Se retrouver loin du bruit excessif de la boîte de nuit n'arrangeait en rien les affaires de Maé. Son esprit vacillait entre la crise violente de Jules et la proximité de Hakim. La culpabilité et la colère ne faisaient pas un bon mélange. Elle avait consciente que son petit jeu avec son ami était une dangereuse connerie, mais elle ne parvenait pas à se maîtriser quand il était là. Elle souffrait des insultes de Jules, mais finalement, c'était cette perte totale de contrôle sur les évènements qui lui faisait le plus mal.
Elle avait accepté de se faire ramener, consciente que ce n'était pas franchement l'idée du siècle. Mais il était trop tard pour se raviser. Elle marchait avec quelques pas de retard sur lui, comme pour se convaincre que la distance physique suffirait à éloigner le souvenir des yeux d'Hakim braqués sur elle quelques minutes plus tôt, mais c'était bien naïf. Quand son regard se perdait involontairement sur les fesses du jeune homme qui avançait devant elle, elle réduisait l'écart pour tenter de lutter contre les pièges que lui tendait son cerveau.
- Tu es sûr de pouvoir conduire ? Elle demandait pour briser le silence froid qui s'était installé entre eux.
- Je gère.
Il gérait. Tant mieux, parce qu'elle, elle ne gérait plus grand-chose.
Après quelques minutes de marche dans la nuit printanière, ils finissaient par s'installer à bord de la voiture, et comme la première fois, elle essayait de se montrer sous meilleur jour, en évitant au maximum de fixer ses yeux sur lui. Elle le savait, désormais, elle n'était pas discrète.
- Il te fait souvent ce genre de crise, ton mec ? Il finissait par demander pour amorcer un semblant de conversation
- C'est une première... Elle répondait d'un ton las, le regard perdu à travers la vitre de sa portière. Vraiment, je ne l'avais jamais vu comme ça...
- Fais attention, quand même.
- Ecoute, je préfère ne pas parler de ça avec toi...
- Je crois que j'aurais pété les plombs aussi, à sa place... Il avait lâché après un long silence.
Maé n'était pas vraiment sûre de vouloir aller sur ce terrain. Elle aurait certainement préféré ne pas mettre de mots sur leur comportement. En tournant le visage vers lui, elle réalisait qu'il profitait d'un feu au rouge pour poser les yeux sur elle, un sourcil arqué. Il semblait attendre une réponse, mais ne sachant pas comment réagir, elle préférait tourner la tête et garder le silence.
- En tout cas, je voulais pas foutre la merde entre vous.
- On pourrait ne plus en parler ? Elle suppliait, gênée.
- OK.
Le reste du trajet n'était que silences et regards en coin. Maé voyait son domicile approcher, et elle ne parvenait pas à déterminer si c'était une bonne ou une mauvaise nouvelle. Elle ressentait l'envie de l'avoir près d'elle, et quelques secondes après elle prenait conscience que si elle ne voulait pas tout foutre en l'air, elle devait se tenir loin de lui. Le schéma se reproduisait invariablement et sans arrêt dans sa tête, et elle avait envie de la tomber contre la vitre jusqu'à ne plus pouvoir réfléchir. Mais quand enfin, il se garait en double file pour la laisser descendre, elle réalisait qu'elle ne voulait vraiment pas le laisser partir.
- Tu veux monter ? Elle avait demandé sans tout à fait comprendre comment ni pourquoi.
- Ok. Je me gare, j'arrive. Il acceptait, mettant sur pause son cerveau qui lui ordonnait de fuir.
Elle était sortie de la voiture d'Hakim, et avait patienté sagement sur le trottoir qu'il trouve une place. Elle avait été obligée de penser à Jules, qui n'apprécierait vraiment pas qu'elle fasse monter Hakim chez elle en pleine nuit, mais s'était rassurée en se convainquant qu'il n'y avait pas de mal à recevoir un ami. Pour se convaincre, elle avait dû se battre sans ménagement contre la voix puissante qui lui hurlait d'arrêter une bonne fois pour toute de se mentir à elle-même.
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EQUILIBRE INSTABLE [MEKRA]
Fiksi Penggemar"Pour croire avec certitude, il faut commencer par douter." HAKIM x MAE