Chapitre 54

413 21 11
                                    


Le jeu avait pris fin. Voldemort s'était éclipsé depuis trois heures déjà, laissant Bellatrix bouche-bée et incertaine de la façon dont il fallait désormais se comporter avec son Maître. Que lui avait-il pris de poser une telle question ? Qu'allait-elle faire maintenant qu'elle connaissait la réponse ?

L'amour de son Maître, c'était tout ce dont elle avait toujours rêvé. Mais jamais elle n'aurait pensé que ses vœux seraient exhaussés. Lord Voldemort n'aimait que lui, il l'avait toujours montré. Les échanges langoureux entre Maître et servante n'étaient rien de plus que cela, ou du moins c'est ce qu'avait toujours pensé Bellatrix.

Il l'aimait.

Et, Merlin savait à quel point, Bellatrix aimait le Seigneur des Ténèbres en retour.

Le corps de Rodolphus était encore presque intact dans sa tombe, et sa veuve songeait déjà aux attentions de leur Maître. « C'est ce qu'il aurait voulu » tenta de se rassurer Bellatrix. « Que tu sois heureuse avec le sorcier que tu aimes ». « Il ne t'en tiendrait pas rigueur ».

Bellatrix jeta un coup d'œil en direction de la chambre à coucher dont la porte était fermé. Voldemort s'y était enfermé. Le silence baignait la pièce. La mangemort soupira. Elle l'avait fait se sentir vulnérable. À cause d'elle, il avait avoué une faiblesse qu'il aurait très certainement préféré dissimuler.
Mais après, était-ce réellement une mauvaise chose ? La présence de Bellatrix avait toujours bénéficié au mage noir. Elle l'avait toujours rendu plus fort. Lorsqu'ils habitaient ensemble, quand elle était encore assignée en résidence surveillée, il avait semblé apprécier sa compagnie. Plus encore, il en avait très largement profité. Elle avait été son élève, son amante, sa protégée et son soldat. Maintenant, elle était son meilleur lieutenant, son bras droit, et elle savait qu'il l'aimait. Cela lui semblait surréaliste, mais c'était la vérité.

Et puis...

N'étaient-ils pas voué à passer le restant de leurs jours ensemble ? Voldemort lui avait fait faire un horcruxe. Bellatrix ne pouvait pas mourir, pas tant que son âme était à l'abris.

La sorcière se remémora alors de la cérémonie de mariage avec Rodolphus.

« Que leur union soit éternelle et inviolable, que la magie les accompagne jusqu'à leur dernier souffle »

Rodolphus Lestrange avait rendu son dernier souffle. Même si Bellatrix serait toujours liée à lui, leur union n'était plus réellement effective. Leur union n'avait été ni éternelle...ni inviolée.

Mais avec Lord Voldemort...

Oh, avec Lord Voldemort, leur union serait grandiose. Bellatrix lui serait fidèle, et la mort ne pourrait jamais les arracher l'un à l'autre.

Mais le Seigneur des Ténèbres ne la prendrait jamais pour épouse... n'est-ce pas ?

- Bellatrix.

La voix froide du mage noir tira immédiatement la sorcière de ses pensées. Il se tenait devant la porte de leur chambre, le coupe appuyé sur le mur pour soutenir son poids, et regardait sa servante sans afficher la moindre expression.
Bellatrix se leva lentement, essayant d'être la plus gracieuse possible, et regarda son Maître avec appréhension.

- Quand nous serons de retour en Angleterre...

Bellatrix fit un pas vers lui.

- Oui ? dit-elle d'un ton chargé d'espoir.
- Le Ministère sera renversé dans les jours qui suivront la disparition d'Albus Dumbledore. Je veux que tu me fasses une liste complète des sorciers et des postes qu'ils devraient occuper, du futur Ministre de la Magie aux membres du Magenmagot, ordonna le mage noir en tendant un papier qu'il venait de sortir de sa poche à la femme. Le Bureau des Aurors sera remplacé par la Brigade des Ombres, qui se chargera des résistants, puisqu'il y en aura inévitablement.

Bellatrix tâcha de gâcher sa déception. C'était ainsi que le Seigneur des Ténèbres réagissait face aux situations inconfortables ? Il... travaillait ? La mangemort revint vite à la raison ; bien sûr qu'il travaillait. Il était le mage noir le plus puissant et le plus dangereux de l'Histoire, doublé d'un leader politique hors pair. Il avait mieux à faire que de penser à une déclaration d'amour imprévue, ou de réfléchir à une éventuelle demande en mariage...

Bellatrix déplia le parchemin et lut la liste de poste à distribuer. Des précisions étaient marqués çà et là, et notamment à côté de la mention « Ministre de la Magie ». Voldemort avait précisé que cette fonction ne correspondrait plus à celle de Chef d'État, mais accordait simplement à celui qui l'occupait le pouvoir de faire passer les lois et de superviser le Département de la Justice Magique. Mais, alors, qui s'occupait de la liaison avec le Premier Ministre britannique ? Qui représentait le monde magique de Grande-Bretagne à l'internationale, si ce n'était plus le Ministre de la Magie ?

- Bien entendu, le seul poste qui ne figure pas sur la liste me revient, déclara Voldemort comme s'il avait lu dans ses pensées. Ce sera moi, Lord Voldemort, qui dirigera le pays. Les sorcières, sorciers et autres créatures placeront leur foi en le Seigneur des Ténèbres, et obéiront à ses règles. L'élection d'un Ministre entretiendra l'illusion d'une liberté politique, mais nous savons tous deux qu'il est dans l'intérêt de tous que je demeure au pouvoir. Nul ne pourrait régner sur notre communauté mieux que moi, et je ne fais confiance à personne d'autre pour assumer ce rôle.
- Vous avez parfaitement raison, Maître, dit Bellatrix qui pensait exactement les mots qu'elle prononçait. Mais... que se passera-t-il si un opposant politique est élu par le peuple ?
- Hmm...question pertinente, mais j'avais bien entendu considéré cette éventualité, répondit Voldemort en prenant place au creux d'un large fauteuil de cuir. Ne pourrons se présenter aux élections que les candidats qui pourront payer la somme de sept-mille Gallions. En d'autres termes, les plus riches héritiers des Vingt-Huit Sacrés. Je doute que quiconque hors de ce cercle aie les moyens financiers de porter candidature.
- Certains Sacrés sont immensément riches, et sont des traitres à leur sang notoires, répliqua Bellatrix en fronçant les sourcils. Les Potter, par exemple.
- Un mort ne peut pas se présenter à une élection, Bella, répondit simplement Voldemort avec un sourire cruel.

La mangemort sentit un frisson lui parcourir le corps, et ses paupières se firent lourdes de désir. Elle adorait quand son Maître parlait ainsi. Elle s'approcha de lui d'une démarche féline, un sourire malicieux aux lèvres et, soudain prise d'un courage venu de nul part, se baissa vers le mage noir pour positionner son visage en face du sien, si près qu'elle pouvait sentir son souffle contre sa peau.

- Et... murmura-t-elle d'une voix séductrice, comment mon Maître planifie-t-il la mort de ces traitres à leur sang ?

Voldemort l'attira contre lui en l'attrapant par la taille, si bien qu'elle se retrouva à califourchon sur ses cuisses. Bellatrix frémit quand elle sentit que le Seigneur des Ténèbres était au moins aussi excité qu'elle.
Le mage noir caressa le contour de sa mâchoire du bout de son index, descendant lentement, très lentement, vers son décolleté tandis qu'il lui répondait dans un murmure :

- Ton Maître requerra l'aide de son meilleur et plus fidèle lieutenant... ils trouveront les Potter, et les élimineront... peut-être même que le Seigneur des Ténèbres sera assez généreux pour laisser sa partenaire jouer avec leurs proies avant d'en finir.

Partenaire. Il l'avait désignée comme sa partenaire. Bellatrix sentit ses joues rougir sous l'émotion. Pendant ce temps, la main de Voldemort continuait son chemin, toujours plus bas ; maintenant sur ses cuisses dévoilées par le tissu relevé de sa jupe. La mangemort sentit ses poils se hérisser sur ses bras sous les caresses de son Maître. La sensation au creux de son ventre était celle de mille papillons qui voletaient, et elle ne fut que d'autant plus prononcée quand la jeune sorcière sentit la bosse en dessous d'elle se durcir et gonfler un peu plus. Instinctivement, elle commença à onduler son bassin, et les yeux de son Maître furent traversés par une lueur écarlate.

- Bella...

Ses mains se figèrent, et il détourna le regard.

- Pas maintenant.

Bellatrix cessa de bouger, et pencha légèrement la tête sur le côté. Il ne pouvait pas la couper en plein élan, pas quand elle était dans cet état. La sorcière posa une main tiède contre le torse du Seigneur des Ténèbres, et entreprit de défaire doucement les boutons de sa chemise. Mais Voldemort attrapa sa main, l'arrêtant dans son mouvement.

- Nous n'avons pas le temps, murmura-t-il.

Bellatrix jeta un coup d'œil par la fenêtre. Le ciel avait déjà pris la teinte orangée qui annonçait la venue de la soirée. Elle soupira. Peut-être que s'ils étaient rapides...

- Bella, debout, coupa le mage noir. Allez.

À contrecœur, la brune se leva des genoux de son Maître, et fit un pas en arrière. Elle pouvait ressentir la frustration pulser dans tout son corps. Elle soupira. Il leur restait toute la nuit pour cela. Mais d'autres choses plus importantes attendaient, avant que Bellatrix Lestrange puisse obtenir l'objet de ses désirs et affections.


****


Bon Bock, Montmartre, Paris, France.


Bellatrix regarda par-dessus le menu qu'elle venait de lire. Comme cela lui était étrange de voir son Maître avec d'autres traits que les siens. Sous la lumière tamisée du restaurant, il semblait réellement être une toute autre personne. Si cela n'avait pas été pour son regard si caractéristique, Bellatrix ne l'aurait pas reconnu.
Le mage noir parut sentir les yeux de sa servante posés sur lui, puisqu'il leva la tête en rencontra son regard en haussant un sourcil interrogateur. Bellatrix se sentit rougir, et posa son menu sur le coin de la table autour de laquelle ils étaient assis.

- Que pensez-vous prendre ?
- Tu, coupa-t-il en regardant autour de lui.
- Tu ?
- Tu ne peux pas me vouvoyez en public, répondit Voldemort à voix basse. Ce serait trop suspect. Et, d'ailleurs, il va nous falloir de nouvelles identités. J'aurais dû y penser avant...
- Hum... comment voul...veux-tu que je t'appelle ? demanda Bellatrix en grimaçant tant le simple fait de tutoyer le mage noir la mettait mal à l'aise.

Voldemort haussa les épaules.

- Elvis.
- Elvis, répéta Bellatrix en hochant la tête.
- Je pense prendre... voyons voir...

Il inspecta à nouveau le menu.

- Un foie-gras en entrée, une entrecôte Salers en plat de résistance, et sûrement un Parfait à l'absinthe en dessert. Et toi, Elisabeth ?
- Et bien..., un tartare de saumon en entrée et une salade césar en résistance, répondit-elle. Je ne sais pas encore si j'aurais la place pour un dessert.
- Petite chose, se moqua Voldemort avant de faire signe au serveur pour passer la commande.

Encore une fois, Bellatrix fut impressionnée par son niveau de langue, et ne se retint pas de le lui faire savoir.

- Tu parles très bien français. J'ignorais que tu étais bilingue.
- Polyglotte, corrigea le mage noir avec un sourire arrogant. Anglais, français, allemand, espagnol et italien. Quelques notions d'arabe également.

Bellatrix le regarda avec des yeux ronds.

- Eh bien, moi qui croyais avoir reçu une éducation exemplaire...je ne maîtrise que l'anglais et le français. J'ai quelques bases d'italien, mais pas de quoi me vanter. Maman a vite abandonné l'idée de faire de moi un prodige des langues. Cissy est bien plus douée... oh, voilà nous entrées ! dit-elle avec un sourire ravi.

Voldemort la regarda avec curiosité. Elle était si...familière. Cela changeait de d'habitude. Pour la première fois peut-être, elle semblait sincèrement à l'aise avec lui. Elle se comportait comme si elle était avec n'importe lequel de ses amis. À ce moment, il aurait pu être Rodolphus ou Lucius, cela aurait été la même chose. Peut-être que cela faisait partie de sa couverture. Bellatrix était une sorcière intelligente, oui ; cela faisait sûrement partie de sa couverture. Dès qu'ils auraient achevé leur mission, elle retrouverait son mur de politesse et de soumission.

Alors Voldemort s'autorisa à profiter de cette nouvelle familiarité, tant qu'elle était.

Les deux entamèrent leur dîner, à l'affut de la moindre venue dans le restaurant. Ce n'est qu'une fois qu'ils eurent entamé leurs plats de résistance qu'une voix familière se fit entendre à l'entrée du bâtiment.

- Ah, Tom, je savais bien que tu serais là ce soir.

__________________________________

La ville de l'amour semble déteindre sur nos deux anti-héros... pour le plus grand plaisir des lecteurs (et de l'auteure!). Mais est-ce que cela ne risque pas d'être de courte durée? Qui est donc le client qui vient d'entrer dans le restaurant? Que va-t-il faire face à « Tom »?

La suite au prochain épisode ;)

All the wrong choices Où les histoires vivent. Découvrez maintenant