Chapitre 33

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La semaine d'Elise a beau être éprouvante, elle ne tenterait pas de rivaliser avec celle de Marinette et Adrien qui semblent au bout du rouleau lorsqu'ils débarquent chez Félix, alors qu'elle vient de se servir du jus de pomme.

Et si la jeune fille tente d'avoir l'air en forme, Adrien n'hésite même pas à trainer les pieds. Comme quoi, Chat Noir la nuit, Chat Noir le jour.

- On ne dérange pas ? demande-t-il en apercevant Elise dans la cuisine.

L'étudiant secoue la tête.

- Non, on ne travaille pas aujourd'hui. C'est jour de congé.

- Parle pour toi, je me suis couchée à dix heures, se plaint Elise en servant deux verres de plus.

Il serre la mâchoire, contrarié.

- Alors qu'est ce que tu fais ici, au juste ?

Elle fait glisser les verres sur le plan de travail, et répond avec un clin d'œil :

- Parce que je mange toujours de meilleures choses chez toi que chez moi. Et venir dans ton appartement impeccable me donne l'impression de passer dans une chambre d'hôtel. Mais gratuitement. Mais je ne serais pas venue si je ne t'avais pas vu acheter ce super bon jus de pomme. Je prendrais cette marque là, la prochaine fois.

Plagg éclate de rire sous cape, et Adrien doit l'aplatir d'un coup sur la poche de sa chemise pour le faire taire.

Elise regarde autour d'elle en cherchant l'origine du bruit quand Félix résout le problème une bonne fois pour toute :

- C'est la tuyauterie de l'étage au dessus. Ça a fait ce bruit toute la nuit.

Elle vide son verre d'une traite.

- Mon pauvre. Bon, je rentre chez moi pour dormir, comme ça, vous serez tranquilles. Et ma foi, je mangerais exceptionnellement des nouilles instantanées, dit-elle en prenant sa veste.

- Je ne suis pas une cantine.

- Je ne te paye pas, tu es plutôt un buffet gratuit. A bientôt, les jeunes !

Elle claque la porte avant-même qu'il ait le temps de se plaindre, et Tikki sort du sac de sa porteuse :

- Eh bien ! Elle est en forme, aujourd'hui !

Félix hoche la tête en rangeant le verre qu'elle a laissé traîner.

- Elle vient de lancer un projet de fidélité pour sa boite, et près de deux-cent-cinquante clientes se sont fidélisées en moins de trois jours.

- C'est vrai que c'est une bonne nouvelle, sourit Marinette en s'asseyant.

Adrien laisse son kwami sortir à son tour, alors qu'il somnole déjà sur sa chaise.

- Et elle leur offre quoi en plus ? Un fromage ?

Félix hausse les épaules.

- Tu m'en demande trop. Mais ça inclut des réductions sur certains articles classiques et un cadeau d'anniversaire.

- Pff. Les humains n'ont aucun goût ! se plaint la créature noire en croisant les bras.

L'ancien héro sort du fromage et des macarons sans dire un mot, et s'assoit face à eux.

- Je crois que c'est ma première journée de repos depuis longtemps, soupire-t-il.

- Tu n'étais pas aussi feignant, avant ! se moque Plagg en engloutissant son met.

La petite boule rouge le réprimande aussitôt :

- Tu ne devrais pas être comme ça ! On est toujours bien reçu, ici. Félix n'est pas obligé de te servir à manger quand tu viens, tu mange déjà bien assez comme ça. Tu ne crois pas que tu pourrais au moins être aimable avec lui ?

- Hmpf ! déclare-t-il en guise de réponse, la bouche pleine.

Le regard insistant d'Adrien et Marinette, laquelle s'est découvert un pouvoir de persuasion hors norme sur le petit être, lui fait finalement lâcher un « désolé » boudeur.

- Au fait, pourquoi Elise était là, si vous ne travaillez pas aujourd'hui ? demande Adrien avec un sourire en coin.

Félix le déstabilise en lui souriant ironiquement :

- Tu n'as pas à le savoir, et même si tu le devais, je ne te le dirais pas.

Il se redresse pour dire un peu plus sérieusement :

- Tout le monde a ses petits secrets.

La soirée se déroule comme les autres, suite à ça, et bien que Félix se détende de plus en plus face à ce qu'il considère comme les détails de ce qu'il lui reste à accomplir en tâche pour le concours, les auditions étant bien plus proches de lui que la fin de la semaine, il n'hésite pas à se laisser aller en profitant pleinement de la compagnie de ceux qu'il considère comme sa famille, Adrien mis à part, bien entendu.

- Tu fais des miracles, maintenant, avec une machine, souffle doucement Marinette d'admiration.

Elle a dans les mains leur dernière tenue en date, qu'Adrien et lui vont déposer le soir même chez leur père.

Il rit faiblement :

- Je ne fais pas les petites finitions, je n'arrive pas encore à faire des coutures aussi fines que les siennes.

Elle secoue la tête.

- Ne dis pas ça. Personne ne peut faire un travail comme elle, c'est presque surnaturel de faire ça comme ça. Pour un peu, à force de ne pas voir les coutures, on se demande presque si elles existent. Je ne sais pas faire une chose pareille, et je manie la machine depuis plus longtemps que toi. Je ne dis pas que tu n'arriverais pas à te rapprocher du résultat, mais...

Il sourit.

- Tu connais Lilibellule ?

- Oui ?

Il reprend la robe et lui répond :

- Elise travaille pour. Elle veut appliquer à notre collection deux des paramètres obligatoires de la marque. Tu les reconnais ?

Marinette pince les lèvres pour y réfléchir. Mais elle finit par secouer la tête, laissant échapper :

- Je n'en connais qu'un : que tout le monde puisse porter le même vêtement. Et je vois bien qu'il peut s'appliquer là, même si le champ du « tout le monde » est réduit au mannequinat. C'est quoi le deuxième ?

- Quoi que tu porte, ça ne doit jamais t'empêcher de faire ta vie. En gros, dit Adrien en attrapant un pant du tissu.

Sa petite amie le dévisage, et il hausse les épaules.

- Quoi ? Je suis aussi mannequin, je te signale.

Il explique ensuite :

- J'ai déjà rencontré des filles qui en parlaient. Elles disaient que mettre du Lilibellule leur permettait d'être belles pendant les dures journées. Je comprends mieux ce qu'elles voulaient dire. La tenue est adaptée pour un défilé, même si le tissu semble épais, il respire bien. On ne doit pas mourir de chaud, là-dedans.

Félix hoche lentement la tête.

Oui. C'était ce qu'elle avait mis en avant, pour ce modèle qui demandait de superposer une grande quantité de tissus.

Une heure plus tard, les deux adolescents rentrent chez eux. Et deux jours plus tard, ils cliquaient avec horreur sur une vidéo en ligne, dont le titre, en expliquant très bien le contenu disait : « Il en faut peu pour se faire épingler par son binôme ! ».

De Fil en AiguilleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant