Les larmes des Morts 2

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À cette phrase, Wulong se connecta de nouveau au présent et, désorienté, il se tourna d'abord vers le petit et plaça ensuite son regard en hauteur.

Le ciel, qui lui semblait brumeux, était en réalité parcouru par des formes massives qui poussaient des hurlements stridents. Il n'en avait pas vu beaucoup dans sa vie, mais l'alchimiste savait exactement la nature de ces choses. Des démons ! Sous la forme d'ombres répugnantes. Elles pullulaient, donnaient naissance à des créatures terrifiantes et détruisaient ce monde à petit feu, selon leur bon vouloir. Il poussa un soupir, incertain de ce qu'il devait faire.

Liang se boucha les oreilles.

Ceci eut le don de ramener complètement l'homme sur terre. Il paniqua quelque peu. Elles étaient trop nombreuses. Jamais, auparavant, elles n'étaient sorties de leur trou maudit. Comment devait-il réagir ?

Soudain, un cri frêle résonna dans ses pensées. Il fit volte-face et se jeta sur Liang. L'enfant était soulevé dans les airs par un démon qui tentait de l'entraîner dans ses ténèbres. Wulong attrapa sa main et résista bec et ongles. Dans la précipitation, il parvint à décrocher son éventail doré de sa ceinture et il fendit l'air avec.

L'armature en acier comportait de fines lames tranchantes à souhait qui pouvait couper n'importe quelle matière. Il en frappa de toutes ses forces l'Ombre et trancha impitoyablement la masse de noirceur qui lâcha prise. Par chance, il portait en toute circonstance cette armée, malgré le pacifisme de sa Secte, puisque, en tant qu'alchimiste aussi réputé, il était invité à voyager dans le monde.

Son petit retomba dans ses bras et il entreprit de le transporter à l'intérieur, en sécurité, mais une explosion détonna. Les Ombres soufflaient des flammes au-dessus du champ. La demeure prenait feu. Comment devait-il réagir ?

Son domaine s'enflammait et aucun hurlement ne s'élève, comme si personne n'avait survécu à ce brasier obscur et qu'ils avaient péri sur le coup. Wulong envisagea d'entrer et de sauver tous les domestiques, ses parents, les animaux, mais il ne pouvait laisser Liang sans défense, surtout pour des personnes qui étaient probablement mortes à cet instant. Une larme roula sur sa joue osseuse, alors que les sanglots de l'enfant retentissaient péniblement à ses oreilles. Il lui fallait décider, vite.

Au prix d'un effort surhumain, ses paupières s'abaissèrent et il se résolut à fuir, pour protéger le garçon. Il le confierait à quelqu'un, puis il retournerait chez lui pour chercher d'éventuels survivants qui se seraient extirpés de la demeure. 

Wulong amorça une course effrénée pour se distancer de cet incendie, mais sa route fut rapidement entravée. Un homme se tenait devant lui. Comment devait-il réagir ?

Liang toujours dans ses bras, il déglutit avec difficulté, la gorge sèche, le visage trempé de larmes.

L'étranger était assurément le possesseur de cette énergie horrifiante. C'est ce qu'il se dit. Un démon de chair et d'os, face à lui. Son mauvais pressentiment se réalisait. Ces créatures cruelles sortaient de leurs ténèbres et envahissaient le monde. Wulong était prêt à le supplier de le laisser fuir, ou prêt à se battre. Le garçon toussait. Il dévisagea son garçon, alors qu'il s'apprêtait à le poser au sol, mais il lui apparut que l'Ombre, celle qui l'avait attrapé, avait déposé une marque sur son corps. Il aurait parié que ce signe étrange causait en partie ses suffocations, en plus de la fumée opaque dans l'air. L'alchimiste avait si peur pour son protégé. D'un regard, il implora cet homme de se décaler, de les laisser partir. En vain.

— Je ne sais pas qui vous êtes, cracha-t-il, essayant de contrôler ou, au moins, diminuer ses tremblements de terreur, mais je vous somme d'épargner l'enfant. Même les démons sont capables d'un brin de pitié, non ? Je vous en conjure !

La fosse des LamentationsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant