Lone Wolf (Tome 1 & 2)

XXVIII

Inspirer, expirer. Répéter l'opération jusqu'à ce que mon coeur cesse de tambouriner dans ma poitrine. Kyle m'a bien eu sur ce coup-là, le salaud ! Je ressemble à une prostituée, nom de Dieu, si mon père me voyait ! Il égorgerait Kyle sans chercher à comprendre. Une idée qui plaît grandement à ma louve. Franchement, la matière en simili cuir qui me colle à la peau cache seulement mon intimitée.

Tu n'as pas intérêt à avoir un poil qui dépasse, soulève ma louve.

Je lève les yeux au ciel sans prendre la peine de lui répondre. J'attrape la couture de la mini-jupe et la tire vers le bas pour la énième fois, sans grand succès. Amber, la plus ancienne des serveuses pousse un soupir de résignation avant de marmonner dans sa barbe :

- Mais qu'est-ce qui lui a pris ?

Mon ouïe fine capte ses paroles et je me sens agacée. Je cesse de me tortiller dans tous les sens et attrape le plateau qu'elle me tend. Je prie intérieurement pour ne pas tomber, car je n'ai pas l'habitude de me déplacer sur des échasses pareilles.

- Des escarpins plateforme de 14 centimètres, s'était offusqué Amber.

Des instruments de torture, si vous voulez mon avis. Je m'applique donc à mettre un pas devant l'autre et à ignorer l'ombre bizarre que projettent les faux cils sur ma vue. Les lumières de la boite clignotent et de nombreuses personnes se trémoussent les unes contre les autres. Je fais abstraction de l'odeur de désir qu'ils dégagent avant de me concentrer sur les tables remplies qui n'attendent plus qu'à être servies.

Je repère un groupe d'hommes qui semblent chercher un bon morceau de viande à se mettre sous la dent. Je m'approche de la table, plaque un sourire factice et leur demande ce qui leur ferait plaisir. Première erreur. L'un des gars me toise, un petit sourire en coin avant de reluquer mes seins.

- Ah, si tu savais chérie... J'ai bien envis de te...

- Bière ? Vodka ? Tequila ?

L'homme secoue la tête en rigolant. Ses cheveux coupés ras laissent apparaître son crâne luisant de transpiration.

- Je veux la chambre royale.

Ses yeux gris me fixent, s'attendant sûrement à une réaction de ma part, mais je ne sais absolument pas de quoi il parle.

- Je te paierais double, promis.

Je plisse les yeux, pas rassurée pour un sou, avant de partir à la recherche d'Amber. Je la trouve au bar, attendant que le barman remplisse son plateau. Je l'attrape par le bras.

- C'est quoi "la chambre royale" ? J'attaque.

Ses yeux s'ouvrent en grand avant qu'elle n'agrippe mes bras, les griffants à cause de ses faux ongles manucurés.

- Qui la veut ?

Sa voix est montée dans les aigus. J'hume discrètement son odeur et découvre qu'elle est ravie, voir même surexcitée.

- Le type de la 104. Le brun. Pourquoi il m'a dit qu'il me paierait double ? C'est une spécialité d'ici ?

Elle éclate de rire avant de me tapoter l'épaule.

- Ah, Hailey, tu es très drôle ! Kyle ne t'en a pas parlé ? Pourtant quand tu as passé ton entretien d'embauche, il a bien "testé" tes compétences, non ? Il le fait avec toutes ses nouvelles employées, pour voir si elles sont assez bien pour les extras.

J'ai de plus en plus peur de ce qu'elle va m'annoncer.

- Et c'est quoi ces "extras" ?

- Coucher avec les clients, voyons ! Kyle ne touche que 50% du fric qu'on te donne pour ça. T'as lu ton contrat de travail ? C'est écrit noir sur blanc.

- On... se prostitue ?

Ma voix tremblante l'interpelle, car son expression se durcit.

- Je sais que ce n'est pas très légal. Je ne sais pas comment il fait pour ne pas avoir de problèmes avec la justice, d'ailleurs. Mais tant que je peux gagner un peu plus de fric, je dis pas non.

J'écoute à peine ce qu'elle dit, tant l'horreur de ses paroles me glace sur place. Kyle a couché avec toutes les employées de ce club. Oh. Mon. Dieu.

Je vais, premièrement l'étriper. Ensuite, lui couper la queue. Et pour finir, immoler toutes les filles qui ont eu l'audace de le toucher et de le voir nu.

Ma louve est dans une rage folle, mais s'imagine que je ne vais pas le remarquer en adoptant un ton neutre. Je tente de la calmer, en vain. Je bloque comme je peux l'accès à mon esprit, ne voulant en aucun cas qu'elle prenne le contrôle de mon corps. Cela se terminerait en boucherie.

- Hum... Est-ce que ça te dérange si je prends ta place pour la chambre royale ? Ce mois-ci, c'est un peu tendu niveau fric et j'en ai vraiment besoin.

J'accepte sans hésiter, sous le choc qu'elle puisse croire que je sois capable de faire une chose pareille. Je la regarde s'éloigner avant de tourner les talons et entrer dans le bureau de Kyle sans frapper.

Il ne sursaute pas lorsque la porte claque contre le mur avec force. Il ne relève même pas la tête, faisant mine d'être concentré sur les papiers éparpillés devant lui. Ma respiration saccadée à cause de l'afflux d'adrénaline est le seul bruit dans la pièce. J'avance, ferme la porte et pose mes deux mains sur le bureau en bois sombre. Avec un soupir, il lève les yeux et me fixe de son regard perçant.

- Que puis-je faire pour toi ?

- Tu baises avec toutes tes serveuses ? C'est quoi ce bordel ?

Il ferme les yeux un instant avant d'affronter mon regard. Il se lève ensuite, me plombe de toute sa hauteur, m'obligeant à lever la tête si je ne veux pas couper le contact visuel.

- En quoi est-ce que ça te regarde ?

Sa voix grave résonne jusqu'au tréfonds de mon âme. J'avale ma salive avant de lui lancer un regard noir. Je me relève, fais le tour du bureau avant de me planter à quelques centimètres de lui. Il me suit des yeux et paraît amusé de mon petit manège.

- Je suis ta compagne, alors tout ce que tu fais dans le but de me blesser me regarde.

Ses yeux prennent une teinte plus prononcée, sûrement pour m'intimider, mais ça ne marche pas, bien au contraire. Je sens ma louve vouloir prendre le contrôle afin de lui sauter dessus et de le mordre, le griffer, lui faire comprendre que ce qu'il fait la rend folle, mais je la contiens un peu.

- Je t'interdis de toucher une femme pendant ce mois.

Un grognement sort de sa poitrine, me faisant frissonner, puis sans que je m'y attende, cette grosse brute se jette sur moi, m'arrachant un cri de surprise, avant d'écraser avec violence ses lèvres contre les miennes.   

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Oui, je termine ce chapitre sur ça ! À l'année prochaine !