Chapitre 23

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Masson

De retour à la villa, je gare la voiture devant les marches de l'entrée principale. J'aurai pu accompagner Matt et son père à l'Angélus, mais cette soirée m'a épuisée. Je m'accorde un moment, la tête posée sur l'appuie-tête du siège et ressasse les événements de la soirée. Je peux me féliciter d'avoir, encore une fois, su garder le contrôle...

Je laisse échapper un soupir puis sort de ma voiture. Il me tarde de me jeter dans mon lit, pourtant il n'est que 23h, mais au vu des longues soirée que je passe en ce moment, une nuit complète me fera le plus grand bien. Si, bien sûr, j'arrive à dormir sans cauchemars !

Je traverse la maison qui est, en vue de l'heure, complètement déserte. Je me dirige dans la cuisine, histoire de voir s'il y a quelque chose à manger dans le frigo. En règle générale, Maria laisse toujours du rab pour Matt et maintenant moi. Il nous arrive assez souvent de rentrer tard et comme, avec nos missions, nous n'avons pas forcément le temps de manger, c'est pratique de ce dire que de la nourriture nous attend à la villa.

Un Tupperware de ratatouille avec du riz accompagné de poulet mariné... Parfait. Comme j'ai un micro-onde dans ma chambre, qui ressemble plus à un loft qu'autre chose, je décide de l'emporter pour manger tranquillement installé dans mon canapé.

Je monte les escaliers et m'apprête à tourner pour rejoindre l'aile de ma chambre quand j'entends du bruit. Je me fige et me concentre afin de mieux identifier ce son. De la musique, une... mélodie.

Je fais demi-tour et m'avance vers l'autre aile. Je me laisse guider par la musique qui me fait m'arrêter à la porte de chambre d'Aria. Du violon.

— Elle joue, dis-je dans un chuchotement pour moi-même.

Je reste planté là, à l'écouter jouer cet air qui semble si triste et à la fois tellement beau. C'est la première fois que je l'entends jouer et je dois dire que c'est magnifique.

Je me demande bien ce qu'elle peut jouer. Je n'arrive pas à savoir de quel morceau il s'agit. Je sors mon portable et ouvre mon application pour qu'il me donne le titre : "Lovely" de Billie Eilish. Je capture l'écran et le range dans ma poche.

Mon cœur bat plus fort dans la poitrine au fur et à mesure que la mélodie continue. Un frisson parcourt mon corps au moment où elle joue un passage plus aigu. Un passage plus lent vient ensuite, mais il est tellement plus intense qu'il absorbe toute mon attention. Je ne saurais comment l'expliquer, c'est comme si un courant d'air glacial rentrait en possession de mon être.

Je frissonne et pourtant je n'ai aucun visuel, mais ça ne m'empêche pas de ressentir des vagues d'émotions qui me submergent tout entier. Cette mélodie s'engouffre à l'intérieur de moi et me vide de tout sentiment joyeux. Il faut que je parte. Je sais que je dois partir, mais mes pieds sont comme cloués au sol. Je ne sais pas ce qui ce passe, c'est la première fois que ça m'arrive. Je ferme les yeux et me laisse emporter par toute la détresse qu'elle fait passer à travers le violon.

La sonnerie de mon téléphone retentit et me fait sortir de la prison où mon corps était enfermé. Je réalise, en étant collé à sa porte, qu'Aria a forcément dû l'entendre elle aussi. Je me sauve rapidement sans faire de bruit et ne m'arrête que lorsque j'entends le bruit de la porte s'ouvrir. Je fais mine de rien en marchant d'une allure normale.

— Qu'est-ce tu fous là ? Me demande-t-elle alors que je suis dos à elle.

— Au cas où tu l'aurais oublié, j'habite ici maintenant.

Je me tourne doucement, le visage crispé en espérant qu'elle ne voit pas que j'ai pu l'écouter. Je me rappelle très bien les paroles de son frère qui me disait avoir peur qu'elle arrête de jouer si elle apprenait qu'il l'écoutait en cachette. Je décide donc de ne rien dire.

Ma Prison DoréeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant