Chapitre 28.

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1er juin 1969, Ministère de la Magie, Londres.


- Bien, tout semble être en ordre, fit madame Kirke en rendant sa baguette à Bellatrix. Miss Black, veuillez signer ce papier... ici, en bas. Voilà. Nous aurons aussi besoin de votre signature, monsieur Jedusor...

Bellatrix passa le formulaire à Voldemort, et le mage noir y jeta un coup d'œil. Aujourd'hui, ils réglaient les dernières formalités avec le Ministère. Après cette réunion, Bellatrix serait libre de faire ses bagages et de retourner chez ses parents jusqu'au lendemain. Après cela, elle serait mariée et emménagerait chez les Lestrange. Voldemort marqua une pause, avant de finalement poser sa plume sur la feuille et d'y dessiner sa signature.

- Parfait, dit la sorcière en reprenant le formulaire. Miss Black, vous êtes désormais considérée comme étant citoyenne libre de notre communauté. Je vous rappelle que vous demeurez sujet de droit et que, comme chacun, vous devez obéir au droit. Vous pouvez désormais faire usage de tous les sortilèges autorisés par la loi. Tout recours aux Impardonnables sera sévèrement puni, et si vous veniez à blesser quelqu'un à nouveau avec n'importe quel autre sortilège, la sentence que vous recevrez sera bien moins conciliante que celle que vous venez d'achever. Suis-je claire ?
- Oui madame, répondit sagement Bellatrix.
- Vous êtes certainement au courant des récentes disparitions au sein de la société magique de Grande-Bretagne, continua Kirke en ajustant ses lunettes sur son long nez droit. Des temps troubles s'annoncent, et des groupes distincts commencent à se former dans notre communauté. Non pas que je veuille accuser tous les sangs purs du pays, mais vos familles ont longtemps été mêlées à d'étranges affaires... aussi je vous conseille de rester sur vos gardes et de ne pas vous associer à n'importe qui.

En disant ces deux derniers mots, elle avait appuyé son regard sur Lord Voldemort. Les récentes disparitions auxquelles elle venait de faire référence avaient été celles de six sangs de bourbe. Voldemort le savait bien, car c'était lui qui avait tout planifié. Il avait envoyé Lestrange, Mulciber, Yaxley et Avery faire le travail. Il n'avait jamais caché ses opinions pour le moins radicales sur la place des sangs de bourbe dans ce monde, et les sorciers ne pouvaient plus, désormais, ignorer son ascension fulgurante. Tous savaient que le mage noir avait commencé à réunir des adeptes autour de sa doctrine puriste, et ont commençait à se méfier, à craindre son pouvoir, son influence. Peut-être même le soupçonnait-on d'être à l'origine des disparitions, mais cela importait peu. Ils n'avaient aucune preuve. Madame Kirke pouvait continuer à insinuer ce qu'elle voulait, ce n'était pas comme si elle avait la moindre emprise sur Bellatrix. Elle n'avait même pas été capable de voir que la jeune adolescente de la maison Serpentard était devenue une arme létale. Comment pourrait-elle savoir que Bellatrix allait être faite mangemort dans les jours à venir ?

- J'ai en effet eu vent des récents événements, madame, répondit la brune avec assurance. Sachez que je trouve, au même titre que vous, que ces disparitions sont tout à fait terrifiantes. J'espère que les personnes concernées seront vite retrouvées. Nous ne voudrions pas que tous les sangs...nés moldus, deviennent la cible d'un groupuscule suprématiste. Ce serait tout bonnement horrible.

Voldemort dût réunir toutes ses forces pour ne pas rire. La veille, Bellatrix lui avait exprimé son envie de mettre en pratique ses nouvelles connaissances en matière de torture sur un sang-de-bourbe « parce que ce serait tellement plus amusant d'entendre une de ces vermines hurler de douleur et supplier plutôt que d'écouter glapir un animal innocent ».

- En effet, répondit sèchement madame Kirke. Je crois savoir que vous allez emménager chez votre futur époux dans la semaine ?
- C'est cela.
- Rodolphus Lestrange, n'est-ce pas ? Il travaille au Département des Sports Magiques en temps que régulateur, si je ne m'abuse ? Son père, Arsenius, est aussi employé au Ministère. D'après nos informations, ils ont tout deux participé à l'embuscade contre la marche pour les droits des Cracmols en août dernier...
- Avec tout le respect que je vous dois, intervint Voldemort d'une voix glaciale, miss Black n'a aucun contrôle sur les opinions de sa future belle-famille. Cette discussion n'a aucun intérêt. Vous avez très bien pu constater que ma pupille a fait de réels progrès au cours de cette année, qu'elle s'est rachetée auprès de notre société. Bellatrix a payé le prix de ses erreurs en étant privée de sa scolarité à l'école de sorcellerie Poudlard. Elle a été privée d'un diplôme qui aurait pu lui permettre de décrocher aisément un très bon poste. Sa punition a pris fin. Ce n'est pas la peine de vouloir l'incriminer davantage.
- Je vais être très claire avec vous, contra madame Kirke d'un ton autoritaire. Miss Black a eu énormément de chance d'échapper à une sentence plus lourde. Alors, certes, elle a fait des progrès, et peut-être même qu'elle nous prouvera être devenue une citoyenne modèle. Mais nous ne sommes pas dupes, monsieur Jedusor. Nous connaissons l'environnement dans lequel votre pupille a évolué, nous savons quel genre de croyances on inculque aux jeunes sorciers de « sang pur ».
- Juste parce que nous pensons différemment de vous ne signifie pas que nous prenons part à des actions que vous considérez comme moralement douteuse, dit Bellatrix d'un ton sec. Madame Kirke, si vous n'avez pas d'autres modalités à revoir avec nous, je pense qu'il est temps que nous partions.

La femme reste bouche-bée face à l'assurance de Bellatrix qui venait de se lever et se dirigeait dores et déjà vers la sortie. Voldemort afficha un sourire dédaigneux, toisa la femme et suivit sa pupille. Les deux ne tardèrent pas à transplaner au manoir Malefoy.

- Nous l'avons fait, Maître ! s'exclama Bellatrix en atterrissant devant l'imposante demeure. Nous en avons enfin fini avec ce fichu Ministère.
- Oui, Bella, répondit simplement Voldemort. Tu peux aller rassembler tes affaires si tu veux.

La jeune sorcière s'arrêta dans son élan, et son visage devint sérieux tout à coup.

- Oh...

Voldemort haussa les sourcils.

- C'est-à-dire que...je me demandais si je ne pouvais pas passer ma dernière nuit ici, Maître. Je ne vois pas de réelle utilité à retourner chez mes parents sachant que je devrai de toute manière emménager chez les Lestrange demain... je préfère passer mes dernières heures chez les Malefoy, en votre compagnie...

Le mage noir sentit un frisson de soulagement lui parcourir l'échine. Il ignorait pourquoi, mais il était content de savoir que Bellatrix n'avait pas hâte de le quitter.

- Je ne suis plus ton responsable légal, Bellatrix, répondit-il simplement. Si tu veux passer cette nuit chez les Malefoy, rien ne t'empêche. Parles-en peut-être à Abraxas et à tes parents avant. Tout le monde s'attendait à ce que tu partes aujourd'hui.
- Oh, oui... bien sûr. Hum... Maître ?
- Oui, Bella.
- Peut-être que... peut-être que nous pourrions dîner ensemble, ce soir ? Pour la dernière fois...

Une petite voix dans sa tête lui cria de répondre non. Il avait mieux à faire que de dîner avec sa servante. Il avait du travail, des lettres à envoyer, des missions à planifier et...

- D'accord. Vingt-heure. Je choisis le menu.
- Bien entendu, répondit Bellatrix avec un sourire victorieux.


****


Elle s'était faite belle pour l'occasion. C'était peut-être la dernière fois qu'elle avait le droit d'être aussi proche de son Maître, et Bellatrix avait marqué le coup. Elle avait revêtu une belle robe noire au décolleté plongeant, assez moulante pour dévoiler ses courbes subtiles. Elle savait qu'elle plaisait à son Maître, car il avait déjà pris son corps plus d'une fois. Mais elle voulait continuer de l'impressionner. Ses cheveux étaient plus brillants et ses boucles plus définies que jamais. Ses lèvres avaient été peintes en rouge vif et ses yeux soulignés d'un trait de liner épais. Lorsqu'elle se regarda une dernière fois dans le miroir avant de quitter ses appartements, elle dût admettre qu'elle était ravissante. Elle jeta un coup d'œil à la bague que Voldemort lui avait offerte pour son anniversaire -une bague d'émeraudes et d'argent, et ne put retenir un sourire en pensant à ce qu'il lui avait dit.

Elle était sienne.

Bellatrix descendit les escaliers jusqu'au living room où Voldemort l'attendait déjà, attablé.

- Maître, murmura-t-elle pour signaler sa présence.

Sans même utiliser sa baguette, Voldemort tira une chaise pour elle. Bellatrix y prit place, et Dobby apporta les entrées, accompagnées d'une bouteille de vin blanc. Voldemort lui servit un verre, puis se servit le sien qu'il leva en son honneur.

- À ta dernière soirée ici, dit-il.

Bellatrix répondit en levant son verre et en en buvant une gorgée. Si c'était Voldemort qui avait choisi le vin, il avait bien choisi ; la boisson était délicieuse.

- Je...je tenais à vous remercier pour tout ce que vous avez fait pour moi Maître, dit Bellatrix en reposant doucement son verre. Vous m'avez sauvée d'une sentence à Azkaban, et vous m'avez appris tout ce que je n'aurais jamais pu apprendre en restant à Poudlard. Vous m'avez autorisée à rêver d'un avenir plus grand que ce que je n'aurais jamais imaginé, un avenir où je peux être qui je veux. Jamais je n'aurais cru devenir aussi puissante, aussi fière de servir un sorcier. Mais vous m'avez accordé tout cela, et je vous en suis à jamais reconnaissante.

Voldemort la regarda longuement, et elle le regarda en retour avec des yeux brillants d'émotion, retenant son souffle. Puis, il hocha la tête une fois.

- C'était à notre avantage à tous les deux. Je sais que tu pourras me prouver que tout cela n'a pas été vain.
- Je suis prête à tout pour vous rendre fier, mon Seigneur, répondit Bellatrix avec enthousiasme.
- Hmm.

Ils finirent tranquillement leurs entrées avant de passer au plat de résistance.

- Serez-vous présent demain, Maître ? demanda Bellatrix après plusieurs minutes de silence.

Au mariage, elle voulait dire. Voldemort soupira.

- Non.

Bellatrix baissa les yeux et avala difficilement sa salive avant de porter une nouvelle bouchée de légumes à ses lèvres.

- Mais tu viendras me voir après la cérémonie, dans mon bureau. J'aurai quelque chose pour toi.
- Oh...

Voldemort esquissa un sourire en voyant celui qui était revenu éclairer le visage de sa protégée. Il ne remarqua qu'alors à quel point elle avait fait attention à son apparence ce soir là. Elle ne ressemblait plus à la jeune adolescente qu'il avait secouru l'hiver dernier. Son visage s'était endurcit, son corps était plus féminin, ses yeux traduisaient une plus grande confiance en elle. Bellatrix était devenue une magnifique jeune femme et, Voldemort le savait, une redoutable guerrière.

Et elle était sienne.

****

Il y avait toujours eu quelque chose chez lui qui avait fasciné Bellatrix. Lord Voldemort avait ce genre d'aura qui attire même la personne la plus difficile à convaincre. Tout chez lui transpirait la magie. C'était comme si on pouvait voir ses pouvoirs couler dans ses veines. Et sa carrure, son assurance, ne laissaient pas dupe sur son état d'esprit : Voldemort était puissant, et il le savait.
Cela se voyait dans la façon dont il marchait : lentement, avec souplesse et assurance. Cela s'entendait dans la façon dont il parlait : d'une voix douce, froide, d'un ton qui ne laissait aucune place à la discussion. Cela se retrouvait même dans ses traits : durs et fins à la fois, avec une mâchoire et des pommettes ciselées, des yeux perçants et un regard impénétrable.

Mais il y avait autre chose...quelque chose que Bellatrix n'arrivait pas tout à fait à saisir. Quelque chose de peut-être presque surnaturel.

À plusieurs reprises, elle avait cru voir une lueur rouge traverser son regard d'onyx. La cicatrice qui barrait son visage ne semblait avoir été causée par aucune lame. Elle était à mi-chemin entre la coupure et la brûlure. Il était aussi étrangement pâle, avec une peau presque translucide.

Il avait d'autres cicatrices, Bellatrix le savait. D'ailleurs, une nouvelle était récemment apparue au niveau de son abdomen. Elle l'avait aperçue la dernière fois que...
Enfin.
Visiblement, la blessure lui faisait encore mal, puisqu'elle l'avait vu grimacer de douleur pendant l'acte. Elle ignorait comment il s'était fait cela, mais la cicatrice avait semblé lui faire toujours légèrement mal. Peut-être avait-il participé à un raid, ou à une autre mission périlleuse. Bellatrix n'en avait aucune idée. Elle n'était pas encore officiellement mangemort, et elle ignorait ce qui se passait réellement entre les rangs du Seigneur des Ténèbres.

Cela ne la dérangeait pas. Elle avait entièrement confiance en lui.

Une fois le dîner terminé, Bellatrix lança un coup d'œil à l'horloge. Il était tard, et elle savait qu'elle devait être raisonnable. Le mariage était demain et...

- Tu devrais probablement aller te coucher, dit Voldemort en interrompant le fil de ses pensées.
- Oui, murmura Bellatrix qui n'avait aucune envie de partir.
- Grosse journée demain.
- Oui.

Les deux restèrent face à face, immobiles, silencieux.

- Je devrais y aller, répéta Bellatrix en se levant.
- Oui, répondit Voldemort.
- Bonne nuit, Maître.
- Bonne nuit.

Elle s'apprêta alors à sortir de la pièce quand la voix de Voldemort l'arrêta.

- Bella.
- Maître ?
- Tu passeras la nuit dans mes appartements. Je te retrouve dans une vingtaine de minutes.


****


La suite de Lord Voldemort était décorée aux couleurs de la maison Serpentard. Le mobilier était ancien et de grande qualité. Elle comprenait quatre pièces, dont un salon, une chambre à coucher, une salle de bain et un dressing, et était bien plus imposante que la suite qui avait été prêtée à Bellatrix. Mais après, cela n'était pas étonnant. Il était Lord Voldemort.

Bellatrix se tenait debout devant le grand lit à baldaquins où son Maître passait ses nuits. Elle n'avait été qu'une seule fois ici, le soir où il avait pour la première fois pris son corps. Elle se rappelait très bien la douleur lancinante qui avait déchiré son bas-ventre au début, puis la vague de plaisir qui l'avait submergée et avait remplacé l'inconfort.
Ils avaient été intimes plusieurs fois depuis, et chaque fois avait été merveilleuse. C'était toujours Voldemort qui avait le contrôle, mais cela ne dérangeait nullement Bellatrix. Chaque attention qu'il lui accordait était toujours le plus grand cadeau qui soit pour elle. Qu'il soit doux ou violent, peu lui importait tant qu'il voulait toujours d'elle.

- Bella.

Bellatrix sursauta en sentant les mains de son Maître se poser sur ses épaules, puis sur sa nuque. Elle ne l'avait pas entendu arriver. Elle se retourna pour se retrouver nez-à-nez avec le mage noir. Elle devait lever la tête pour le regarder dans les yeux, il était si grand comparé à elle. Ses mains étaient froides, Bellatrix pouvait le sentir à travers le tissu fin de sa robe de nuit. Cela ne lui posait pas problème. Son regard aussi était froid, mais il n'était pas aussi dur que ce qu'il avait été. Il l'était avec le reste du monde, mais pas avec elle. Les deux s'étaient accoutûmés à la présence de l'autre, et un confort agréable s'était peu à peu installé entre eux. Aucun n'oubliait la dynamique qui les unissait, cependant. Bellatrix restait la servante, et Voldemort ; le maître.

Pourtant, à cet instant même, pendant une fraction de seconde, cela avait disparu. Ils étaient juste un sorcier et une sorcière, dans une chambre à coucher, uni par un même désir de proximité. Et, alors qu'ils semblaient plus proche que jamais, alors que Voldemort déposait un baiser délicat sur son front, Bellatrix ne réussit pas à retenir les mots qui brûlaient ses lèvres depuis tant de mois...

- Je vous aime.

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