CHAPITRE VINGT-ET-UN .3

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Adacie s'était déjà levée avant même qu'elle ait fini sa phrase et faisait signe à un enseigne pour envoyer un message. Elle se retourna vers Erwan.

— J'ai fait transférer les affaires civiles du commandant ce matin même au bivouac du Barcus. Son chariot sera ici dans trente minutes.

— Trente quoi ? s'étonna Tranit

— Minutes, compléta Erwan, la subdivision d'une de nos heures. Je t'expliquerai ça un jour prochain. Tu l'as lu ?

— Heu... Le livre ? Non, je viens juste de le récupérer hier soir, peu avant de vous rencontrer ici même.

— Ce n'est pas grave, nous avons encore le temps.

Il cessa de fumer en écrasant rageusement ce tube qui sentait beaucoup plus fort que du chanvre classique. Il semblait réfléchir à plusieurs choses à la fois

— Enseigne ! Est-ce que Mousse dort déjà ?

Une jeune officière se trouvant à la table proche de lui se leva immédiatement.

— Oui seigneur.

— Bien, lorsque le quartz sera ici, que la plus jolie voix se prépare à le lui lire.

— Oui seigneur. Il aime beaucoup la voix de l'enseigne Sidien.

— Alors, arrangez-vous pour que Sidien soit prêt à le lui lire. Où en est l'orage ?

— Il tourne seigneur, mais toujours pas assez proche. Le seigneur Diérel est en place.

Les enseignes se succédaient pour répondre à ses questions, Tranit comprenait que la douzaine d'entre eux ne devait pas être de trop lorsqu'il échafaudait ses plans.

Cydrac lui fit signe de se rasseoir, comme fatigué de le voir debout à tourner dans tous les sens.

— Reste calme mon frère ! Tu as encore le temps !

— J'aimerais t'y voir Cydrac. J'en ai vraiment marre que tout arrive toujours en même temps. Il se tourna vers Adacie et ajouta, amusé.

— J'ai prédit que le hêtre du canal serait offert par les dieux cette nuit même et Awel s'est empressé de rapporter cette bonne nouvelle, uniquement pour ennuyer ce vénérable un peu trop manipulateur à mon goût.

Adacie poussa un petit cri d'heureuse surprise. La jeune fille trépigna de joie.

— Pourrons-nous venir, seigneur ? J'aimerais tellement que mon commandant puisse vous voir.

Erwan la regarda comme un père regarde une enfant un peu trop exigeante puis sourit à son tour.

— Si le chariot est arrivé entre temps et que l'orage nous rejoint enfin, vous pourrez venir voir. Ça sera rapide cette fois. Il n'y aura presque personne à impressionner. Bon, je vais me changer.

Erwan remonta à l'étage, suivi par plusieurs enseignes et Cydrac quitta la table pour rejoindre des cavaliers vêtus comme lui. Adacie se tourna vers Tranit et lui glissa à l'oreille.

— Quand sa seigneurie décide qu'un arbre va être offert par les dieux, il ne se trompe jamais. Si nous pouvons y assister, tu verras.

Sous le coup de l'émotion, de l'excitation, Adacie alternait tutoiement et vouvoiement. Ses yeux brillaient comme jamais.

— Il parle du hêtre du canal ?

— Oui. Il a pensé que ça serait un excellent moyen d'attirer l'attention sur cet endroit et aussi de clouer le bec au vénérable de Maubourguet.

Les larmes de Tranit - 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant