Chapitre 2

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Les jours et les semaines passaient à une vitesse incroyable. Rapidement, le mois de décembre avait pointé le bout de son nez, le froid s'était intensifié, mais pour autant, Maé commençait à s'adapter à sa nouvelle vie. Son quartier n'avait plus vraiment de secret pour elle, et elle appréciait sincèrement cet endroit. Ce n'était pas Marseille, et ça ne le serait jamais, mais elle retrouvait un peu de chaleur dans l'humanité et l'animation de son voisinage. Avec Valentine, elles sortaient parfois boire un Monaco après les cours, s'épaulaient pour leurs études, discutaient beaucoup et comme Maé l'avait pressenti, elle apprenait beaucoup d'elle. En l'admirant ses facilités d'interaction,  elle s'était promis d'essayer de faire preuve de moins de rigidité, de s'ouvrir aux autres, et de laisser un peu plus de place à ce qu'elle ne pouvait pas entièrement maîtriser. Pour autant, elle le savait, elle restait Maé, et ses ambitions résonnaient dans son cerveau en permanence, l'incitant à conserver autant de sérieux que possible. Et puis on ne pouvait pas décider du jour au lendemain de se sentir belle et féminine, d'être extravertie, de se faire facilement des amis. Pour Valentine, c'était inné, et elle n'avait pas ce don.

Un samedi soir pluvieux et particulièrement froid, armée de son plus doux et plus confortable pyjama, Maé s'appliquait à respecter scrupuleusement son planning de révision. Dans une ambiance tamisée offerte par la petite lampe vintage qu'elle avait chinée chez un voisin brocanteur, un album du groupe Archive en fond sonore, elle relisait ses cours, les synthétisait, les mémorisait. Elle recopiait, surlignait, soulignait. Les quelques notes qu'elle avait obtenues étaient admirablement élevées, ses professeurs notaient déjà son implication et son enthousiasme, et elle ne s'était pas privée d'en informer sa famille. Ses 24 ans bien tassés ne l'empêchaient pas de toujours chercher en eux l'admiration, et l'amour qu'elle ne recevrait jamais de sa mère.

Son père avait passé pourtant de longues heures à lui expliquer qu'il était fier d'elle en toutes circonstances, et que son acharnement à l'école n'était pas une obligation. Il avait espoir qu'elle s'en sorte bien dans la vie, mais il n'avait pas besoin d'un bulletin de notes irréprochable pour aimer et admirer sa progéniture. Il venait de la rue, lui, alors même s'il avait toujours fait en sorte que sa fille ne soit pas obligée de batailler pour vivre convenablement, il ne voulait pas non plus qu'elle se tue à la tâche ni qu'elle se force à suivre une voie qui ne lui était pas destinée. Il lui semblait fondamental qu'elle s'épanouisse dans une vie qu'elle avait choisie, elle. 

******

Dans sa petite cuisine, elle s'affairait à se préparer une tisane, concentrée sur l'eau chauffant dans la bouilloire. Des coups portés à sa porte la faisaient sortir de ses pensées. Bien entendu, elle n'attendait personne, encore moins à cette heure tardive, et c'est un peu inquiète qu'elle s'était dirigée vers le judas pour y découvrir Valentine, coiffée et maquillée à la perfection, les lèvres rouges déformées par un sourire éclatant. Définitivement, leurs vies étaient diamétralement opposées.

- Mais qu'est-ce que tu fais là ? Demandait-elle en ouvrant la porte à son amie, toujours le cœur battant.

- Toi qu'est-ce que tu fais là ? C'est samedi soir, tu ne vas pas rester cloîtrée dans ton immonde pyjama, alors que les nuits parisiennes n'attendent que nous ! Elle s'exclamait, plus enthousiaste que jamais.

- Valou, il pleut, il fait froid, et j'ai pas fini de bosser les cours de la semaine dernière.

- T'es une sacrée rabat-joie ma beauté. Aller, va te préparer, on sort.

- Sérieusement, j'ai du travail. J'ai pas envie de sortir là.

- Tu connais déjà nos cours par cœur, va te préparer je te dis, des amis à moi nous attendent, ça va être cool tu vas voir ! Tu discutes pas, je t'attends !

EQUILIBRE INSTABLE [MEKRA]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant