Chapitre 14

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L'homme qui vient frapper à la porte de l'atelier Lilibellule est à peine plus vieux qu'Elise. En fait, au collège, ils ont déjà été dans la même classe, malgré leurs deux ans d'écart.

Elle lui ouvre avec son regard éteint, malgré un faible sourire étirant ses lèvres.

- Salut miss. Tiens, c'est pour toi.

Il lui donne le colis sur le pas de la porte, tout comme il a l'habitude de laisser les commandes qu'elle lui fait juste là, à gauche.

Il n'entre jamais. C'est la règle. Et d'ailleurs, s'il peut lui faire un carton d'échantillons comme il vient de le faire, c'est uniquement parce qu'elle est sûrement leur meilleure cliente.

Exactement tous ses tissus sont choisis dans l'entreprise du père d'Alex.

- Génial. Merci.

- Nouvelle collection ? demande-t-il sagement.

Elle secoue la tête.

- Pas encore. Projet personnel.

- Pas de soucis.

- Je te rendrais les échantillons demain.

Il hoche la tête.

- Pas de soucis, répète-t-il.

Ce qu'il vient de lui ammener, c'est les cartes de tissus que les fournisseurs leur envoient pour qu'ils choisissent ce qu'ils vont prendre. Et Elise vient habituellement choisir directement dans leur dépôt.

- À demain.

Il s'occupe de fermer la porte pendant qu'elle fait demi-tour, et lui sourit doucement.

Cette fille n'est pas amicale. Elle est presque antipathique, pour lui. Mais elle est loin d'être désagréable avec lui. Simplement... neutre. Indifférente. Fade. La seule chose capable de faire briller les yeux d'Elise d'après lui, ce ne sont que les tissus qu'il peut lui vendre.

Elise fait tout de suite de la place sur l'une des tables établis, et ouvre le carton en grand.

- C'est pour la collection de printemps ?

Elle secoue la tête en répondant à la couturière :

- Pour le concours.

- Oh...

- Je n'avais pas le temps de faire le tour du hangar. J'y retournerais pour la collection la semaine prochaine. Ou celle d'après. Je sais déjà à quoi ça va ressembler.

Elle leur donne les croquis qu'elle a dessiné sur feuilles volantes pour avoir la paix le temps de sortir les quarante carrés rouges ou bleus. Elle pince les lèvres, ennuyée, alors que les deux autres commentent les croquis à voix basse : elle ne peut pas pré-trier les couleurs, les autres pourraient être utiles.

Tant pis. Elle emmène tout chez elle.

- Vous avez dessiné le dessin à termocoller ? demande l'une d'elles  en montrant le croquis numéro deux.

- Oui, hier soir.

- Quelle efficacité ! sourit la seconde.

De Fil en AiguilleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant