Chapitre 53.

473 22 35
                                    


18 septembre 1976, Manoir Malefoy, Wiltshire.


- ...avons trouvé ce groupe de loups garous qui acceptent de collaborer avec nous, mon Seigneur, expliqua Macnair. Il est principalement composé de racailles qui sèment le chaos dans des villes moldues aussi bien que nos villages. L'un d'eux est connu pour avoir transformé une bonne dizaine de sorciers...
- Fenrir Greyback, précisa Rowle. Une sale bestiole, mais qui est très intéressée par la perspective de travailler avec nous.

Les deux mangemorts échangèrent un regard avant de s'adresser à nouveau à leur Maître.

- Greyback demande s'il y aura quelconque rétribution en échange de ses services, finit par grommeler Macnair.

Voldemort haussa un sourcil et inclina légèrement la tête.

- Le chien veut être payé pour servir le Seigneur des Ténèbres ?

Les deux sorciers devant lui blêmirent, embarrassés de devoir répondre à une telle question, mais Macnair finit par répondre.

- Ces créatures vivent dans la misère absolue, et subsistent en volant les biens d'autrui. S'il faut leur donner un gallion ou deux comme récompense, nous serions prêt à les payer avec notre propre argent, Maître.

Voldemort réfuta sa proposition d'un geste las de la main.

- Nous avons des fonds largement assez suffisant pour satisfaire Greyback et ses amis, dit-il d'une voix froide. Si c'est de l'or qu'ils veulent, donnez-leur, mais ne puisez pas dans vos propres fonds, cela est inutile...

Le mage noir réfléchit un instant avant de répondre.

- Greyback, est-il fiable ?
- Ils servent tous le parti le plus offrant, mon Seigneur, répondit Rowle. Tant qu'ils auront leur argent, ils seront à vos ordres.
- Hmm... informez-les que leur loyauté sera hautement récompensée, dans ce cas. Le plus rapidement possible. Je les veux sur le terrain, prêts à l'attaque, dans la semaine. Je veux que mes opposants sachent que les loups garous sont de notre côté.
- Bien, mon Seigneur, répondirent les deux hommes d'une seule voix.

Tout à coup, on toqua à la porte. Voldemort leva la main devant lui, et la porte s'ouvrit, dévoilant Narcissa Malefoy qui, comme toujours, se tenait droite comme un pique.

- Narcissa... entre, je t'en prie, dit Voldemort d'une voix douce. Macnair, Rowle, vous pouvez disposer. Je veux un retour sur la situation dans les jours à venir.
- Bien, Maître.

Les deux hommes saluèrent Madame Malefoy et sortirent tandis que cette dernière prenait place sur l'un des deux sièges placés devant le bureau derrière lequel était assis Lord Voldemort.

- Des nouvelles de nos amis français ? demanda le mage noir.
- Oui, mon Seigneur, répondit Narcissa. Ma grand-mère a envoyé une lettre, qui vous est directement adressée. Je ne l'ai pas ouverte, naturellement.

À ces mots, elle lui tendit une enveloppe scellée par un sceaux pourpre représentant deux roses entrelacées. Voldemort l'ouvrit délicatement et en sortit une lettre qu'il lut aussitôt.

Monsieur,

Comme ma chère petite-fille me l'a demandé, je vous apporte des nouvelles de Paris. Cela fait plusieurs mois que mes proches et moi guettons la venue de votre ami. Nous n'avions aucun signe de lui jusqu'à très récemment, lorsque la rumeur selon laquelle il louait une chambre dans un hôtel miteux à Montmartre s'est répandue pour arriver jusque dans notre cercle restreint.

Ayant entendu cela, j'ai informé des cousins qui habitent le quartier d'ouvrir l'œil. Sans grande surprise, votre ami a été aperçu à plusieurs reprises au Bon Bock, 2 rue Dancourt. C'est un habitué, puisqu'il fréquentait déjà les lieux vers la fin des années 1890 avec mon très cher Gellert, lorsqu'ils étaient enfants.

À l'heure où je vous écris, il n'a pas encore quitté la capitale. Nul ne connaît la raison de sa venue, mais nous savons ce qui se passe actuellement en Grande-Bretagne. Nous vous affirmons par ailleurs notre soutien inconditionnel, et espérons que vous saurez réussir là où le reste de l'Europe a échoué.

Madame Vinda Rosier.


Le Seigneur des Ténèbres replia soigneusement la lettre avant de lever les yeux vers Narcissa, qui était restée silencieuse tout du long.

- Envoie une lettre à ta sœur, dit-il. Dis-lui que nous partons pour Paris, et qu'elle doit être ici dans une demie heure avec une valise pour une semaine.
- Bien, mon Seigneur, répondit précipitamment Narcissa en se levant.
- Et dis à Lucius de prévenir les autres de mon absence, ajouta Voldemort au moment où elle s'apprêtait à franchir la porte.

Narcissa acquiesça d'un air décidé, et disparut.


****


- Maître.

Bellatrix fit un mouvement de baguette et sa valise qui flottait derrière elle se posa sur le sol de marbre brun du manoir. Voldemort s'approcha d'elle, sa propre valise enchantée à la main.

- Tu vas devoir la porter si tu ne veux pas que les moldus t'enferment dans un de leurs laboratoires, lui dit-il avec un sourire moqueur.
- Oh, fit la sorcière en s'empressant de prendre sa valise par la poignée. Oui, oui, bien sûr.
- Le portoloin nous attend, indiqua le mage noir. Il faut changer nos apparences avant de poser les pieds à Paris. Nous devons prendre soin de ne pas être reconnus. À toi l'honneur, Lestrange.

La mangemort observa un instant le visage de son Maître. Elle regrettait devoir le modifier, car elle aimait tant ses traits. Elle aimait sa mâchoire anguleuse, son nez droit, ses joues creuses, la cicatrice qui barrait son visage, ses lèvres fines et ses cheveux grisonnant toujours parfaitement plaqués en arrière.
À contrecœur, elle leva sa baguette et changea chacun de ses détails. Quelques secondes plus tard, Voldemort avait des cheveux entièrement blancs, des yeux bleus, un nez crochu et des lèvres pleines. Il restait beau, mais Bellatrix fit tout de même une moue déçue.

- Je ne resterai pas comme ça tout le temps, la rassura Voldemort avant de lever vers elle sa propre baguette.

Il transforma Bellatrix en une superbe rouquine aux cheveux lisses coupés en carré, aux yeux bleus et à la peau maculée d'adorables taches de rousseur. La mangemort nota également que sa poitrine était plus généreuse, et qu'elle avait pris quelques centimètres de hauteur. Elle leva un sourcil accusateur vers son Maître, qui rit doucement.

- Non, Bella, je ne t'ai pas rendu plus belle que tu ne l'étais déjà. Peut-on y aller, maintenant ?

Bellatrix rougit sous les compliments, et hocha la tête, puis suivit son Maître jusque dans le jardin. Là, sur un socle de pierre, était disposé un vase en jade. Quand il commença à s'agiter, les deux se hâtèrent de le saisir, et, quelques secondes plus tard, étaient projetés dans les airs.


****


Montmartre, Paris, France.


Bellatrix plaqua sa main contre sa bouche et réprima de justesse une violente nausée. Elle haïssait les voyages en portoloin. Voldemort, lui, avait déjà commencé à marcher vers la rue principale. Ils avaient atterri dans une impasse où s'entassaient des poubelles malodorantes, ce qui n'arrangeait rien à l'état de Bellatrix qui courut rejoindre son Maître.

Autour d'eux, les moldus se pressaient. Pourquoi marchaient-ils aussi vite ? Ils ne regardaient même pas où ils allaient et, oh, quelle était cette chose immonde qu'ils fumaient ? Bellatrix fronça le nez et regarda les passants avec dégoût. Ces créatures étaient absolument répugnantes. Mais la sorcière ne fit aucune remarque, et suivit docilement le mage noir qui finit par s'arrêter devant une auberge, à l'angle de la rue Dancourt et du boulevard Rochechouart.

Les deux entrèrent, faisant sonner le carillon accroché au-dessus de la porte sur leur passage, et Voldemort se dirigea vers l'accueil où une femme bien en chair était postée. Bellatrix regarda autour d'elle. Le mobilier en bois était ancien, mais plutôt plaisant. Le sol, en revanche, était tapissé d'une épaisse moquette rouge et usée.

- Une suite pour deux personnes, dit Voldemort dans un français presque parfait. Pour une semaine.

La femme prit un stylo et griffonna sur un bloc-notes avant de relever la tête et de sourire poliment au mage noir.

- Un lit en plus pour votre fille, je suppose ?

Bellatrix sentit Voldemort se tendre à côté d'elle. Mais, à son grand soulagement, il se détendit presque immédiatement et adressa un sourire froid à l'hôtesse d'accueil.

- Un lit double suffira pour mon épouse et moi, répondit-il d'une voix douce, presque menaçante.

La femme écarquilla les yeux et ses joues prirent une couleur carmin, et elle s'empressa de balbutier des excuses, ce qui fit rire Bellatrix.

- Et...euh... la... la formule déjeuner, pour 8 francs de plus par nuit ? proposa la femme.
- Oui, oui, répondit Voldemort d'un ton agacé.
- Euh, alors, pour les suites, expliqua la femme, nous avons la suite basique, avec chambre et salle de bain, la suite de...
- Nous prenons la meilleure, coupa Voldemort.
- Oh... bien sûr, la femme écrivit à nouveau dans son carnet. La suite Van Gogh, ce sera. Deuxième étage, sur votre gauche, numéro 15. Cela fera un total de 500 francs, monsieur.

Le sorcier tendit à l'hôtesse un billet de 500, ce qui fit sourire Bellatrix qui se doutait bien qu'il ne s'agissait là que d'une feuille d'arbre métamorphosée. Puis, les deux prirent le chemin de leur suite.


****


- Le restaurant que fréquente Dumbledore est à deux pas d'ici, dit Voldemort en arrangeant ses affaires dans la penderie de leur nouvelle chambre. Il faudra rester prudent.
- Comment devra-t-on l'approcher ? Doit-on attaquer directement ?
- Non. Non, cela serait trop risqué. Bien que je méprise ce sorcier de tout mon être, je ne suis pas assez sot pour ignorer ses dons en matière de duel. Dumbledore pourrait aisément nous battre tous les deux. Il faudra faire preuve de ruse, et le prendre par surprise.
- Il faudra s'approcher de lui, devina Bellatrix.
- Exact, confirma Voldemort. Il faudra s'approcher de lui. Nous devons être certain de choisir le moment opportun pour attaquer.
- Lorsqu'il ne s'y attendra pas.
- Lorsqu'il croira être en sécurité.

Bellatrix acquiesça.

- Et s'il est accompagné ? dit-elle.
- C'est ce que nous allons vérifier, répondit le mage noir. Ce soir, nous irons au « Bon Bock », voir si notre cher Albus y est. Là, nous pourrons déterminer s'il est venu seul ou avec d'autres sorciers. Nous pourrons évaluer les risques, et, a fortiori, préparer un plan d'attaque.

Un sourire machiavélique se dessina sur les lèvres de Bellatrix, qui avait retrouvé son apparence initiale en même temps que Voldemort, lorsqu'ils étaient arrivés dans la suite. Il y avait peu de choses qu'elle aimait plus que le meurtre, et son Maître ne le savait que trop bien. Et il savait aussi que de telles perspectives avaient le don de la rendre d'humeur...joueuse. Et il comptait bien en profiter. Mais d'abord...

- Je crois savoir que les Français ont parmi les meilleurs vins du monde. Il serait regrettable de ne pas en profiter, dit-il avec un sourire charmeur, dévorant du regard la jeune sorcière en face de lui.
- Je suis entièrement d'accord avec vous, mon Seigneur, répondit Bellatrix en lui adressant un regard complice.


****


Il était deux heures de l'après-midi, et Lord Voldemort et son plus loyal lieutenant étaient souls.

- Je n'ai jamais trompé mon compagnon, dit le mage noir sans retenir un sourire moqueur.

Bellatrix le regarda d'un air outré avant de porter son verre de vin à ses lèvres et de prendre une gorgée. Pourquoi avait-elle proposé ce jeu ? Il la connaissait par cœur, et elle avait ingéré une trop grande quantité d'alcool comparé à lui.

- C'était injuste, Maître, grommela-t-elle en essuyant la goutte qui perlait à ses lèvres. Mais d'accord. Très bien. Hum... je n'ai jamais eu de relation sexuelle avec plus d'un partenaire.

Voldemort but une gorgée. Bellatrix écarquilla les yeux.

- Combien ? demanda-t-elle.
- Ce n'est pas à ton tour de poser une question.

Bellatrix haussa les sourcils et croisa ses bras contre sa poitrine.

- Cinq.
- Cinq ?!
- Je n'ai jamais été attiré par une personne du même sexe que moi, répondit simplement Voldemort.
- Mais ? Oh, par Merlin...

Bellatrix prit une énième gorgée.

- Je n'ai jamais infligé de blessures à mon partenaire pendant l'acte.

Ce fut au tour de Voldemort de reprendre une gorgée. Bellatrix explosa de rire.

- Je n'ai jamais été attiré par un membre de famille.

La mangemort fronça les sourcils, et réfléchit. Voldemort secoua la tête et se retint de rire. Les Sangs Purs...

- Non. Jamais, assura Bellatrix après de longues secondes de réflexion. Dolph n'était pas mon cousin, de ce que je sache. À moi.

Elle regarda longuement son Maître dans les yeux, comme si elle hésitait. Voldemort resta impassible, dans l'attente de sa prochaine déclaration.

- Je n'ai jamais aimé la femme d'un autre.

Silence.

Voldemort resta figé, incapable de la moindre réaction. Est-ce qu'elle venait vraiment de prendre ce chemin là ? Avait-elle réellement le culot d'avancer une telle chose ?

Et...

L'avait-il un jour aimée ?

Il se remémora alors le premier jour où il avait posé les yeux sur elle. Bellatrix n'avait été âgée que de seize ans alors. C'était lors du bal de Noël, organisé chez les Yaxley. Elle avait été somptueuse dans sa robe noire. Même sans de douter qu'elle allait devenir sa plus puissante mangemort, Voldemort l'avait trouvé fort jolie, sans pour autant la trouver réellement attirante. Elle n'avait été qu'une enfant.
Puis, il l'avait prise sous son aile. Il lui avait évité une peine de prison, et elle était entrée sous ses ordres. Elle avait fêté ses dix-sept ans, l'âge de la majorité chez les sorciers. Voldemort l'avait vue grandir sous ses yeux, il l'avait vue devenir femme. Plus encore, il avait fait d'elle une femme.
Il connaissait son corps aussi bien que son esprit. Il connaissait ses goûts, ses manies, ses qualités et ses défauts. Il savait qu'elle détestait les fruits de mer, mais qu'elle adorait la viande bien saignante. Elle préférait le thé à la rose plutôt que le thé à la menthe, et se douchait le matin plutôt que le soir. La nuit, elle tressait systématiquement ses cheveux afin de ne pas se réveiller avec une crinière indomptable, mais râlait à chaque fin de journée parce que sa chevelure finissait toujours par être décoiffée. Elle était aussi gracieuse sur une piste de danse que sur un champ de bataille, mais était bien incapable de maîtriser l'art de la conversation comme une véritable lady, pour la simple et bonne raison qu'elle se fichait éperdument de savoir ce qu'avaient fait ses interlocuteurs de leurs vacances. À vrai dire, il y avait peu de choses ou de personnes auxquelles tenait Bellatrix Lestrange, mais lorsqu'elle aimait, elle aimait profondément. Et, de ce côté, Lord Voldemort la rejoignait.

Il y avait pas ou peu de choses auxquelles tenait le Seigneur des Ténèbres.

Mais Bellatrix était l'une d'entre elle. Et la preuve de cela était autour de son annulaire droit. Une bague délicate, aux couleurs de Serpentard, offerte par Voldemort il y a des années, et transformée récemment en horcruxe.

Voldemort avait offert la vie éternelle à sa servante, pour la simple et bonne raison qu'il l'aimait.




Voldemort prit une gorgée de vin.

All the wrong choices Où les histoires vivent. Découvrez maintenant