Chapitre vingt-sept

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La voix d'Harry Potter sonnait curieusement. On aurait dit du papier froissé. Ou alors le bruit d'une feuille morte qui se désagrège sous les doigts. Draco avait le cerveau vide, et aucune idée de quoi répondre. C'est Hermione qui vint à sa rescousse.

- Oui, Harry, expliqua-t-elle. C'est moi qui ai voulu qu'il soit là. Il est le seul à ne pas avoir été ensorcelé. Ne t'énerve pas, fit-elle précipitamment, mais j'ai pensé que ce qu'il avait à dire pouvait être... utile.

Le blond voyait bien qu'elle ne disait pas toute la vérité. Comme si elle préférait taire la vraie raison pour laquelle elle était venue le chercher. Les prunelles émeraude de Potter passaient de toute vitesse de son amie à Draco, comme s'il cherchait à savoir s'ils se moquaient de lui ou pas. Il n'avait pas l'air énervé, mais désemparé. Fatigué surtout. Draco comprenait, il l'était également. Il prenait sur lui pour tenir debout et ne pas laisser transparaître son état d'éreintement. Au bout de presque une minute entière de dévisagement, Potter haussa vaguement les épaules, comme s'il acceptait l'étrangeté de la situation.

- Puisque tu as vu ce qu'il s'était passé Malfoy, tu pourrais peut-être éclairer ma lanterne, dit-il. J'étais trop occupé à rester accroché à mon balai pour voir ce qui arrivait en bas.

A pas lents, presque réticents, le blond traversa la pièce – le trajet lui parut interminable, avec le regard fixe de Potter vissé sur lui, qui le brûlait comme une flamme vive. Il resta planté là, juste à côté du lit, près de Granger – parce qu'aller du côté de Weasley relevait d'un niveau supérieur dans le malaise – ce qui était très gênant, mais il n'avait pas vraiment le choix puisqu'il n'y avait pas de chaise à disposition. C'était soit être sur ses deux jambes, soit s'asseoir par terre. Ou alors se poser à même le lit, et ça, jamais de la vie.

En faisant son maximum pour ne pas avoir l'air totalement dingue, mais en tentant toutefois de relater un nombre important de détails, il réexpliqua comment les gens s'étaient gelés tout autour de lui, l'arrivée de la silhouette, leur brève discussion. Rien de tout cela ne paraissait réel. Malgré tout, aucun d'eux ne remit en cause son discours. Granger fronçait les sourcils si fort qu'ils ne formaient qu'un grand trait barrant le haut de sa figure – c'était le mode « réflexion-intensive ». Weasley, quant à lui, n'avait pas l'air de réfléchir à grand-chose, si ce n'était l'aspect inédit de ses pieds, puisqu'il était en pleine contemplation de ces derniers. Harry Potter, le centre de tout, ne lâchait plus Draco des yeux, ce qui était, bien-entendu, très problématique.

- Nous devons absolument entreprendre des recherches pour savoir qui se cache derrière cet être mystérieux, Harry ! s'exclama la Gryffondor soudainement, prise d'un enthousiasme débordant face à la perspective de nouvelles choses à apprendre.

Celui-ci acquiesça nonchalamment, comme si cela ne le touchait pas de près. Il reporta son regard sur la brune à la chevelure inclassable et lui adressa un mince sourire rassurant.

- Ouais, bien-sûr Hermione, il faudra chercher. Pour l'instant, je t'avoue que je suis un peu assommé...

- Oh ! s'écria-t-elle. Evidemment, pas maintenant ! Enfin, ce n'est pas ce que je voulais dire, je sais bien que... Enfin, oui, on va te laisser, tu dois te reposer, et Ron et moi on va rentrer... (Ses yeux dérivèrent sur Draco qui se tenait comme une statue antique à un mètre d'elle) Oh ! et tu... Draco, oui, on va repartir tous ensemble.

Elle encercla Harry de ses deux bras avec vigueur, lui souhaitant un prompt rétablissement, puis se releva, et prit Ron Weasley par la main, l'entrainant vers la sortie. Draco allait leur emboîter le pas, lorsque Potter reprit la parole.

- Malfoy ? Tu peux rester un instant, s'il-te-plait ? J'ai quelques mots à te dire.

Weasley allait protester, mais Granger lui donna une claque sur le bras – apparemment douloureuse, puisque le roux grimaça. Draco demeura stoïque pendant qu'ils sortaient, comme attendant que la sentence fatale s'abatte sur lui. Puis, il se retourna, à deux à l'heure – peut-être que s'il retardait le plus longtemps possible le moment fatidique, celui-ci serait moins douloureux. Il vacilla lorsque ses yeux croisèrent les deux émeraudes qui étincelaient dans la semi-obscurité comme deux étoiles vertes. Le vacarme sous son crâne était tel qu'il ne percevait plus aucun son. Serrant les poings, il força les mots à sortir de sa gorge.

Un jourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant