CHAPITRE DIX-SEPT .3

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Elles quittèrent le pavillon pour reprendre leurs montures qui avaient été préparées et partirent au petit pas, sans croiser la moindre personne, Tranit nota que le carcan était déjà libéré et fronça les sourcils sans rien dire d'autre, Elles rejoignirent l'auberge, alors qu'Outre-berge s'activait pour une nouvelle journée de travail.

Dans la cour de l'auberge, il y avait beaucoup moins de cavaliers, une douzaine seulement, mais aussi deux gros chariots posés sur des cales de pierre et gardés par une vingtaine d'hommes en uniforme de hallebardiers.

Adacie montra le premier chariot.

— C'est l'armurerie mobile. En général, les officiers qui ne sont pas en service actif doivent y laisser leurs armes, les pistolets et les cartouches. L'autre, c'est le transport d'argent. Je dois passer à l'armurerie d'abord.

Apparemment, Adacie n'avait pas le choix parce qu'un officier semblait l'attendre de pied ferme. La jeune fille le salua.

— Mes respects, capitaine. Je n'ai pas eu l'occasion de rapporter mon arme hier soir.

— C'est ce que j'ai vu ce matin. Il est où ? Tu t'en es servie ?

— Non, capitaine. Adacie lui tendit la pochette contenant l'arme et ses munitions dont l'officier s'empara rapidement pour l'examiner.

— J'ai appris que tu avais eu une promotion ?

— C'est vrai, capitaine.

— Et à peine nommée à un poste de responsabilité tu commets la gaffe d'oublier de rendre une arme pour laquelle tant de gens seraient prêts à tout ! Mais qu'est-ce qui t'a traversé l'esprit ?

— Rien justement, capitaine. Lorsque notre seigneur m'a appelé et mise au service de Barcus Unité, je n'ai plus eu le temps de faire quoi que ce soit.

L'officier leva les yeux vers Adacie puis se tourna vers Tranit qui écoutait sans rien dire. Il fut un instant décontenancé.

— Je ne le savais pas. Tu lui as montré ?

— Expliqué seulement capitaine.

L'officier souffla et ses épaules s'affaissèrent, comme soulagé d'un poids.

— Bon, au moins tu n'es pas dans la panade comme Kilian ! Il a dû faire usage de son arme la nuit dernière, sur le chemin de Maubourguet. Lorsque le seigneur Benwan a vu ce qui se passait, il n'a pas cessé de le harceler.

Il a vidé son allocation de munition jusqu'au petit matin. Il est déjà passé m'en réclamer une nouvelle. Bon, passez voir le sénéchal à l'intérieur. Dès que les quartz seront à jour, revenez me voir.

— À vos ordres, capitaine.

L'officier se tourna vers Tranit qu'il salua de cette étrange façon qu'Adacie utilisait. Tranit lui rendit son salut sans rien dire et suivit sa lieutenante.

Elles laissèrent leurs dorkis dans la cour, sous la garde d'un carabinier et entrèrent dans l'auberge. Ce n'était plus comme hier un lieu d'amusement. Une douzaine de druides installés à des tables travaillaient sous le regard exigeant d'un vieil homme aux cheveux blancs, en tenue de chevalier.

Le silence régnait, les gens présents ne parlant qu'à voix basse. Adacie se tourna vers Tranit.

— Laissez-moi faire, commandant.

Elle laissa Tranit seule et s'approcha du chevalier qu'elle salua aussi respectueusement qu'elle avait salué Cydrac la veille.

Il y eut un bref échange et juste après Tranit se retrouvait assise devant un maître druide auquel elle tendait sa petite tablette de quartz pour qu'il y ajoute quelques informations et précisions.

Aux autres tables, des chevaliers répondaient aux questions des druides qui les inscrivaient sur ce papier, que Tranit avait vu Ilane utiliser.

Apparemment, tout le monde n'avait pas droit au quartz. Le sénéchal en personne vint remettre un de ces papiers à Tranit. Les conditions auxquelles elle pouvait enrôler ses volontaires, celles qu'Erwan lui avait annoncées la veille.

Il y eut encore quelques formalités dont Adacie s'occupa et les deux jeunes femmes se retrouvèrent une nouvelle fois dans la cour. Adacie fit embarquer leurs affaires qu'elles retrouveraient à leur campement et retournèrent devant le fourgon armurerie.

Le capitaine était toujours à son poste et Adacie lui tendit son quartz et celui de Tranit.

— Capitaine, monsieur ? Ordre d'affectation.

L'officier examina les deux quartz et les rendit à la lieutenante, l'air moins soucieux qu'auparavant.

— Voilà ! Quand les choses sont faites dans les règles, c'est beaucoup mieux. Il attrapa deux étuis déjà sortis de son fourgon. Et deux P S A modèle 2 avec étui et dotation réglementaire.

Adacie les attrapa et les rangea dans ses affaires. L'officier se retourna une nouvelle fois vers l'intérieur et en sortit un autre pistolet modèle cavalerie comme celui qu'Adacie lui avait présenté un peu plus tôt et qu'elle avait attaché à sa sellerie.

— Et un PSA modèle 1 pour la commandante. Est-ce que vous avez besoin d'un supplément de munitions ?

La question s'adressait à Tranit, mais Adacie répondit pour elle.

— S'il vous plaît, capitaine. Je vais instruire la commandante aujourd'hui pour la première fois. La dotation réglementaire n'y suffira pas. Une boite de chaque serait la bienvenue.

— Pour chacune d'entre vous ? demanda-t-il d'un air soucieux.

— Non, s'empressa de préciser Adacie, pour la commandante. Nous avons autre chose à faire aujourd'hui.

— Bien, parce que Kilian m'en a déjà pris trois de chaque pour lui et le seigneur Benwan. Je n'aurais plus rien pour les autres.

Adacie expliqua à Tranit.

— Les armes sont fournies avec deux recharges complètes de munition, pour le service normal. Une boite en contient huit. Nous pouvons en acheter une ou deux par tour de service, trois jours.

Tranit fit signe qu'elle comprenait et tendit son escarcelle à Adacie.

— Vas-y, achètes-en ! Essaye d'en avoir pour toi aussi, l'incita-t-elle.

Le capitaine grimaça et se retourna vers l'intérieur du chariot. Il y resta plus longuement, mais finit par ressortir avec quatre boites en vannerie.

— Commandant, c'est bien parce que vous n'avez pas encore tiré que je veux bien faire l'effort... Mais ne le répétez à personne.

Tranit lui sourit et lui adressa un petit signe de tête. Adacie sortit deux lunes d'argent qu'il empocha. Adacie se dépêcha de ranger les munitions et entraîna Tranit avec elle dans l'étable. Elle souriait comme une gamine ayant fait une bonne blague à ses amis.

Elle mit pied à terre et passa l'étui du pistolet au ceinturon de Tranit. Elle installa le pistolet long à sa selle et rangea plus convenablement les boites de munitions.

— Voilà, commandant. Les armes se portent ainsi. Une à la taille, l'autre à la selle. Personne ne remarquera quelque chose tant qu'on ne les sort pas. Je vous promets de vous apprendre à vous en servir aujourd'hui.

Tranit lui sourit avec une certaine affection.

— Bien, alors déjà, maintenant, lorsque nous sommes ensemble, arrête le vouvoiement. Je ne désire pas d'obséquiosité.

Adacie lui adressa un sourire enjôleur et Tranit la poussa gentiment vers sa monture et poursuivit.

— Maintenant, dépêchons-nous ! Je dois compléter mes bataillons pour ton seigneur. Ne le décevons pas.

— Oh non ! s'exclama la jeune fille. Jamais mon... jamais commandant, jamais !

* * *

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Vixii

Les larmes de Tranit - 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant