16.2.

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Point de vue de Victor

Le procureur termine :

« Un homme homophobe au travail, qui vit avec six autres hommes, tous homosexuels, en étant lui-même homosexuel, c'est tout à fait surprenant. Tel est notre accusé. Il s'est réfugié chez un professeur d'université, pour le symbole qu'il représentait. Voyez cet homme, qui saurait dire s'il est homosexuel ou non ? C'était la recherche et le raisonnement de l'accusé ! Il ne voulait pas d'un homme qui pourrait facilement être identifié, qui serait efféminé.

Et ne croyez pas que ces propos sont les miens. Non, Mesdames, Messieurs, ce sont ceux de l'accusé sur les réseaux sociaux ! Il n'est rien d'autre qu'un homophobe qui n'assume pas son homosexualité, réfugié aux côtés d'une figure de pouvoir, ici universitaire, pour que l'on n'imagine jamais ce qu'est sa vie privée ».

Je frissonne à l'écoute de tels propos. S'agit-il d'une rhétorique pour qu'il plonge pour homophobie, ou bien est-ce la vérité ? Peut-on encore, aujourd'hui, déterminer l'orientation sexuelle sur le physique ? A quel moment peut-on penser que cette orientation transpire ainsi ? Et pourquoi lui donner tant d'importance.

Vient alors la réponse de l'avocat de Gwenaël, que je redoute tant :

« Monsieur le Procureur, vous omettez visiblement volontairement une large partie de la vie de mon client. Avez-vous oublié que l'incident s'est produit dans un club détenu par un individu se faisant appeler Suprême Mathieu, connu pour son ancrage dans la pornographie et le BDSM ? Avez-vous oublié que mon client a subi la domination du tireur, pendant des années ? Qu'il s'agit de harcèlement, de violence, de viol !

Les propos de mon client n'étaient que la réaction au traumatisme subi par ce dernier au sein même de ce que vous appelez son refuge. Il y a erreur, Mesdames et Messieurs, mon client devrait être sur le banc des victimes, tandis que tout le groupe avec lequel il vivait devrait être accusé de maltraitance, de viol, de non-assistance à personne en danger. Mon client n'a fait que se défendre, certes avec retard, mais tout de même.

Qu'auriez-vous fait, vous, si vous étiez entouré de six personnes sectaires ? Vous vous seriez réfugié dans le travail et auriez tenté de partir ? C'est ce que mon client a tenté de faire avec sa rencontre ce soir-là. Ne nous trompons pas de victime, ne nous trompons pas de bourreau. Ce sont eux les détraqués avec leur BDSM ! ».

Le juge le coupe et l'avertit. Je suis figé sur ma place. Wilfried est droit, digne, visiblement prêt à témoigner. Ludovic s'est enfoncé dans son fauteuil. L'avocate qui nous représente, et Ludovic en particulier, prend désormais la parole :

« Quelle belle tentative, Maître. Attaquer les victimes du fait de leur pratique sexuelle. Vous ne valez pas plus que votre client. Avez-vous noté, dans l'examen clinique de votre client, la moindre trace de blessure, de coup, de maltraitance, de viol, tel que vous le soulignez ? Non. Les collègues de votre client, ses amis, sa famille, ont-ils noté qu'il ne pouvait pas les voir, qu'il était emprisonné dans une secte ? Non plus. Le mode de vie de mes clients n'a aucun effet sur l'acte que nous jugeons ici. Aussi surprenant puisse-t-il paraître à nos yeux, nous, de femmes et hommes vivant en relations exclusives, il serait nul et non avenu de l'amener sur la table des débats ».

Un mâle foudroyant (BxB)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant