Chapitre 35

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La vidéo ne dure que cinq minutes. Mais elles font fureur sur internet en moins de deux, et la journée d'Adrien et Marinette leur semble de plus en plus longue, sans qu'aucun papillon noir ne fasse son apparition.

Elise et Félix se sont disputés violemment le matin, et il ne répond à personne au téléphone.

Ce n'est pas l'inquiétude qui les ronge, c'est la terreur. Que faire si Félix se fait akumatiser ? Lui, l'ancien Chat Noir ?

Ne penser qu'à ça les fait culpabiliser, d'abord, avant qu'ils ne finissent par s'avouer que de toute façon, ils ne font que leur boulot.

Ce n'est pas ça qui les empêche de se ruer dehors, le sac sur l'épaule, et dans le cas de Marinette, oubliant un cahier ramassé par Alia derrière elle. Ils se retrouvent rapidement dehors tous les deux, froncent les sourcils sans même oser se sourire, et trouvent une ruelle où se transformer.

Il leur faut pourtant quinze minutes pour arriver sur le pas de la porte, essoufflés, et en tenue de civils.

Ils tambourinent à la porte, inquiets, et Félix se fait désirer quelques minutes avant d'ouvrir, les sourcils froncés.

- Mais qu'est ce qu'il se passe ?demande-t-il encore à moitié endormi.

Il est à peine habillé, et si son instinct de héro ne lui avait pas donné une idée des personnes derrière la porte, il aurait pris le temps de s'habiller en entier.

Adrien le saisit par les épaules, et Félix remarque pour la première fois que son frère fait presque la même taille que lui. Il a grandi.

- Tu vas bien ? Pas d'idées noires, ou de quoi que ce soit ?

Il secoue la tête, contrarié d'avoir été réveillé par des questions pareilles.

- Non, mais qu'est ce qui vous prend ?

- On a vu la vidéo, débite rapidement Marinette. Alors on a eu peur que quelque chose vous arrive, à l'un ou l'autre. Tu as des nouvelles d'Elise ? Elle ne s'est pas faite akumatisée ?

Il secoue la tête.

- Non. Elle va bien. Mais quelle vidéo ?

- Tu en es sûr ? demande Adrien qui ne l'a toujours pas lâché.

Félix se dégage doucement en hochant la tête.

- Certain.

- Mais la vidéo... commence le plus jeune.

Sa coéquipière synthétise :

- Une vidéo de vous en pleine dispute fait le tour d'internet en ce moment. Est-ce que tu es certain qu'elle va bien ?

Félix arque un sourcil, se demandant sérieusement pourquoi ils ne le croient pas, et semble en même temps satisfait d'avoir cette donnée supplémentaire.

- Attendez.

Il boutonne sa chemise tout en allant à la salle de bain. Il frappe deux fois et parle au travers de la porte.

- Tu ne t'es pas endormie, au moins.

- Laisse-moi tranquille... ça fait une éternité que je n'ai pas été aussi peinarde. Tu crois que je peux m'installer chez toi ?

Il secoue la tête immédiatement, tout en répondant calmement :

-Hors de question. Mais tu vas bien ?

- Oui, pourquoi ça n'irait pas ?

- Mon frère est du genre obstiné quand il s'y met, répond-il narquoisement.

Adrien le rejoint à grandes enjambées, livide.

- Elle est là ?

- Bien sûr qu'elle est là. Elle squatte la baignoire depuis deux heures, au moins. Au fait, dit-il en s'adressant à la porte, comment tu as fait pour que l'eau ne refroidisse pas ?

- J'en ai vidé la moitié, et remit de l'eau chaude.

- T'es pas sérieuse, se fâche-t-il soudain. C'est pas toi qui paye les factures !

- C'est pas toi non plus je te signale. Et puis je suis éco-responsable, je n'ai pas prit de bain depuis une éternité au moins, trois ans, en années humaines.

Félix serre la mâchoire, contrarié :

- Sors de l'eau.

- Alors qu'elle est encore chaude ? Viens m'en sortir !

Félix s'éclipse dans la cuisine, et revient avec un couteau à bout rond. Et tandis qu'il s'affaire tranquillement à dévisser la serrure pour entrer dans la salle de bain, Marinette s'approche de son petit ami pour murmurer :

- En fait, en y repensant bien, on ne les a jamais vus se disputer.

- Ouais...

- On ne se dispute pas, râle Félix en retirant la première vis. On s'explique.

Il réussit à faire sauter la poignée et la serrure, la fait tourner à la main, et entre dans la pièce chaude. Une vague de chaleur les fait reculer, et Félix ressort de la salle avec une Elise en colère sur l'épaule, enroulée dans une serviette de bain trempée et immense.

- Lâche-moi tout de suite, espèce de pervers !

- Y a rien à regarder, de toute façon, rétorque-t-il en allant la balancer sur le lit.

Il change rapidement de chemise, et sort de la chambre, avant d'aller vider la baignoire.

Elise est à peu près habillée quand elle sort de la pièce, furibonde, et le visage rouge écarlate de colère.

- Hey, Agreste, tu sais quoi ? Je vais démonter toutes les serrures de tout ton appart' et quand tu seras coincé dans une pièce parce que j'aurais aussi volé les poignées, tu pourras aller te faire voir !

Félix la fixe longuement et avec un air surpris.

- Ben ça alors. Là, tu as l'air tout à fait normal. On dirait même que tu es réellement vivante.

Elle va pour lui sauter presque littéralement dessus quand Adrien l'attrape par la taille au passage, la serrant le plus fort possible, mais glissant sur le sol avec ses chaussettes alors que la styliste est pieds nus.

- C'était mon bain !

- C'est ma baignoire, répond-il. Et je t'emmerde.

Marinette et Adrien restent assez cois pour se figer, et Elise en profite pour se dégager des bras de l'alter égo de Chat Noir, pour se ruer sur l'ancien.

- Tu m'énerves, Agreste !

- Je suis au courant. Lilibellule.

- Braaah !

Elle entre à grandes enjambées dans la cuisine, et se venge sur la bouteille de jus de pomme.

- Et mes invités ? lâche-t-il platement.

- J'en rachèterais, rumine-t-elle de mauvaise humeur.

Les cheveux lui gouttent encore le long du visage, et ses cernes laissent penser que son unique moment de repos était dans ce bain, dont Félix l'a allègrement extraite.

- Bon, tu me voulais quoi, en fait ? demande-t-elle une fois la bouteille presque vide.

Il sourit de toutes ses dents avant de répondre d'un air conspirateur :

- Ça a marché.

Elle ouvre de grands yeux avant de rire, joyeuse :

- Pour de vrai ?! Les gens sont tellement stupides. Montre-moi ça.

Félix ne met pas longtemps à trouver la vidéo sur son téléphone, et la visionne avec elle.

- Heu... vous pouvez nous donner une explication ? demande Adrien.

L'étudiant secoue la tête d'un air désabusé :

- Non, mais tu es sûr que tout va bien ?

De Fil en AiguilleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant