MAlice

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Je passe mon après-midi à bouquiner devant la verrière entrouverte, Louve à mes pieds. Adrián ne veut pas la laisser prendre ses aises à l'intérieur donc nous avons trouvés cette ruse pour être toutes les deux. Quant à son maître il est parti aider des amis et sa sœur planche dur.

Je relève le nez de mon bouquin seulement quand la porte s'ouvre.

– Sérieux ? Tu n'as pas bougé de l'aprèm ?

Je regarde mon hôte et constate que la nuit est tombée.

– 19h ? Déjà...

– Ouais, tu vas te tuer les yeux à lire sur son tél.

– Non ça va, mais c'est vrai que c'est petit quand même.

– Ouais. Il paraît que c'est ma sœur qui cuisine ce soir.

– Exact.

– Je crois qu'il va falloir il y allait sinon on court à l'indigestion.

– Tu exagères.

– A peine.

La sonnerie de mon portable retentit, un appel visio, Luvuma. Je fais signe à Adrián que j'en ai pas pour longtemps.

– Tikala malamu Lice ! (salut)

– Bien le bonjour Loulou.

– Oyali ? (Tu vas bien)

– Oui merci ça va et vous ? J'ai vu qu'il faisait jusqu'à moins dix-sept.

– Oui bien, c'est vrai que jeudi et vendredi c'était dur mais maintenant il fait moins frette (très froid) que le mois dernier.

– Tu veux dire moins dix ?!

– Non... Si ok, entre moins neuf et plus dix.

– Ah ! Alors si c'est juste moins neuf.

– Arrêtes de me charrier, c'est le pays de mon homme.

Un visage apparaît à l'écran, Logan, ah, quand on parle du loup.

– Allo ! (salut)

Son accent est amusant mais face à lui je n'en mènerai pas large.

– Salut !

– Que fais-tu cette fin de semaine ? demande-t-il.

– Je suis au calme chez des amis et toi comment fais-tu pour survivre à cette tempête ?

– Ne m'en parle pas à chaque fois que ma blonde (petite amie) t'appelle, je suis obligé de lui calmer le pompon (cesser d'être exagérément enthousiaste).

Un éclat de rire retentit dans la pièce, Adrián n'a pas pu se retenir. Rien qu'à voir leurs têtes j'ai bien compris que mes amis ont dû l'entendre.

– Adrián viens, vu que tu n'es pas discret, je vais te présenter.

Étonné il me fait les yeux ronds, je l'encourage de la main et le voilà sur le canapé.

– Luvuma, Logan, je vous présente Adrián mon ami qui fait partie d'une super fratrie complétée par trois sœurs.

– Adrián voici Luvuma et Logan, ma très chère amie et son adorable chéri.

– Bonjour.

– Enchantée Adrián, Allo ! répondent mes amis.

– Je m'excuse pour tout à l'heure mais je n'ai pas pu me retenir en entendant l'expression.

Loulou sourit et une lueur passe dans les yeux de Logan.

– Ah ! C'est moi qui suis désolé pour toi, vivre avec trois femmes !

Son rire caverneux entraîne Adrián. Logan se prend un coup par sa chérie. Il nous fait signe de la main par crainte qu'elle surenchérisse.

– Je vous laisse jaser (discuter), à tantôt (à plus tard) Adrián.

– A la prochaine.

Adrián se tourne vers moi puis vers mon mobile.

– Moi aussi je vais vous laisser. Je vais sauver le repas des mains de ma sœur. À ton prochain séjour en France.

– Avec plaisir Adrián.

Loulou attend quelque secondes avant de reparler, signe qu'elle préfère que nous soyons toutes les deux, c'est mauvais signe.

– C'est bon il a quitté la maison. précisai-je.

– Sérieusement Alice ?

– Qu'est-ce qu'il y a ?

– Mais tu es aveugle ou quoi ?

– Mais qu'est-ce que j'ai ?

– C'est un canon ! Tu le cachais !

Désarçonnée, je comprends seulement à l'instant qu'elle parle d'Adrián. Elle ne me laisse pas en placer une.

– Il est à tomber, il n'est pas juste beau il est aussi charmant avec son sourire et ses yeux !

– Arrêtes Loulou, tu me mets mal à l'aise. C'est le frère de mon amie et il est super comme ses sœurs mais je te rappelle qu'il a vingt-trois ans.

– Et alors ? Comment peux-tu dormir dans la même maison que lui sans y penser une seule fois.

Soudainement, je repense à notre proximité de ce matin.

– Ah tu vois ! Tu y as pensé, ton visage te trahit ma fille.

– Mais non justement, je repensais à ce matin où il m'a appris une dernière chorégraphie.

– Et ?!

– A certains moments j'ai été gênée.

– Gênée ? Pfff, le tango est la danse de la passion ma chérie, vingt ans ou trente, qu'est-ce que cela peut faire ? Vous êtes grands et tu débordes de sexe.

– Luvuma !

– Nan nan nan, tu feras pas taire ta grande sœur. Je l'ai senti quand je suis venu. Depuis la séparation, tu es redevenue attractive ma belle et ça, tu ne le vois même pas. Dois-je te rappeler que quelques années ce n'est rien pour l'amour ni même pour le désir ?

– Mais ça ne va pas ? Tu n'as pas fini oui ? Arrêtes. Bon oui il est craquant et doit attirer les filles comme du miel, mais loin de moi cette idée.

– Tu as tort.

– Non Loulou, Adrián c'est Adrián et moi c'est moi.

– Balivernes.

– Balivernes ou pas, je dois te quitter car j'ai peur que sans moi un combat ait lieu derrière les fourneaux.

– Oui c'est ça, défiles-toi. 

– Je t'embrasse Loulou.

– Leki, nalingi yo na motema moko (petite sœur, je t'aime de tout mon cœur), profite de la vie.

– Je t'aime aussi ma yaya (grande sœur, l'aînée), prenez soin de vous.

Nous raccrochons. En marchant vers la maison, je repense à la réaction de ma sœur de cœur et me rends compte d'une chose certaine... Elle est totalement... déséquilibrée.