Chapitre 49.

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22 juin 1976, Château Lestrange, Oxfordshire.


- Maître ?

Voldemort ouvrit lentement les yeux. Rabastan se tenait dans l'entrebâillure de la porte, l'air préoccupé. Le mage noir lui fit signe d'entrer, et Lestrange s'approcha doucement du lit où reposait Bellatrix. Il prit délicatement la main de la sorcière, la soulevant comme si elle était la chose la plus fragile au monde.

- Toujours rien ?

Voldemort secoua la tête, et soupira. Bellatrix n'avait toujours pas ouvert les yeux. La seule chose qui indiquait qu'elle était encore en vie était son faible poul, et sa respiration presque imperceptible. Voldemort n'avait pas quitté son chevet une seule seconde. Il n'osait pas la laisser seule, même s'il savait qu'il pouvait compter sur Rabastan, Victoria et Mérida pour prendre soin d'elle.

Il leur avait expliqué qu'elle avait été touchée par un maléfice, et qu'elle avait besoin de repos.

Mais en vérité, il ne savait pas si elle allait se réveiller un jour.

Alors, chaque matin, il utilisait ses pouvoirs pour la nettoyer, remplir son estomac et l'hydrater. Combien de temps allait-il devoir l'assister ? L'avait-il condamnée à n'être qu'un corps, à jamais entre la vie et la mort, la conscience et l'inconscience ?

- Les autres se posent des questions, Maître, murmura Rabastan. Ils ont remarqué l'absence de Bellatrix au mariage de Lucy et Thorfinn Rowle. Narcissa a demandé de ses nouvelles.
- Que lui as-tu répondu ?
- Que Bellatrix ne se sentait pas très bien, et qu'elle avait besoin de repos, mon Seigneur. Mais Ciss...Narcissa n'a pas compris pourquoi sa sœur ne lui avait pas écrit. Comme vous savez, elles échangent beaucoup de lettres. Peut-être que nous devrions expliquer à...
- Non.

Voldemort passa une main froide sur son visage. Bientôt, tous les Black allaient lui demander des comptes. S'ils apprenaient qu'il avait détruit leur enfant prodige, cela allait créer des problèmes dont le Seigneur des Ténèbres n'avait absolument pas besoin en ce moment. Et pour couronner le tout, Dumbledore avait profité de la semaine de « calme » due à l'absence de Bellatrix pour renforcer son pouvoir : une interview lui avait été accordé par Sorcière Hebdo, et il avait clairement désigné Voldemort comme l'ennemi public, faisant appel à la population pour lutter contre ce qu'il présentait comme « les Forces du Mal ». Il fallait se débarasser du vieillard au plus vite. Voldemort ne pouvait pas attendre indéfiniment que son meilleur soldat revienne à la vie.

Mais d'ici là, il pouvait peut-être régler d'autres problèmes moins important. Il avait compté sur Bellatrix pour recruter le jeune Sirius Black, qui prenait un malin plaisir à narguer sa famille en se mélangant aux sangs de bourbe et autres immondes créatures, mais il allait devoir se trouver un autre agent. Narcissa, bien qu'il la considère comme une alliée, ne lui semblait pas assez déterminée pour réussir à convaincre son cousin. Andromeda lui vouait une haine profonde et, de toute façon, avait disparu de la circulation depuis maintenant six mois. Cygnus et Druella n'étaient pas particulièrement proches de leur neveu, et Orion et Walburga avaient très visiblement failli à leur rôle de parents.

Voldemort ne voyait plus qu'un seul membre de la famille Black qui pouvait éventuellement rejoindre son camp et convaincre Sirius d'en faire autant.

- Quel âge a le plus jeune fils d'Orion ?
- Hum... une quinzaine d'année, mon Seigneur, répondit Rabastan d'un ton hésitant. Il me semble qu'il entrera en cinquième année à la rentrée prochaine.
- Que savons-nous de lui ?
- Et bien... il est à Serpentard... c'est un très bon joueur de Quidditch, d'après les dires de son père. Il est l'unique héritier mâle de la maison Black, son frère ayant été déshérité. Regulus est un bon garçon, bon élève, bien élevé... parfaitement lisse, si vous voulez mon avis.
- Que pense-t-il de notre mouvement ?
- Je...je n'ai jamais vraiment eu l'occasion d'en discuter avec lui, mon Seigneur. Mais je sais qu'il partage nos valeurs, comme tout le reste de la famille Black. Enfin... si l'on oublie le frère.
- Hmm...

Regulus Black était peut-être le maillon manquant. Celui qu'il lui fallait. Qui sait, peut-être deviendra-t-il un jour ce que fut Rodolphus ? S'il avait les mêmes prédispositions à la magie noire que sa cousine, nul doute qu'il serait d'une grande utilité pour le Seigneur des Ténèbres.

- Envoie une lettre à Orion, commanda le mage noir. Dis-lui que son fils est cordialement invité à rencontrer le Seigneur des Ténèbres.


****


Le garçon était visiblement mal à l'aise face au Seigneur des Ténèbres. Assis au bord de son fauteuil, comme s'il s'apprêtait à bondir sur ses pieds et s'enfuir en courant, l'une de ses jambes tressautait nerveusement. Ses yeux étaient fuyants.

Voldemort ne lui avait jamais vraiment prêté attention. Il l'avait sûrement croisé lors d'événements mondains, mais il n'avait jamais vraiment eu de raison de l'observer.
Regulus était beau garçon, comme son père avant lui ; et comme tout le reste de la famille Black. Sans surprise, il partageait les caractéristiques physiques de Bellatrix : une peau pâle, des traits fins, une mâchoire anguleuse et des boucles brunes et brillantes. Son visage était encore juvénile, emprunt d'innocence, et son regard pourtant traduisaient une grande sagesse. Peut-être était-ce du au fait qu'il ait dû assumer le rôle du parfait héritier que son frère ainé avait refusé.

- Regulus... fit Voldemort d'une voix douce. C'est un véritable plaisir d'enfin de rencontrer véritablement. Nos amis ne cessent de chanter tes louanges... tu es un brillant élève, ai-je entendu... un admirable joueur de Quidditch... quel poste occupes-tu ?
- Attrapeur, mon Seigneur, répondit le jeune sorcier d'un ton incertain.
- Attrapeur, hmm ? J'en déduis que la maison Serpentard compte sur toi pour remporter les matchs.
- Je n'ai pas la prétention d'affirmer que nos victoires ne sont dues qu'à mes seules actions, mon Seigneur. Nous sommes une équipe, chaque poste est important.
- Tu as tout à fait raison, jeune homme. Il est important de reconnaître la valeur de chacun des membres d'une équipe. Chaque poste est essentiel, de celui qui guide l'action à celui qui agit dans l'ombre.

Regulus acquiesça, ne sachant que répondre.

- C'est pour cela que, lorsqu'un des postes est déserté, c'est toute l'entreprise qui tombe à l'eau, expliqua calmement le Seigneur des Ténèbres, appuyant son regard sur le garçon. Vois-tu, la construction de quelque chose de...grand...ne peut se faire si l'un des rouages vient à manquer, où s'il ne marche pas correctement. Comprends-tu ce que je dis ?
- Il me semble, mon Seigneur.
- Ta famille compte parmi mes soutiens les plus importants. Mais tu sais cela, n'est-ce pas ?
- Oui, mon Seigneur.
- Tu sais aussi que ta cousine, Bellatrix, m'est d'une aide précieuse, et qu'elle tient un rôle primordial dans la construction du nouveau monde ?
- C'est ce qu'on dit, mon Seigneur, murmura Regulus, le regard sombre.
- Que penses-tu de son implication dans notre mouvement ?

Regulus baissa immédiatement le regard, les sourcils froncés.

- C'est un honneur incommensurable que d'avoir un membre de notre noble famille à vos ordres, mon Seigneur. Nous sommes fiers de Bellatrix. Nous savons qu'elle œuvre pour le plus grand bien.
- Vous avez de quoi être fier, répondit Voldemort avec un léger sourire. Bella a fait un travail remarquable ces dernières années. Mais vous avez tous, à votre manière, fait honneur à votre nom en me soutenant publiquement.

Regulus déglutit. Voldemort marqua une pause, avant de dire à voix haute ce que le garçon pensait.

- Presque tous.
- Le comportement de mon frère est inexcusable, mon Seigneur, bredouilla Regulus. Il a été puni à hauteur de ses méfaits. Notre mère... notre mère a effacé son nom de l'arbre généalogique. Père a... il lui a interdit de poser à nouveau les pieds au Square Grimmault. Sirius n'est plus le bienvenu.
- Quel gâchis... un sang aussi pur... si seulement quelqu'un pouvait lui faire entendre raison, dit Voldemort d'une voix douce. Je suis sûr qu'Orion et Walburga seraient prêts à l'accueillir à nouveau si ton frère s'en montrait digne... peut-être que, s'il nous rejoignait, tes parents accepteraient de le laisser revenir.
- Sirius ne reviendra jamais de son plein gré, marmonna Regulus. Il pense que...

Le garçon n'osa pas continuer sa phrase. Il prit sa tête entre ses mains, les yeux clos, et soupira profondément.

- Tu peux tout me dire, jeune Regulus. Nul mal ne te sera fait, ni à toi, ni à ton frère. Sirius est jeune, et fait des erreurs comme tous les jeunes gens. Je trouve inutile de le punir au-delà de ce qu'il a déjà subi. À vrai dire, je pense que ton frère mérite qu'on lui vienne en aide.
- Il pense que le respect de la pureté du sang est une idiotie, qu'il n'y aucune différence entre nous et les sangs de bourbe, explosa soudain Regulus qui s'était redressé d'un coup. Il traine avec ses amis de Gryffondor qui lui mettent ces drôles d'idées dans la tête, et renie tous les principes qui nous ont été inculqués. Il est arrogant, buté et refuse tout contact avec notre communauté. C'est un véritable fardeau de l'avoir pour frère, et le voir se pavaner dans les couloirs, portant les couleurs de sa maison aux côtés de sa sang de bourbe d'amie me donne la nausée. Pas un jour sans que je ne puisse oublier que mon nom de famille est souillé par ses actions.

Voldemort haussa les sourcils. Il ne s'était pas attendu à cela. Il ne s'était pas attendu à un Regulus plein de colère et de rancœur.

- Allons, allons, ne sois pas si dur envers ton frère, murmura le mage noir. Tout le monde ne peut pas être aussi sage que toi, Regulus.

Face à lui, l'héritier Black fulminait. Son visage avait viré au rouge carmin, son souffle était furieux.

- Tout n'est pas perdu, continua Voldemort d'un ton plus ferme. Regulus, il reste encore une chance de redorer l'image de ta famille.

Le sorcier leva les yeux, intrigué, vers le Seigneur des Ténèbres.

- Tu es encore très jeune, mais je décèle chez toi une grande force, annonça Voldemort. Regulus Black, je te propose de devenir le plus jeune mangemort à être jamais entré dans mes rangs. C'est un immense honneur, un honneur que je n'accorde qu'à ceux que je juge dignes d'occuper une telle place. Tu feras partie d'un groupe de sorciers extrêmement puissants, d'un cercle restreint et hautement prisé. Tu seras protégé par tes pairs, et ta place au sommet de la hiérarchie sociale sera assurée à jamais.

L'expression de Regulus se fit alors indéchiffrable, à mi-chemin entre l'effroi et la fierté absolue.

- Je... mon Seigneur... c'est trop d'honneur...
- Non...non, Regulus, c'est exactement ce que tu mérites, répondit doucement Voldemort.
- Que...que dois-je faire pour vous ? demanda le garçon.

Voldemort se laissa tomber sur le dossier de son fauteuil, et un sourire malicieux se dessina sur ses lèvres tandis qu'il observait en silence la réaction de son futur disciple.

- Tu vas ramener Sirius Black parmi les siens, et tu vas t'assurer qu'il plaide allégeance au Seigneur des Ténèbres.

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