Un an déjà qu'un mariage avait été célébré à Mó fǎ. Régulièrement, Wulong entendait parler de Muwen et de Jia Li, un duo haut en couleur, dont les éclats de voix se répercutaient dans l'intégralité des Rives Prodigieuses. Ils se disputaient souvent d'après les dires et se réconciliaient avec tout autant de bruit, mais d'une façon bien plus plaisante. En soi, ils profitaient simplement de leur vie conjugale, et ils avaient totalement raison ! L'alchimiste s'amusait à ouïr les rumeurs à leur sujet.
Quatre ans déjà qu'une tragédie était survenue dans ce monde. Tout le temps, Wulong songeait à son camarade disparu en guerre. Hiwang lui manquait et son absence le brûlait de l'intérieur. Il détenait les mêmes pensées que Xian-Jun ; peut-être aurait-il pu l'aider. Après tout, à l'époque, il avait été près de lui à la suite de l'attaque, il aurait dû se douter que quelque chose n'allait pas, prévoir son sacrifice et l'en empêcher. Mais le Seigneur souhaitait avant tout éviter un bain de sang. Envoyer les armées à la Fosse des Lamentations aurait éradiqué les Ombres ou les aurait mises en colère, des morts se seraient ajoutés à la longue liste. Mais, l'alchimiste le regrettait tellement.
— Infusez ces herbes et buvez la mixture, brûlez aussi de l'encens. Cela débloquera le verrou mental qui vous entrave et vous vous sentirez plus libre ! expliqua l'alchimiste à son vis-à-vis. Venez tous les jours pendant une semaine, je vous apprendrai un parcours de méditation.
— Vos méthodes fonctionnent toujours ! s'exclama son client en repartant.
— Ils t'adorent, clama un homme à sa droite, un alchimiste également. Pourquoi te réclament-ils tous ? Depuis que tu as ramené cet homme de Jiǎo huá, j'ai l'impression qu'ils sont curieux à ton sujet.
— Quelques-uns mentent à propos de leur maladie, acquiesça Wulong, dépité.
Aujourd'hui, identique à tous les autres jours, il travaillait. Accompagné de ses collègues, il accueillait dans une grande bâtisse des patients, en plein centre de la capitale. Tant que le soleil brillait, il offrait sa spiritualité à ceux qui le nécessitaient, puis il rentrait chez lui et se reposait, exténué. Il accordait peu de temps à Yichen, malheureusement, puisqu'être alchimiste demandait une conséquente part de son énergie.
Les premiers mois, le jeune de Jiǎo huá avait essuyé les menaces des gens de Hù lǐ et il avait veillé seul sur Liang, à leur demeure, mais il s'était rapidement ennuyé. Il s'était proposé d'aider les fermiers aux alentours et ils avaient accepté, surtout qu'ils ne le payaient pas, mais il s'occupait et cela lui suffisait. Plus le petit grandissait et plus il quittait longtemps la maison.
Récemment, Yichen s'était rendu à la Cité des Rêveurs et avait postulé auprès du physicien officiel pour être son assistant. Parce que personne ne voulait de ce poste, il avait été accepté. Il ne gagnait pas beaucoup d'argent, mais Wulong se remplissait de fierté à le voir s'émanciper, devenir un homme indépendant de ses préceptes barbares. Il ne tuait plus et s'énervait rarement.
— Oh ! mais ne serait-ce pas la beauté de Hù lǐ que voici ?
Tout sourire, l'alchimiste fit volte-face et accourut dans les bras de son homme qui l'étreignit avec force. Chaque jour, Yichen finissait plus tôt que lui et il passait par son lieu de travail pour rentrer, alors ils avaient convenu de s'attendre.
Wulong tenta de l'embrasser, une habitude qui s'était ancrée dans leur routine de fin d'après-midi, mais son cadet l'évita et lui baisa la joue. Puis, il le reposa et lui suggéra d'un regard de retourner auprès de son patient qui attendait. Cachant sa déception, l'alchimiste se chargea de guérir cet homme, les lèvres pincées.
Pourquoi ne l'embrassait-il plus ?
Dès qu'il termina, il salua gaiement ses collègues et rejoignit son amant à l'extérieur, lui saisissant la main. Ils se mirent en chemin jusqu'à leur cher foyer.
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La fosse des Lamentations
FantasyQuand le monde bascule dans l'ombre, seuls de véritables héros peuvent le sauver. Tout le monde pensait les connaître, que ce soient les cultivateurs, les prêtres, les immortels ou les mortels. Tous ont cru comprendre ce qu'avaient enduré les Champi...