Chapitre 48

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Elle n'était plus la Maé qu'il avait rencontrée, une peu perdue lors d'une soirée à Paris, quelques années auparavant. Elle n'avait plus un visage enfantin. Elle n'avait plus ses longs cheveux indisciplinés. Elle n'avait plus non plus, dans son regard, ce quelque chose qui lui manquait pour être entièrement heureuse et accomplie. Pourtant, il arrivait encore à trouver en elle ce qui l'avait séduit.

Debout, tenant son fils contre lui, il était frappé par sa beauté et son élégance. Ses cheveux blondis par l'air marin et sa peau halée par le soleil, la rendaient incroyablement attirante. Un tatouage qu'il n'avait encore jamais eu l'occasion d'admirer, venait habiller son bras droit. Il ne parvenait pas à déterminer ce qu'il représentait, mais l'encre noire s'alliait parfaitement à sa peau désormais bronzée. Elle était radieuse. Elle était solaire. Elle était éblouissante. Il se haïssait de la trouver si belle. Il avait tellement souffert, qu'il aurait préféré la trouver affreusement laide et qu'elle ait le visage rongé par la culpabilité. Mais c'était tout le contraire, et il sentait la colère monter. Une colère qu'il tâchait de contrôler, bien incapable de comprendre sa réaction. Il s'était imaginé qu'il aurait ressenti de la tristesse, du dégoût, mais pas de la colère. Leur relation avait pris fin il y a longtemps, sa réaction ne lui semblait pas normale. Mais c'était le mariage de Ken et Valentine, aujourd'hui, il s'interdisait de gâcher leur moment. Alors il se contenait.

Elle, elle ne l'avait pas encore vu. En réalité, elle prenait soin de se focaliser sur les premières personnes qu'elle avait pu retrouver, et qui avait accepté de lui parler, pour ne surtout pas risquer de croiser le regard noir d'Hakim. C'est elle qui était partie, qui avait déserté, et détruit tout ce qu'ils avaient commencé à construire. C'était son choix, elle l'assumait. Mais elle savait pertinemment que son corps allait réagir en le voyant. Depuis qu'elle savait qu'elle s'apprêtait à le revoir, il hantait ses pensées, elle craignait d'avance ses émotions.

Les mots incompréhensibles d'un enfant l'obligeaient à tourner la tête. C'étaient plus des sons que des mots, mais il semblait parfaitement se faire comprendre. Cet enfant, beau comme un cœur, se trouvait dans les bras de son père, dont il était le portrait craché. Et son père, lui, la fixait de ce fameux regard noir auquel elle avait tenté d'échapper jusqu'alors.

Après que son père l'ait déposé au sol, le petit garçon courrait, d'un pas mal assuré, en direction d'un groupe d'enfants surexcités. Arrivé à sa hauteur, il trébuchait sur une pierre et s'étalait de tout son long, juste à côté de Maé, qui se précipitait sur lui pour vérifier qu'il allait bien.

- Le touches pas ! Il criait en la voyant prête à le relever.

- Hakim...

- Je t'interdis de t'approcher de mon fils, il grondait.

- Je voulais juste l'aider... Elle murmurait les larmes aux yeux.

Elle ne s'attendait certes pas à de grandes retrouvailles amicales, mais le ton employé par Hakim la détruisait de l'intérieur. Elle n'avait rien fait de mal, elle était soufflée par sa réaction virulente. Il avait parlé suffisamment fort pour que de nombreuses paires d'yeux soient désormais braqués dans sa direction. Elle savait que ce ne serait pas facile de débarquer au mariage de ses amis, et qu'elle ne serait pas forcément bien accueillie. Mais là, le temps semblait suspendu, et une partie des invités paraissaient attendre la suite du spectacle. C'est Valentine, qui lui permettait de s'échapper de cette situation. Certaines choses ne changent pas.

- Maé, viens avec moi, je vais te montrer la salle. Elle l'intimait en la tirant par le bras.

La salle de réception était grandiose et prête à accueillir à nombre indécent d'invités. Tout était beau, bien pensé, bien décoré. Mais parmi toute cette beauté, elle avait l'impression que son état d'esprit faisait tâche.

EQUILIBRE INSTABLE [MEKRA]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant