4.

302 78 9
                                    

 C'était son dernier jour dans cette école. Dernier jour... Quelques années auparavant, lorsqu'Amélia pensait à son dernier jour d'école, elle l'imaginait comme dans un film. Elle se serait vêtue d'une jolie robe, aurait rigolé avec ses nombreux amis, à l'obtention de son diplôme, aurait versé quelques larmes, et partirait rejoindre son petit-ami, gentil et attentionné. Et finalement, se serait ruée dans les bras de ses parents, mêlant larmes de bonheur et cri de joie. Mais la réalité était toute autre. Elle allait juste changer d'école, et passer dans un internat. Elle n'avait pas d'amis. Plus de petit-ami. Et pour couronner le tout, avait perdu sa mère. Oui, la vie réservait des surprises. Amélia en était la preuve.

Elle avançait le long des couloirs déserts. Elle était en retard, mais cette fois-ci, c'était un retard voulu. Elle ne voulait pas voir la cohue d'élèves courant et criant dans les couloirs. Ce n'était pas une sensation qui manquait. Elle vérifia son emploi du temps. Mathématiques. Satané filière S ! Elle avait l'impression d'avoir encore et toujours cette matière qu'elle détestait. Ce n'était pas elle qui avait choisis sa propre filière. C'est son père. Elle ne savait pas quoi faire, et voulait même arrêter l'école. Mais son père l'a forcée, et a choisit la filière S car il y avait beaucoup de débouchés. Si elle avait eu le choix, Amélia aurait choisit... Amélia aurait sans doute quitté l'école. Sans même se retourner une seconde. Mais elle aurait regrette son choix. Sa mère avait toujours voulu qu'elle fasse de longues études. Et si Amélia écoutait quelqu'un, c'était bien sa mère. Même elle n'était plus vivante. C'était une certaine façon pour elle de respecter ses dernières volontés, mais surtout de se sentir plus proche d'elle.

Arriver devant la salle de mathématiques, elle prit le temps d'inspirer profondément avant de toquer. Inspirer, expirer. Elle attendit quelques instants avant que le professeur vienne lui ouvrir. Lorsqu'il ouvrit la porte, il haussa un sourcil, l'air étonné, sa bouche s'ouvrit sur le coup de la surprise. C'est vrai que personne n'avait vu Amélia depuis un certain temps. Elle prit un air hautain, et avança dans la salle sans son autorisation. Elle s'en fichait complètement. Elle lui tendit son billet de retard avant de regarder la salle de classe, mais surtout les élèves. Tout le monde la regardait un crainte et un certain dégoût. Elle repéra une place seule au fond de la classe et s'y dirigea. Amélia déposa son sac sur le sol, et s'assit. Le professeur, désorienté la regarder s'installer, puis il se reprit en se raclant la gorge.

- Continuer à noter ce que je vous ai dit sur les fonctions canoniques.

Les élèves se retournèrent et suivirent l'instruction du professeur. Amélia poussa un soupir de soulagement, et tourna sa tête vers la fenêtre. La tête appuyé sur sa main, elle regardait les oiseaux qui migraient. Comme elle, d'ailleurs. Elle allait elle-même bientôt partir. C'était son dernier jour avant qu'elle parte dans un internat. Elle ne savait même pas pourquoi elle venait en cours, au lieu de s'amuser à une fête, ou même allait voir la tombe de sa mère. Elle avait pourtant promis qu'elle allait tenter tout ce qu'elle pouvait pour rester. Et elle n'avait même pas réussi. Plongée dans ses pensées, elle n'entendit pas la sonnerie, et les élèves s'en aller vers le cours suivant dans un joyeux bruit de fond. Elle leva la tête quand le professeur l'interpella.

- Le cours est fini mademoiselle.

Elle ne prit pas la peine de répondre, et se leva son air hautain toujours affiché au visage. Elle ne savait même pas pourquoi elle avait toujours cet air là. Une façon de se protéger ? Les gens se jugeaient en permanence. Mais le pire endroit restait le lycée, les rumeurs se colportaient sans discontinuer. Untel était sortit avec celui-ci, celle-là à briser le cœur de celui-là. "Tu es vraiment bien habillé aujourd'hui !" Et puis ça parlait dans le dos des gens. " Nan mais je rêve, regarde moi son t-shirt, elle l'a ramassé dans une poubelle ?" Il y avait une époque où elle essayer de suivre les ragots du mieux qu'elle pouvait. Et puis elle avait arrêté. On disait souvent que l'homme était fait pour vivre en groupe. Certainement pas Amélia. La solitude était sa meilleure amie. Le professeur, de plus en plus gêné, l'interpella. Il se grattait la nuque, regardant le sol.

AméliaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant