La fosse des Lamentations

La mort du Seigneur Hiwang 3

Muwen avait pris la relève auprès de Liang et le divertissait sans s'en lasser. Son épouse saisissait visiblement le message ; il désirait un enfant, son côté paternel était évident. Lorsque la situation redeviendrait calme et stable, elle songerait à lui donner un héritier. Yichen s'entraînait nuit et jour avec le Jeune Maître afin de les distraire tous les deux, ce qui ne fonctionnait pas vraiment. Wulong et la mercenaire lisaient pour se détendre.

Jusqu'à l'arrivée précipitée d'une certaine personne. Elle déboula dans le temple en toute hâte, les cheveux hirsutes et la démarche étrange due aux journées de galop. Meiling ouvrit la porte en trombe et se jeta sur son Jeune Maître pour le câliner tel un petit garçon. Elle le berçait, alors qu'il essayait de se décoller d'elle. Les compagnons réunis au complet. Il fallait simplement que le Seigneur soulève ses paupières et tout s'embellirait. Le cauchemar se terminerait pour de bon.

— Le Patriarche ne cesse de rouspéter ! Votre départ ne lui a guère plu. Il ne me permettait pas de vous rejoindre et il a envoyé plusieurs messagers ici pour venir vous chercher, mais je les ai tous interceptés avant qu'il ne quitte la capitale et je me suis faufilée hors du palais en cachette.

— Cela ne m'étonne pas, railla Xian-Jun, la gratifiant d'un remerciement sincère.

Subitement, elle pivota vers les autres. Les deux lecteurs lui adressèrent un bref signe de tête, Yichen lui accorda un regard mais l'ignora ensuite, et elle aperçut Muwen. Leurs visages reflétaient une luminosité similaire, ils rayonnaient. Poussant de petits cris de ravissement, ils se sautèrent dans les bras. L'homme ne l'avait pas même vu pendant la bataille, la chasseuse aidait l'armée de Jiǎo huá à l'autre flan de la colline, il s'était fait un sang d'encre pour elle. Finalement, les deux M se retrouvaient dans la même pièce ! Et que tous tremblent. Ils recommenceraient leurs chuchotements, leurs moqueries et leurs farces, sûrement pour alléger les tensions. Ils s'isolèrent en premier lieu, à l'extérieur, face à l'étang. Ils gesticulaient. C'était leur solution pour ne pas se morfondre pour Hiwang.

— Petite fripouille ! s'écria Mei. C'est un colporteur m'a annoncé votre mariage ! Ne pouviez-vous pas m'écrire une lettre ? Et m'inviter, par ailleurs ? Moi qui vous pensais être mon meilleur ami !

— Je vous ai écrit une missive et je l'ai confié à un messager, répliqua Muwen, blasé. Je suppose qu'elle s'est volatilisée. Je me suis froissé de ne pas recevoir de réponse.

— Comment répondre à une lettre sans lettre au préalable ? Bon, passons ! Votre mariage, j'aurais parié dessus ! Vous vous aimiez tellement. Du moins, vous l'aimiez éperdument et elle était occupée à dissimuler son affection réciproque derrière sa jalousie... J'hésitais à vous rendre visite, mais cela aurait été malvenu de ma part. Votre épouse ne m'apprécie pas, je n'aurais gâché sa joie par ma présence !

— Pourtant, vous êtes ma petite sœur, et elle accepte désormais de nous voir ensemble. Li sait qu'il ne faut pas se méfier.

En un sens, il devait son union à Meiling. Cette dernière avait contraint Jia Li à prouver son amour par l'explosion de sa jalousie maladive. La chasseuse s'était amusée, et elle avait tiré sa révérence. Elle n'avait pas cherché à le revoir justement pour qu'ils tissent des liens entre eux. Quel fut son étonnement en entendant la nouvelle !

Les deux M discutèrent du bon vieux temps et des événements prochains, ils se promirent de se voir plus souvent. Puis, le soleil tomba et tous se couchèrent.

Le lendemain matin, l'héritier ouvrit les yeux dans l'inconfort. Assis par terre, le dos craquant à chaque mouvement, les bras posés sur le lit du Seigneur, son visage dessus, il avait dormi d'un œil à l'affût. Soit il rêvait, soit Hiwang bougeait de temps en temps. Lorsqu'il revint dans la chambre, il lui sembla que son corps s'était légèrement déplacé. Alors, il guetta et pria pour son rétablissement.