son père qui était sur le trône, elle risquait vraiment de finir la tête coupée.

Après mûres réflexions, mieux valait ne rien dire. Elle était une Jirou après tout. Elle était capable de gérer n'importe quelle situation. Avec un sourire forcé, elle secoua la tête.

— Non, rien. Je l'ai juste lu dans un livre.

Mais le prince était loin d'être dupe. Il avait appris à reconnaître et à comprendre toutes les mimiques de Jirou. Quand elle était triste, il le savait. Il savait aussi quand elle était énervée. Et ce sourire forcé n'augurait rien de bon. Était-ce de sa faute? Avait-il fait quelque chose de mal? Le prince s'excusa alors auprès d'elle pour aller accomplir ses devoirs princiers, après les cours.

Depuis qu'ils s'étaient déclarés leur amour, ils nageaient dans le bonheur. Denki était comblé. Kyoka était la femme qu'il avait besoin. Il n'y avait pas à connaître une personne depuis des années pour savoir qu'elle était la bonne. Le blond était sûr qu'il pourrait être heureux à ses côtés. Mais depuis le courrier donné par Ashido, elle agissait étrangement. Kyoka était toujours perdue dans ses pensées et semblait triste. Il n'avait pas osé lui demander, mais il voyait que c'était grave. Peut-être lui cachait-elle vraiment quelque chose?

Kaminari entra dans son bureau et retrouva son ami de toujours, en train de trier des papiers. En voyant son prince entrer, Shoto s'interrompit dans sa besogne. Denki arborait une mine basse, ce qui n'était vraiment pas dans ses habitudes. Le prince s'assit à son bureau et prit sa tête entre ses mains. Ces derniers temps, tout le monde de Denki tournait autour de Jirou. Ses humeurs étaient contrôlées par la simple présence de cette fille. Il était presque partout où elle était. Ces deux-là ne se séparaient que pour aller dormir. Et Todoroki n'était pas sûr qu'ils allaient dormir dans leurs chambres respectives.

Alors, c'était facile de deviner que la cause de ce soudain changement d'humeur était la jeune femme.

— Jirou, c'est ça? Demanda-t-il.

— Oui...

— N'as-tu donc aucune raison de vivre?

— Non, aucune...

— Qu'est-ce qui se passe, cette fois?

— Elle agit bizarrement, ces derniers jours.

Le bicolore tiqua à l'entente de cette phrase. Il avait fait des investigations, mais n'avait rien trouvé de suspect chez elle. Pourtant, il était sûr qu'elle cachait quelque chose. Un événement s'était produit pour que Jirou change d'attitude. Shoto reposa ses papiers pour s'intéresser aux problèmes de cœur du prince.

— C'est-à-dire?

— Elle m'a posé une question étrange tout à l'heure. Elle m'a demandé si je lui pardonnerais si je découvrais quelque chose qu'elle m'avait caché.

— Et que lui as-tu répondu?

— Que je lui pardonnerais.

Il n'en attendait pas moins de la part de cet homme amoureux.

— Elle n'a rien dit de plus?

— Rien. Je me demande si elle va bien. Et si...

Il se redressa de sa position avachie et ouvrit grand les yeux.

—... Et si elle avait un autre homme dans sa vie? Imagine qu'elle ait trouvé quelqu'un de mieux que moi.

Shoto roula des yeux et Denki le regarda avec le regard larmoyant. N'importe quel fait et geste de Kyoka pouvait complètement le chambouler. Le prince avait une imagination débordante. Jirou avait beau être suspecte, Todoroki voyait qu'elle aimait réellement Denki. Mais ce n'était pas étonnant qu'il réagisse de la sorte.

— Et si c'était ça? Demanda-t-il au bord des larmes.

— Je suis sûr que non.

— Après tout, il y a tellement d'hommes qui sont mieux que moi.

— Denki, je t'assure que non.

— Kyoka ne m'aime plus...

S'en suivit d'un torrent de larmes que Shoto n'a pas pu arrêter. Alors, il s'en alla rejoindre les gardes. À cette heure, le capitaine devait être en train d'entraîner ses subordonnés. Il fallait qu'il lui demande de mettre tous ses hommes au garde à vous. Todoroki sentait qu'il allait se produire quelque chose. Et son instinct ne l'avait jamais trompé.

À un croisement de couloirs, Todoroki vit Jirou. Quand cette dernière le vit à l'autre bout du couloir, elle s'interrompit dans sa marche. Elle sentait qu'il était au courant de quelque chose. Et avec lui, elle ne pouvait pas espérer se faire pardonner. Kyoka avait beau être avec le prince, Shoto la considèrerait comme n'importe quel traitre méritant la peine de mort s'il venait à découvrir son secret. Le bicolore hocha une fois la tête avant de s'en aller, laissant la professeure avec ses pensées. Les prochains jours promettaient d'être tendus.

Apprenti princeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant