Lone Wolf (Tome 1 & 2)

XXVII

De nous deux, ma louve a toujours été la plus sadique, la plus calculatrice. Et bien souvent, mon "innocence" comme elle se plaît tant à le dire, la rendait folle. J'ai vécu dans une famille et une meute aimante. Mes parents sont de bons chefs de meute et j'ai été élevé dans un environnement éloigné de la folie de ce monde.

Cependant, au fil des années, je me suis réveillée. J'ai commencé à écouter plus attentivement ma louve, jusqu'à arriver dans la parfaite symbiose tant recherchée de tous les lycanthropes. Cet état qui nous permet de lâcher prise et de ne plus enchaîner la bête dans notre esprit. Ma louve peut prendre possession de mon corps et mon esprit à tout moment sans que je ne puisse l'en empêcher. Et je ne le ferais pas, car lorsqu'elle le fera, je serais parfaitement consentante.

Cette fois, le fil de mes pensées impressionne ma partie animale. Lorsque nous arrivons enfin au manoir, je me dirige sans hésitation à l'étage. J'ai besoin de réfléchir à mon plan. Ma louve approuve et m'assure qu'elle va m'aider. Alors que j'entre dans la chambre poussiéreuse, un sourire sadique de psychopathe naquit sur mes lèvres.

La pénombre m'effraie un peu, je me dirige donc vers les lourds rideaux avant de les séparer d'un geste sec. La lune éclaire la pièce à présent et je m'autorise à souffler. J'inspecte ensuite la pièce et grimace en voyant l'état pitoyable dans lequel je me trouve. Comment Kyle peut-il vivre dans un tel endroit ?

J'ai l'impression que c'est une maison abandonnée. Elle ferait un bon décor pour un film d'horreur. Il règne en ces lieux une ambiance particulière, comme s'il y a des fantômes qui hantent le manoir. Je frissonne et croise les bras sous ma poitrine. La poussière installée depuis longtemps me fait éternuer bruyamment et je peste contre le monde entier.

- Je viens rarement ici.

La voix grave de mon âme-soeur me fait sursauter. Je me retourne et observe son visage fermé. Ses yeux me fixent d'une drôle de façon.

- Pourquoi ? Je souffle.

Kyle s'avance jusqu'à me laisser qu'un seul mètre entre nos deux corps. Un mètre dont la distance me paraît insupportable.

- Cet endroit me rappelle de trop mauvais souvenirs.

Sa voix descend tellement dans les graves que mon corps en vibre de plaisir. Seigneur, comment vais-je faire pour m'en sortir si je réagis de la sorte à chacune de ses paroles ?

- Alors pourquoi m'avoir amené ici, si tu n'aimes pas être là ?

Ses pupilles deviennent un peu plus brillantes, signe que son loup veut prendre le contrôle. Kyle prend une grande inspiration et ses yeux reprennent leur couleur d'origine.

- Tu préférerais être dehors ?

Un sourire sans joie naquit sur ses lèvres.

- Ça serait drôle, hein ? Il continue. La princesse qui vit comme une louve solitaire.

Sa remarque me transperce de toutes part. Car même s'il n'y a pas de venin dans sa voix, je sais que c'est ce qu'il pense de moi. Et le pire dans tout ça, c'est que je m'en veux que ces paroles m'atteignent comme ça. Je ravale mes larmes et lui lance un regard noir.

- La princesse a une requête.

Il mime une révérence qui me fait grincer des dents.

- Que puis-je pour vous, votre Altesse ?

Je lève les yeux au ciel avant d'envoyer une pichenette dans une boule de poussière qui trône sur la table à ma gauche.

- Je veux travailler. Dans ton club.

Un sourire amusé traverse son visage.

- Hors de question.

Ma louve souffle dans mon esprit et je lui intime de se calmer.

- Pourquoi ?

- Parce que mon club, c'est mon havre de paix et j'aime le fait que tu n'y sois pas.

Je plisse les yeux, incertaine. Je ne sais pas si ses paroles ont été prononcées pour me blesser ou non. Puis, sans que je m'y attende, ma louve me pousse dans un coin de mon esprit et parle en mon nom.

- Tu sais quoi ? s'agace ma propre voix. Je te propose un marché. Un mois. Si au bout d'un mois, ma présence t'est toujours autant insupportable, alors je te rejetterai.

Quoi ? Je hurle et l'écho de ma voix résonne dans mon crâne.

Ma louve toise Kyle, attendant son approbation qui, pour mon plus grand malheur, ne tarde pas à arriver. Il penche la tête et avec son regard froid à faire pâlir la mort, il scelle le pacte.

- Un mois.

Mon coeur se brise en mille morceaux et les tentatives de ma louve pour me rassurer sont vaines. Car je sais au fond de moi qu'elle vient de nous condamner. Mon temps à ses côtés est à présent compté.

Elle me rend le contrôle de mon propre corps. Je brûle de lui dire que je ne suis pas du tout d'accord avec elle. Mais aucun mot ne sort de ma bouche, alors je reste là à le fixer comme une ahurie, tremblante de peur et de rage.

- Tu commences demain, annonce-t-il sans exprimer la moindre émotion.

J'expire longuement pour me calmer, mais ma gorge se serre. J'ai envie de hurler contre ma louve, contre Kyle, contre le monde entier.

- Tu viens ? Il y a une chambre qui a été préparée pour toi.

Si je n'étais pas autant au bord de la crise de nerf, j'aurais trouvé sa marque d'attention attendrissante. Je le suis sans un mot à l'autre bout du couloir, raide comme un piquet. Lorsque j'entre dans la pièce, j'en reste bouche bée. Effectivement, elle a bien été préparée.

Plus un grain de poussière, un lit immense qui m'a l'air bien confortable avec sa tonne de coussins moelleux aux couleurs claires. Les murs parés de lattes sombres donnent un côté chaleureux à la chambre et je n'ai qu'une envie : me jeter sur le lit et me blottir dans les couvertures épaisses pour toujours.

Une grande armoire attend avec impatience d'être remplie par mes vêtements se trouvant toujours dans ma valise posée juste devant. Les rideaux transparents se mouvent au rythme de la légère brise. Je m'approche de la fenêtre et un gémissement appréciateur m'échappe face à la vue magnifique dont je dispose. La forêt s'étale à perte de vue et le soleil couchant diffuse une faible lueur orangée.

Je perçois un mouvement dans mon dos et je m'arrache à cette vue idyllique avant de poser mes yeux sur une vision tout aussi intéressante. Kyle semble attendre quelque chose.

- Ça te plaît ?

Sa question me choque, car depuis que je le connais, il n'a jamais prêté attention à ce que je pouvais ressentir.

- Oui, c'est très... bien, je souffle.

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I'M BACK !!