Ellynn Morgan et l'héritage du passé (tome 2)

16 - L'héritage du passé (deuxième partie)

- J'ai trouvé deux morceaux de bois pour immobiliser ta jambe, reprit Timolas après un silence en s'agenouillant à côté d'Ellynn qui ne parvenait pas à se libérer des doigts de Jolan. Tu vas devoir te tenir tranquille. 

Sa voix était devenue aussi froide que l'hiver. 

- Je vais te mettre une attelle pour que ta fracture se résorbe le mieux possible. Apolline, pourrais-tu aller mouiller ce linge dans l'eau s'il-te-plaît ?

La petite lui lança un regard craintif mais agrippa le tissu qu'il lui tendait et s'exécuta. 

- Tiens-le bien, dit sèchement Timolas quand Apolline fut hors de vue. 

Et sans attendre plus longtemps, Timolas effectua quelques gestes vifs sur la jambe de Jolan et avant qu'elle ne puisse se rendre compte de quoique ce soit, Ellynn entendit un crac épouvantable suivit d'un hurlement de douleur.
La souffrance était tellement atroce que Jolan se redressa et voulut repousser Timolas. Mais Ellynn intercepta ses bras et le recoucha avec difficulté sur le sol.  

- Lâchez-moi ! hurla Jolan comme un possédé. 

Il se ruait dans tous les sens pour se dégager de l'emprise d'Ellynn tandis que Timolas s'affairait tant bien que mal à accrocher les bouts de bois ensemble. 

- Ne bouge pas ! maugréa Ellynn entre ses dents. 

Elle devait mettre tout son poids sur ses épaules pour l'empêcher de bouger. Elle jeta un regard désespéré à Timolas qui terminait le bandage de fortune et vit Apolline accourir dans leur direction, son visage reflétant une peur brute.

- C'est fini, dit Ellynn en reportant son attention à Jolan qui se contorsionnait de douleur. C'est fini. Arrête de te débattre, ça ne va faire qu'aggraver ta plaie. 

Au moment même où Timolas venait à sa rescousse, Apolline se jeta sur son dos et le mordit de toutes ses forces. 

- Apolline ! cria Ellynn en se précipitant sur la fillette pour l'écarter de Timolas. 

Toutes sortes d'émotions passaient sur son visage grisâtre déformé tandis qu'elle tapait le vide avec ses poings frêles : la colère, la peur, la tristesse, l'angoisse, la culpabilité, l'épuisement. C'en était trop pour elle : tous ces évènements et la douleur de son frère. Apolline était proche de la crise de nerfs et se débattait comme une furie pour rejoindre son frère. Ellynn resserra ses bras autour d'elle et se balança avec douceur pour l'apaiser.   

- J'étais obligé ! se justifia Timolas en couvrant la voix de Jolan qui profanait des injures à tue-tête. Le pire est passé. Calme-toi et arrête de bouger !

Jolan lui jeta un regard assassin mais cessa enfin de se débattre, ses lèvres tremblant à cause de la douleur. 

- Avec un peu de chance, continua Timolas en observant son travail précaire, l'attelle va tenir jusqu'à Wallis. Il faut absolument que tu te tiennes tranquille.
- Si tu pouvais avoir... l'amabilité de prévenir... la prochaine fois que tu décides de me rompre les os, répliqua Jolan d'une voix caverneuse et faussement mielleuse.

Timolas ne releva pas son sarcasme et croisa le regard accusateur d'Ellynn.

- Tu aurais pu prévenir.
- Ca n'aurait absolument rien changé, répliqua Timolas en n'ayant pas l'once d'un regret dans sa voix, et je t'avais prévenue.

Un éclair fendit le ciel et éclaira un bref instant toute la caverne. L'orage était au-dessus de leur tête et ce n'était pas le moment de controverser sur son comportement puéril.