Cauchemar

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Les médecins l'avaient sédatée et Lyam l'observa, désemparé. Une jeune fille, habillée d'une blouse blanche, entra dans la pièce et s'adressa à Lyam.

— Bonjour Monsieur, est-ce que vous pouvez me donner le nom, prénom et la date de naissance de mademoiselle ? Et savez-vous si elle possède une carte vitale et une mutuelle ? 

— Elle s'appelle Emmy, Emmy Roudaut, mais je ne connais pas sa date de naissance, ni même si elle a une mutuelle ou une carte vitale, mais... je paierai les frais d'hospitalisation si besoin. 

La jeune femme hocha la tête, prit les coordonnées de Lyam et quitta la pièce. Il tira une chaise afin de s'asseoir au plus près d'Emmy et lui prit la main mais elle était toujours shootée aux médicaments. Il finit par s'endormir, la tête contre la poitrine d'Emmy, toujours assis sur sa chaise. 

— Lyam, articula-t-elle d'une voix pâteuse, le lendemain en le réveillant en sursaut. 

Il faillit tomber de sa chaise et se rattrapa à la barre du lit médicalisé. 

— Emmy, comment vous sentez-vous ? 

— Vaseuse, j'ai un mal de tête et j'ai fait un cauchemar terrible. 

Puis elle se redressa.

— Mais qu'est-ce que je fais là ? demanda-t-elle sans comprendre. 

Lyam la fixait, la boule au ventre. Il ne voulait pas lui annoncer la raison de sa venue ici. Il se mordilla la lèvre, la gorge nouée. 

— Je suis tellement désolé Emmy, vraiment je ne sais pas quoi dire. 

Soudain ce qu'elle croyait être un cauchemar lui revint en mémoire. Elle arracha la perfusion en grimaçant et se leva aussitôt. 

— Emmy, vous devez rester là ! 

Elle secoua la tête de gauche à droite. 

— Je dois voir ma mère, ramenez-moi à la cabane, s'il vous plaît. 

Il la ramena de force contre son torse alors qu'elle se débattait pour partir. 

— Emmy, il n'y a plus de cabane, il y a eu un incendie... 

Il vit les larmes emplir ses yeux avant de complètement la submerger.

— Mon cauchemar... ne peut pas être vrai. Lyam, dites-moi que ma mère n'est pas morte, souffla Emmy la voix se brisant sur le dernier mot. 

— Je suis désolé Emmy mais votre mère nous a quittés cette nuit. 

— Non, non, non, sanglota-t-elle en s'agrippant au cou de Lyam. 

Des frissons s'emparèrent de Lyam face à la détresse d'Emmy. Il s'empara de la chaise sur laquelle il avait passé la nuit et s'assit en entraînant Emmy sur ses genoux. Celle-ci fourra sa tête contre le cou de Lyam, inconsolable. Ils restèrent ainsi de longues secondes, collés l'un à l'autre avant qu'Emmy retrouve l'usage de la parole. 

— Emmenez-moi chez moi s'il vous plaît, je veux voir... 

Elle se tu, incapable de prononcer autre chose. Lyam savait que, pour qu'elle puisse faire son deuil, il fallait qu'elle visualise les choses alors il se leva. Il l'aida à se rhabiller et une forte odeur de fumée se dégagea de sa robe. Contre l'avis médical, ils quittèrent l'hôpital en direction de la cabane. Le périmètre de sécurité était toujours présent signalé par des ficelles jaunes. Emmy passa sous celles-ci et s'approcha au plus près de son ancien lieu de vie. Elle aperçut dans les décombres calcinés encore fumants quelques lambeaux de vêtements. Le feu avait tout embrasé, rien n'avait survécu à cette nuit destructrice. En plein jour, ils prirent la mesure de la catastrophe. Il ne restait plus rien. En une nuit, elle venait de tout perdre. Elle s'assit à même le sable, les yeux rivés sur ce qui lui servait auparavant de maison. Quelques badauds intrigués ralentissaient, voire s'arrêtaient pour certains. Emmy ne leur prêtait aucune attention, perdue dans ses souvenirs. Lyam la laissa se recueillir en silence, assis lui sur le petit muret les séparant de la plage. 

— On devrait rentrer, Emmy, lança Lyam doucement.

Elle tourna la tête vers lui.

— Rentrer où Lyam ? C'est ici chez moi ! Ici ! hurla-t-elle en se ruant sur lui. 

Il la bloqua dans ses bras et elle s'affaissa contre lui, en larmes.

— Qu'est-ce que je vais devenir ? Ma mère c'était mon pilier ! C'est pour elle que je travaillais, c'est pour elle que je vivais.

— Rien de ce que je pourrais dire n'apaisera votre peine, Emmy, mais je partage votre douleur.

— Si vous partagez ma douleur, arrêtez de me vouvoyer. Je ne fais pas partie de ce monde de riches, alors tutoyez-moi. 

— Seulement si tu me tutoies également. Je veux être ton égal. Avec toi, je suis moi-même, sans artifices. Viens, on va chez moi, Emmy. Je te promets que ma mère ne t'adressera pas la parole et...on s'occupera de l'enterrement de ta mère un peu plus tard. Je prendrai tout en charge et je te promets que ta mère aura un digne enterrement. Rentrons maintenant, ma puce.

Elle ne bougea pas et il passa un bras sur ses hanches pour l'entraîner vers la voiture. Elle se laissa faire comme un zombie. Elle n'avait plus que Lyam dans sa vie à présent. Il prit la route et se gara dans la propriété. Lyam fit le tour du véhicule, lui ouvrit la porte et lui prit la main pour gagner la chambre. 

— Je dois dire deux mots à mes parents mais fais comme chez toi, Emmy.

Elle hocha la tête et il quitta la pièce. Moins de deux minutes plus tard, des éclats de voix parvinrent jusqu'à la chambre. Emmy se leva du lit discrètement et colla son oreille à la porte pour écouter.

— Elle vient de perdre sa mère dans un incendie atroce... elle...elle a vu son corps carbonisé. Comment pouvez-vous être aussi inhumains et réussir à vous regarder dans une glace ? Sa mère a travaillé pour vous pendant des années en y laissant sa santé et vous n'avez pas la moindre émotion ! Dans tous les cas, Emmy vivra ici car elle n'a plus rien. 

— Je suis...désolée pour elle mais ce n'est pas un hôtel et je ne fais pas la charité ! Je veux bien revenir sur ma position pour ne pas la virer au vu du contexte, mais n'abusez pas trop, Lyam.






Les maux d'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant