Chapitre Deux, Et les métamorphoses

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***

Léné avait mal.

Il était alité depuis plus d'un mois mais le feu de ses blessures le réveillait encore en sursaut au milieu de rêves déments.

Il patientait. Recouvrant peu à peu l'usage de son corps, apercevant enfin le bout d'un tunnel de souffrance. Un boyau sombre, froid, infini, peuplé de ses plaintes maladives.

« Petit chat... »

Il n'avait pensé qu'à elle. À ses grands yeux vairons, à sa chevelure ébouriffée, à son visage doux, à son sourire sincère. À ses baisers.

En près de deux cents ans, il n'avait jamais ressenti ça.

Jamais.

Dans son esprit, les yeux d'Annabelle pétillèrent et sa main, paume ouverte, se tendit vers lui. Il la prit et plaqua la jeune femme contre lui.

Sa peau abricotée, sa gorge fine et palpitante.

Son estomac grondant lui rappela qu'il n'avait pas été nourri depuis des semaines. Mhùron avait refusé, sachant que sa guérison en aurait été accélérée. Son seigneur savait infiniment bien prolonger un calvaire.

Ses prunelles fixées sur la fenêtre à barreaux de sa chambre, il serra les mâchoires, jugulant cette douleur sauvage qui s'ajoutait à celle - lancinante - de son corps convalescent.

Sa peau était glacée, presque grise, ses prunelles sanglantes et ses traits émaciés au point qu'il ressemblait à une gargouille grimaçante. Ses canines, allongées, par le manque, refusaient désormais de se rétracter.

Las, il repoussa le drap qui le recouvrait et se retourna sur son fin matelas. Deux grands yeux d'un brun rougeoyant le fixaient avec curiosité.

Et malgré lui, Léné eut un mouvement de recul.

— Diya... que... ?

Un fin sourire en coin étira les lèvres pleines d'une somptueuse vampire à la svelte silhouette, mais aux atouts généreux. Elle décroisa ses jambes gainées de velours bordeaux et se pencha en avant, dévoilant la rondeur de sa poitrine.

— Si je ne te connaissais pas si bien, Léné, commença-t-elle d'une voix grave et veloutée, je dirais que tu n'es pas heureux de me voir.

La vampire était assise sur un tabouret posé à la tête du lit, ses yeux flamboyants fixés sur Léné.

Il se redressa sur sa couche avec une grimace de douleur. Que Diya puisse assister au lamentable spectacle de sa faiblesse, ne jouait pas en sa faveur et donnait un avantage certain à la vampire, mais il n'avait pu la réprimer. Ses mouvements étaient encore douloureux.

Une fois trouvée la position idéale, il la fixa à son tour. Elle ne s'était pas départie de son sourire et attendait visiblement qu'il prenne la parole.

Dans un soupir, il capitula :

— Que fais-tu là ?

Elle haussa un sourcil, surprise par son ton cassant, et croisa les bras.

— Je veille sur toi depuis des jours, figure-toi. Et je n'ai avalé personne depuis une semaine afin de garder ton chevet. Un peu de reconnaissance serait la bienvenue.

Léné ne dit rien, se contentant de l'observer, ne sachant comment réagir. La vampire était un soldat. Un des meilleurs. Et son supérieur hiérarchique. S'il la froissait, il risquait de passer un nouveau mois alité. Ou de tout simplement passer l'arme à gauche.

La PIERRE de SANG tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant