Ellynn Morgan et l'héritage du passé (tome 2)

17 - L'hôpital St Hippocrates (troisième partie)

À contrecœur, elles dirent au revoir aux deux lionpins et retrouvèrent Philys et Timolas qui étaient occupés à nettoyer l'écurie des chevaux. 

- Vous pouvez sortir Baron et Lady pendant que je m'occupe de Néo, dit leur professeur en prenant les brides pour l'emmener dehors. Mr Tadius, aidez Mlle Collins. Et vous Mr Arius, vous pouvez aider Mlle Morgan. Ils ne sont pas toujours très dociles quand ils voient qu'ils vont sortir dans la prairie – il tira gentiment sur la bride de l'étalon noir pour le faire avancer jusqu'à la sortie – donc faites bien attention à ne pas vous faire piétiner par leurs sabots. 

Philys jeta avec délectation sa bêche contre le mur et se précipita pour aider Amaryllis, soulagé de ne plus devoir ramasser des excréments. 

- Je vais la tenir, si tu veux, proposa Philys en s'approchant du cheval blanc tandis qu'Amaryllis restait près de lui pour l'aider en cas de besoin.

Très à l'aise, Philys sortit facilement Lady alors qu'Ellynn, moins confortable avec le grand étalon, attendit que Timolas vienne la rejoindre pour le sortir. Mais au lieu de s'occuper directement de Baron, Timolas se positionna devant elle et la fixa de ses yeux perçants.

- Quelque chose ne va pas... ? demanda Ellynn qui sentit le haut de ses oreilles rougir.

Au-dehors, deux hennissements heureux retentirent. 

- Il vaudrait mieux que tu évites de provoquer Kunis, dit Timolas après un long moment, le regard inquiet. 

Ellynn le regarda avec stupeur. 

- Je n'ai pas peur d'elle, répondit Ellynn sur un ton de défi.
- Je sais, soupira Timolas en se passant la main dans les cheveux, et c'est ça qui m'ennuie...
- Ca t'ennuie ?
- Ne me comprends pas mal, dit Timolas quand il vit les yeux d'Ellynn lui lancer des éclairs, je dis juste que Kunis et toi n'avez pas reçu la même éducation et elle ne la jouera pas à la loyal... tous les coups bas seront permis et je préfèrerais éviter d'en arriver là pour une bête histoire de statut...

Un nouveau silence s'installa pendant lequel Ellynn fixa intensément Timolas. 

- Une bête histoire de statut ? répéta Ellynn avec lenteur. Tu cautionnes la manière dont elle nous traite ? Dont elle traite Amaryllis et Philys ?
- Absolument pas ! s'exclama Timolas, piqué à vif. Je n'ai jamais cautionné sa manière de vous parler et ça n'arrivera jamais. Tout ce que je veux que tu comprennes, c'est que ça ne sert à rien de ruer dans les brancards. Sois plus intelligente qu'elle et laisse-la dire ce qu'elle veut.

Il y avait une part de vérité dans ce qu'il lui disait mais Ellynn ne put s'empêcher de lui jeter un regard noir et ajouter : 

- C'est trop facile que personne ne lui dise jamais rien. De toute façon, ce que je lui ai dit aujourd'hui ne changera rien. Elle me déteste déjà parce que...

Ellynn s'arrêta en plein milieu de sa phrase, horrifiée par ce qu'elle avait failli lui dire.

- Parce que... ? demanda Timolas lentement, soudainement intéressé par sa réponse.
- Parce que je suis humaine, bredouilla Ellynn en portant une attention un peu trop accrue à une souris qui traversait l'écurie. 

Un silence embarrassant emplit la pièce. Elle savait – non elle sentait – que Timolas l'observait et elle avait peur de perdre pied si elle devait croiser son regard intense.

- Je n'ai pas envie que tu sois blessée...

Il n'avait pas dit ça plus haut qu'un murmure mais malgré tout, Ellynn perçut l'inquiétude dans sa voix rauque.

- Je ferai attention, marmonna Ellynn en sentant ses joues brûler.

Puis, ne sachant pas l'éviter plus longtemps, Ellynn leva les yeux vers lui et fut surprise de voir son regard anxieux. Il la contemplait comme s'il craignait que Kunis surgisse de nulle part et l'attaque sans qu'elle ne puisse se défendre.
Un hennissement puissant de Baron leur indiqua qu'il commençait à s'impatienter. Il était clairement irrité d'être laissé à l'intérieur alors que ses compagnons se défoulaient déjà à l'extérieur. 

- Doucement mon grand, dit Timolas en attrapant sa bride et en tendant son autre main pour qu'il puisse le renifler. On va sortir. 

D'abord méfiant, Baron hennit et tapa des sabots, soulevant un large tapis de poussière qui emplit son box. Puis, voyant qu'il ne lui voulait aucun mal, l'étalon s'approcha à pas de souris et toucha sa main de son museau. Avec douceur, Timolas caressa son garrot et lui murmura des paroles apaisantes. Et quand il obtint enfin sa confiance, il l'emmena dans la prairie pour qu'il puisse rejoindre ses deux compagnons.
Au-dehors, Amaryllis leur fit des grands signes. Elle et Philys étaient accoudés à la barrière de l'enclos et regardaient Lady gambader derrière Néo, le mâle dominant du groupe. Baron ne tarda pas à les rejoindre et tous trois se mirent à courir pour se dégourdir les jambes. 

- Ils sont magnifiques, soupira Amaryllis au moment où Ellynn et Timolas arrivaient à leur hauteur. 

Le soleil commençait à se coucher et les derniers rayons réfléchissaient sur le lac, illuminant d'une couleur orangée les robes des chevaux. Emerveillés, tous se turent et admirèrent le spectacle qui se déroulait devant leurs yeux. 

- Ce sera tout pour aujourd'hui, dit le professeur Bravakis en passant devant eux pour donner à manger aux chevaux. Rangez vos bêches puis retournez à la Salle Commune. Un détour dans la foret des Sylphes n'est pas nécessaire vu l'heure tardive. 

Il lança un regard éloquent à Timolas et Ellynn. 

- Allez, dépêchez-vous. 

Tous quatre rejoignirent la Salle Commune pour manger le repas du soir, Ellynn pestant intérieurement. 

- Vous pensez que Mrs Rosalys a cuisiné quoi ce soir ? demanda avidement Philys dont l'estomac faisait des bruits bizarres depuis la grange. 

Ellynn haussa les épaules. Elle n'avait pas très faim et avait qu'une seule envie : rejoindre Gladius pour faire une promenade avant d'aller dormir. Elle jeta un coup d'œil par-dessus son épaule pour voir si le professeur Bravakis les surveillait. Puis ne le voyant pas, elle appela silencieusement Gladius pour qu'ils se rejoignent à l'orée de la forêt, juste à côté de leur dortoir. 

- Evans nous observe, chuchota à son oreille Timolas.

Leur professeur épiait leur arrivée et attendait patiemment qu'ils rejoignent leurs camarades de classe pour manger. Ellynn n'eut d'autre choix que d'annuler sa promenade et suivit docilement Philys et Amaryllis qui furent ravis de découvrir que Mrs Rosalys avait préparé une grande salade printanière pour le souper. 

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