XVII

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- Tu peux me menacer autant de fois que tu le souhaites, cela ne me fera pas parler pour autant.

J'observe les yeux marron de mon père, si semblables aux miens et grogne d'exaspération. Il ne cédera pas, il ne me dira rien et ça me rend folle de rage. Je décide donc de le prendre par les sentiments. Je me rapproche de lui et fais ma petite tête de bébé qui consiste à faire de petits yeux et à prendre une moue boudeuse.

- Papa ours...

- Hailey, s'il te plaît, s'impatiente ma mère.

Mon père soupire avant de prendre place sur le canapé moelleux.

- Des chasseurs. Ce sont des chasseurs qui ont fait ça à ton âme-soeur. Cela explique aussi tes douleurs. Le Bêta de Daniel nous a expliqué que tu avais souvent mal au ventre.

Je baisse la tête, honteuse. Pendant que j'étais tranquillement en train de me préparer à intégrer une nouvelle meute, mon âme-soeur se faisait torturer. Je sais que c'est de sa faute à lui si je n'étais pas à ses côtés à ce moment-là, mais je ne peux m'empêcher de me sentir coupable.

- Où l'as-tu trouvé, alors ? Je souffle.

J'ai l'impression qu'un poids immense se pose sur mes épaules.

- Hum... Dans la forêt. Ils l'ont laissé pour mort. Heureusement que je passais par là avec Jacob, sinon il ne serait peut-être plus de ce monde.

Oui, le loup solitaire a eu énormément de chance. J'enlace mon père. Ses énormes bras m'entourent avec force, son odeur réconfortante m'apaise, je me sens comme lorsque j'étais petite fille et que je faisais des cauchemars. Au fond de moi, je savais qu'il était le seul à pouvoir éloigner les démons qui assombrissaient mes rêves.

- Merci de l'avoir ramené.

Je le sens tendu, mais je suis si heureuse que mon loup solitaire soit ici à mes côtés, que je n'y fais pas attention. Je me détache enfin de lui et lui adresse un sourire auquel il répond.

- J'y retourne, j'annonce. Il ne va pas bien.

- Lacey est en train de le soigner. Enfin, je pense qu'elle couvre juste les blessures pour qu'elles ne soient pas à l'air libre et cicatrisent plus vite.

Je hoche la tête en essayant de repousser la jalousie qui s'empare de moi. Je ne cesse de répéter ces mots : Lacey est médecin, elle a une âme-soeur. Pour tout avouer, ça ne marche qu'à moitié. Je m'empresse de monter dans ma chambre et lorsque j'arrive sur le pas de la porte, Lacey est sur le point de sortir. Elle se fige en m'apercevant.

- Hailey, tu es là. Je ne peux pas faire grand chose dans son état. Il faut seulement patienter.

- Je sais.

Mon ton froid la laisse perplexe. Nous continuons à nous fixer pendant quelques secondes sans un mot avant qu'elle ne se racle la gorge et m'annonce qu'elle doit y aller. Je la laisse partir en la suivant du regard.

Je suis désolée, c'est de ma faute, m'annonce ma louve.

Les loups sont extrêmement possessifs entre eux. Sachant que cette fille était proche de mon loup solitaire, ça nous a rendues folles, ma louve et moi. Je secoue la tête et entre dans ma chambre. Le soulagement que j'éprouve lorsque je le vois, toujours allongé sur mon lit, est tout bonnement ridicule. Où aurait-il pu aller dans cet état, d'ailleurs ?

Je m'approche sans un mot et effleure le bandage qui recouvre son torse. Sa respiration lente et son visage moins crispé m'indiquent qu'il guérit rapidement. Il transpire toujours autant, je reprends donc la serviette beige et essuie son visage. Je m'attaque à son cou et je remarque alors une fine chaîne, trop féminine pour lui.

Ce collier appartient à une femme. Cette révélation me fait l'effet d'un coup de poing dans le ventre. Ma respiration se bloque dans ma gorge et mes yeux s'humidifient. Ok, Hailey, respire, c'est peut-être à sa mère ou à sa soeur.

- Ou à sa petite-amie, intervient ma louve.

Je lui somme de se taire par la pensée, elle ne m'aide vraiment pas à retrouver mon calme. Je me concentre sur ses émotions et je me rends compte qu'elle est aussi sur les nerfs que moi. Les mots "petite-amie" tournent en boucle dans ma tête, lacérants mon coeur et embrouillants mon esprit qui n'est à présent que colère et tristesse.

Enlève-lui cette immonde chose ! S'énerve ma louve.

Suivant ses ordres, j'attrape la fine chaîne. Je sens un poids à l'autre bout, sous sa nuque. Tiens, c'est étrange. Je fronce les sourcils et défaits le collier en prenant soin de ne pas le casser. Peu importe à quel point je suis énervée, je tiens à ma vie. Je lâche un petit cri de surprise en même temps que la pierre de lune éclaire mes yeux ahuris.

- C'est à moi, je souffle.

Oui, c'est ma pierre de lune. Celle que ma mère m'a offerte le jour de mes vingt ans. Mon Dieu ! Je n'ai même pas remarqué que je l'avais perdue. Je me sens si bête et immature. Comment ai-je pu perdre un bijou d'une si grande valeur aussi rapidement et sans m'en rendre compte par-dessus le marché ? Et puis, où l'a-t-il eu ? Depuis quand l'a-t-il ? Et surtout, pourquoi l'a-t-il gardé ?

Toutes ces questions tournent dans mon esprit, si bien que je ne remarque pas que le loup solitaire s'est réveillé et m'observe sans un mot. Mes yeux sont fascinés par cette pierre qui luit, éclairant mon visage d'une lueur blanche, comme celle d'un téléphone portable. Puis je me souviens des paroles de l'amie d'Eva.

Si ces pierres luisent, c'est uniquement en présence de son âme-soeur. Une douce chaleur se diffuse dans mon ventre, phénomène de bonheur dû à cette révélation. Tant que cette pierre sera en contact avec ma peau, elle ne brillera que pour lui, mon loup solitaire.

La chaleur de mon ventre se déplace jusqu'à mon bras où elle se fait plus pressante. Sans détacher mes yeux de cette pierre magique, je pose ma main sur l'endroit où la chaleur devient presque insupportable, mais au lieu de rencontrer mon bras, c'est une main rugueuse que je touche. Surprise, je relève les yeux et rencontre deux pupilles bleu océan qui me fixent avec une curiosité non dissimulée.

- Toi, souffle le loup solitaire de sa voix grave. 

Lone Wolf (Tome 1 & 2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant