Chapitre 18 (réécrit)

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Média : Camille

Nous nous observons pendant un instant sans que ni lui ni moi n'ose dire quoi que ce soit. Il paraît gêné par ce qu'il vient de dire, en même temps il y a de quoi. Quant à moi, je ne sais pas ce qui me choque le plus concernant ce qui vient d'être dit.  Est-ce que c'est le fait qu'il m'ait enfin appelé par mon diminutif qui m'étonne tellement ou plutôt ce qu'il a sous-entendu par après ? Quoi qu'il en soit, même si cela pourrait me faire du bien de me changer les idées, je ne relève pas au risque de créer une situation délicate.

- Bon eh bien, faites comme chez vous, soufflais-je.

- Tu as faim ? Je peux-

- Non pas du tout, j'ai plutôt envie de vomir, je ne me sens pas mesure d'avaler quelque chose.

- Tu n'as rien mangé depuis ce midi.

- Vous avez entendu ce que je viens de vous dire ?

Je pars m'asseoir dans le canapé, mon professeur sur mes pas.

- Ce qu'a dit ton père, hésite-t-il, c'était simplement une menace ou tu comptes faire ce qu'il te dit ?

- Non il vaut mieux que j'aille habiter chez les filles quelques temps, le temps que les choses se calment et quand je lui aurais expliqué que ce n'était pas ma faute, je pense que tout rentrera dans l'ordre.

- Pourquoi est-ce qu'il a insinué que ce serait encore de ta faute ?

- Vous rappelez quand je vous ai parlé de ma naissance ? Mon père s'est mis en tête que si j'étais née après mon frère ou si ma mère n'avait tout simplement pas été enceinte de moi, rien de tout cela ne serait arrivé.

- Mais toi tu es consciente que c'est faux, n'est-ce pas ?

- Oui, enfin je ne me suis jamais vraiment attardée sur la question, à quoi bon ? Mais avec du recul, il n'a peut-être pas tort, enfin on ne le saura jamais.

Avant même qu'il ne dise quelque chose, je le coupe.

- Vous savez quoi ? Je crois que j'ai faim ou soif, je vais aller faire un tour dans la cuisine.

Je me lève pour aller dans la cuisine et encore une fois, il me suit.

- Il a toujours été violent avec toi ?

- Non, son premier accès de violence envers moi date de la rentrée, mais il a un problème avec l'alcool depuis ma naissance. Avant qu'il ne se mette aux violences physiques, il lui arrivait de péter des plombs en éclatant des bouteilles ou de la vaisselle.

- Combien de fois est-ce qu'il t'a touché ?

- Quatre ou cinq fois si l'on compte l'épisode de l'hôpital.

- Tu n'as jamais pensé à en parler à quelqu'un ?

- Pour faire quoi ? Hein ? m'écriais-je.

Je commence à péter les plombs dans cette maison, d'autant plus qu'il ne fait que me poser des questions sur ma vie, pour quoi faire ? Me sortir d'ici quelques semaines que ça n'a servi à rien car il s'en foutait royalement ? Je préfère encore rester seule que de me livrer à cette gueule d'ange avec son air arrogant insupportable.

- Je suis encore mineure, si j'en parle à qui que ce soit, je risquerais d'être placée en famille d'accueil et même si ce n'est que trois mois, c'est trois mois que je peux encore passer ici à le supporter.

Isaac m'aurait dit qu'on pouvait trouver une solution à deux, il trouvait toujours des solutions. Je ne sais pas comment je vais faire sans lui, depuis toute petite je comptais sur lui pour me soutenir, il était mon pilier et je n'ai pas su le remercier comme il le méritait. Je regrette tellement de ne pas lui avoir assez montré ce qu'il représentait pour moi, c'était mon modèle dans la vie de tous les jours. Je ne suis rien sans lui.

M. Korsanov Où les histoires vivent. Découvrez maintenant