Il tira. Le projectile fusa dans le ciel, et toucha quelque chose. Le silence. Puis un animal s'écrasa sur le sol, mort. L'archer s'avança prudemment, s'agenouilla pour récupérer l'oiseau. On va enfin pouvoir manger quelque chose ! S'écria-t-il, brandissant sa proie. Un autre de ses compagnons s'avança, un chevreuil fraîchement tué, posé sur ses épaules. Le premier hocha la tête, et s'assit près du feu.
Le chauve s'apprêtait à découper ce qui lui semblait être un corbeau, mais son compagnon l'arrêta, lui faisant remarquer que l'animal avait quelque chose accroché à sa patte. Il détacha le bout de papier, et en lut le contenu. Il n'en comprit rien, et alors qu'il voulait le jeter dans les flammes, une main le stoppa.
- Donne-ça imbécile ! fit l'elfe, agacé. Un message porté par ce genre d'oiseau, ce n'est pas commun. Il s'agit forcément d'une information de la plus haute importance, pour qu'une magicienne envoie une de ses crécelles.
- Ou alors, elle ne veut pas que quelqu'un d'autre que le destinataire de cette lettre puisse lire son contenu, rétorqua l'autre elfe.
Le bandit haussa les épaules, et mordit à pleines dents dans une cuisse de l'animal qui venait d'être cuit à la broche. La petite compagnie mangea, pendant que l'Aen Seidhe étudiait le message. Après l'avoir lu plusieurs fois, il comprit qu'il était destiné à une personne en particulier, et que l'expéditrice tenait vraiment à ce que son contenu reste secret. Iorvan ouvrit le livre que lui avait prêté Thoran lors de leur dernière rencontre, et le feuilleta longuement sans parvenir à déchiffrer complètement la missive.
Sans succès : le message avait été crypté avec brio. Et tenter de trouver le destinataire de la lettre n'était plus possible maintenant qu'un de ses hommes avait abattu son porteur. L'elfe rumina, puis décida de ramener la lettre à Thoran. Lui, peut-être, pourrait trouver la signification des signes présents sur le morceau de papier. Il la rangea dans sa poche, interpella ses hommes. Ils repartirent pour le sud de Sodden.
* * *
Eskel était tranquillement assis à une table, une pinte de bière à la main – il ne comptait même plus combien il en avait bu -. Il n'avait plus rien ; son dernier contrat n'avait pas franchement été une réussite, et le paysan qui devait le payer ne lui avait donné que la moitié de son salaire. Le sorceleur continua de se lamenter, seul, dans une taverne miteuse perdue au milieu de nulle part. Mais c'était mieux que rien ; il se faisait rare de trouver en Sodden un établissement qui accueillait les étrangers, en particulier ceux qui étaient différents comme lui.
Il se leva, cingla ses épées dans son dos et sortit de la taverne. Après avoir sellé sa monture, il chevaucha vers le nord. Il devait y retrouver un contact, pour un contrat beaucoup plus intéressant, qui consistait à tuer une sorte de dragon, dont la tanière était non loin. La crécelle de Yennefer aurait dû arriver à ce moment-là.
Il aurait lu la lettre, apprit une bonne nouvelle, et serait reparti gaiement en chevauchant vers le sud, à Toussaint. Mais ce ne fut pas le cas. Il se dirigea vers le lieu de rendez-vous, attendit longuement avant de s'endormir contre un arbre. Le sorceleur n'entendit pas les bruits de pas s'approcher furtivement de lui. Il n'entendit pas non plus le crissement de la lame sortant de son fourreau. Eskel ne sentit rien. Qui sait, peut-être que cette lettre l'aurait sauvé de son destin funeste.
* * *
Lambert ouvrit la lettre, et la relut longuement avant d'en déceler le sens. Il n'avait jamais vraiment été doué pour déchiffrer les signes, mais il avait tout de suite reconnu ceux de la magicienne. Décidément, elle aimait compliquer les choses. Lorsqu'il en comprit le contenu, il monta préparer ses affaires. Il lui restait un contrat à honorer, mais le village dans lequel il séjournait depuis quelques temps n'était rempli que de pourris.
Il récupéra ses lames, et la bourse pleine de couronnes posée sur le bureau, descendit et sortit de la taverne en évitant les regards. Il n'avait qu'une envie : leur trancher la tête. Mais il savait bien que son caractère finirait par lui attirer de sérieux ennuis. Lambert se dirigea vers les écuries, et se rendit compte que sa monture avait disparue. Il pesta. Merde ! Si j'attrape le fumier qui a fait ça !
Par chance, ses sens de sorceleur lui permirent de déceler aisément les traces du voleur de chevaux. Il se lança donc à sa poursuite, sa patience atteignant ses limites. Quand le sorceleur le trouva, le bougre n'eut pas le temps de hurler, qu'il tombait à terre. Lambert essuya sa lame tachée de sang, et la rengaina, satisfait.
Il récupéra sa jument, fouilla les poches du voleur pour récupérer ce qu'il pourrait vendre à bon prix en arrivant à Beauclair. Il ne trouva pas grand-chose, mais s'en contenta. Le brun monta à cheval, rangea les quelques affaires qu'il avait récupéré dans ses sacoches, et força son étalon à faire demi-tour. Avec cette poursuite, il avait complètement perdu son sens de l'orientation.
Il grommela, observant les alentours pour tenter de se repérer. Il trotta quelques temps, avant de croiser sur sa route un bandit, qui s'enfuit en le voyant. Le mutant le rattrapa bien vite, et le tira si violemment par le col que l'homme faillit s'évanouir. Lambert lui ordonna sèchement de lui indiquer la route pour Toussaint, ce qu'il fit en tremblant. Le sorceleur le lâcha avec dédain, et prit la route. Il n'en aurait que pour deux jours, tout au plus.
* * *
Le druide sortit de la forteresse de Kaer Trolde, siège de la famille an Craite, réajusta son couvre-chef, et passa sa main dans sa longue barbe drue et grise. Muni de son bâton, il descendit le sentier jusqu'à arriver au village, plus loin en contrebas. Il poussa la porte de l'auberge, repoussa un homme soûl qui lui tombait dessus, et s'assit à une table. Sac-à-Souris sortit de sa poche un morceau de papier, et en relut le contenu. C'est Triss, quelle surprise... se dit-il. Alors comme ça, Ciri a eu un enfant...
Il hésita un moment. Maintenant que Cerys, la fille de l'ancien jarl défunt Crach an Craite était montée sur le trône, elle avait plus de responsabilités, et se devait de mener son peuple dans la guerre qui s'était engagée contre les troupes de Nilfgaard, sur les côtes d'Unvik. Le druide se devait donc de la conseiller comme il l'avait fait jadis pour son père. Il soupira et décida d'aller voir Cerys. Il marmonna quelques mots, puis remonta à la forteresse.
Sac-à-Souris traversa le long corridor froid, et entra dans la salle du trône. La reine le salua d'un geste de la main, et agita un bout de papier, le même que le druide avait reçu. Tu transmettras à Ciri mes amitiés Sac-à-Souris. Elle lui sourit. Cerys ne pouvait pas se rendre à Toussaint, ses devoirs de souveraine l'obligeaient à rester, et elle ne pouvait pas laisser ses troupes maintenant. Il s'inclina respectueusement et prit congé. À peine passé la porte, qu'un portail s'ouvrit.
- On peut y aller ? s'exclama la magicienne rousse, visiblement impatiente de retrouver sa petite sœur de cœur.
- Quitte à venir ici, tu aurais pu annoncer oralement la bonne nouvelle, non ? répondit sèchement le druide, visiblement indigné par le ton de Triss.
- Oui c'est vrai, mais j'avais d'autres chats à fouetter.
Ils traversèrent le portail.
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Petit chapitre qui s'éloigne de nos protagonistes pour suivre les différents invités. J'ai trouvé ça sympa à écrire, j'espère que vous aussi ! (et désolé pour le sort que j'ai réservé à Eskel, ça m'a fait pleuré quand même T^T)
N'hésitez pas à laisser un commentaire et à partager le chapitre ou l'histoire entière si ça vous a plu !! <3
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Un Sorceleur pas comme les autres
FantasyUne nouvelle menace plane sur Le Continent, en particulier sur le célèbre barde Jaskier ! Léo, un sorceleur dont on ne connaît rien, va se retrouver mêlé à ses histoires, et il aurait peut être mieux fallu qu'il s'en éloigne le plus rapidement pos...