Chapitre dix-sept

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Evidemment, c'était au moment le plus crucial du plan que l'incertitude l'assaillait. Impossible de rester concentré, de se focaliser sur son objectif, alors que les doutes lui ensserraient les entrailles et l'empêchaient de respirer convenablement. Et si Potter se rendait compte de tout ? Qu'est-ce qu'il allait bien pouvoir lui dire ? Et s'il craquait devant lui ? Et si Potty évoquait le soir du bal ? S'il voulait lui parler de Ginny ? S'il avait envie de le frapper ? Si, au contraire, il se montrait trop gentil ? Et s'il parlait de la nuit en haut de la tour d'astronomie ? Comment allait-il résister ? Comment allait-il tenir devant lui ? Comment allait-il pouvoir se comporter normalement ? Comment était-ce possible ? Draco marchait, plus lentement qu'à son habitude, dans les couloirs du château. C'était dimanche. Il faisait beau dehors. Le soleil faisait briller les cristaux de glace comme des diamants, et le manteau de neige répandu dans le parc était plus éclatant que jamais. Il savait où se trouvait le Gryffondor. Et chaque pas qui le rapprochait de lui semblait infranchissable. Chaque pas était une épreuve. Il avait l'impression d'étouffer.

Il s'arrêta. S'adossa contre un mur, et glissa jusqu'au sol, le cœur battant. Il était trop faible. Trop faible pour le confronter. Il n'aurait pas à discuter longtemps, bien-sûr. El agirait au plus vite, il le savait. Mais rien que d'imaginer cette conversation, il ne souhaitait qu'une chose : retourner se terrer au fond de son lit pour les cent prochaines années, telle la Belle au bois Dormant, dans le conte moldu. Sauf qu'il n'était malheureusement pas une princesse, et qu'il avait passé ses seize ans.

Draco posa sa tête sur ses genoux quelques instants. Il se força à prendre de grandes respirations. Calme-toi, calme-toi. Tout allait bien se passer. Il n'aurait qu'à dire quelque chose de totalement banal et ennuyant, dans le style « salut comment tu vas ? », sans rien évoquer de compromettant. Ce n'était rien, rien du tout. Il pouvait le faire. Et si tu t'effondres ?

- Je ne m'effondrerai pas, murmura-t-il.

Il se releva à l'aide de ses mains, tout en continuant de respirer calmement. Calmement. Il en était capable. De toute façon, il n'avait pas vraiment le choix. Il fallait qu'il sache. Il fallait qu'il capture cette foutue odeur. Il fallait qu'il ait une preuve. Et après ? Après. Qu'est-ce qu'il allait faire, après ? Il se donna une petite tape sur le crâne, en se rabrouant lui-même.

- Pas le moment de se poser cette question, dit-il à voix haute.

- A qui tu parles ?

La voix le glaça instantanément ; comme un vent d'hiver parcourant ses veines. Il aurait dû s'en douter. Draco n'avait même pas eu à le retrouver, Potter était venu à lui. Génial. Le karma ne le lâcherait visiblement jamais. Le Serpentard fit volte-face, aussi naturellement que possible – ce qui n'était pas aisé – et essaya d'esquisser un sourire de circonstance, tant bien que mal. Harry ne devait pas être là. Ils devaient se trouver à un endroit où El aurait pu l'atteindre ; mais El n'était pas là. Parce que ce n'était pas ce qui était prévu. Si j'avais perdu moins de temps à douter comme un con, j'aurais pu être à temps dans le parc... Mais voilà, il avait perdu du temps, et Potty n'était plus dans le parc. Non, il était juste en face de lui. Et Draco n'avait aucune idée de quoi faire. Il devait l'emmener à un endroit où El se trouvait, pour qu'elle puisse jeter le sort. Mais, bon sang, où était-elle ? La jeune rousse avait bien dû remarquer que quelque chose n'allait pas, non ?

- Hum, à personne, bafouilla-t-il, enfin, à moi-même quoi, je, enfin, tu vois.

Le Gryffondor haussa un sourcil, sceptique. Puis, au bout de deux ou trois secondes, il lui rendit son sourire. Et quel sourire, pensa Draco. Surtout, ne pas défaillir, ni rougir, ceci n'était pas une comédie romantique à l'eau de rose.

Un jourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant