Bonus : Cicatrice du Temps

91 9 3
                                    

Il y a 1109 ans...

Le silence régnait dans le campement.

Les paupières closes, j'écoutais les moindres bruissements du vents. Les battements des étendards et le cliquetis des côtes de mailles. Le renâclement des bêtes de somme. Les soupirs des éclaireurs placés en haut du ravin. Ma peau capta les premières lueurs de l'aurore par la chaleur des rayons qui venaient réchauffer la toile de ma tente. Je m'étiraient de tout mon long puis me rallongea sur mon lit de camps. Déjà, les premiers insectes commençaient à bouger, vite imiter par les quelques charognards qui planaient encore au dessus de la garnison. Je sentis mon estomac se contracter. Il me faudrait me déplacer plus loin si je voulais trouver un gros gibier à me mettre sous la dent. La viande servie ici était dure et sèche, pas de quoi me remplir le ventre.

J'entendis le bruissement furtif d'une paire de bottes en cuir derrière ma tente. Je poussai un grognement las. Plus que quelques secondes avant que cet énergumène ne vienne me tirer de force de ma tente. Un pan de ma tente vola, faisant entrer les premiers rayons du jour ainsi que l'odeur infect des hommes et du bétail. Je fronçai le nez. Je ne m'habituerai jamais à cette odeur de fauve. Les hommes ne savaient donc pas se laver. Le cliquetis du métal me ramena à la réalité. Je me retournai prestement pour rattraper le ceinturon que mon ami venait de m'envoyer.

« - Debout sale gosse, me salua joyeusement Skam, on nous demande dans la tente principale.

- Recommence encore une fois et je t'enfonce la tête dans le sable, grognai je en bouclant mon plastron.

- J'ai la nette impression que tu dis la même chose tous les matin, sourit-il en me tendant mon espadon, aller Tirek dépêche toi on va rater le début. »

J'enfilai mes bottes et le suivais dehors en soupirant. Son énergie matinale m'exaspérait autant qu'elle me surprenait. Skam était depuis toujours mon meilleur ami et le restera jusqu'à la fin de sa vie. Bien que c'est cheveux d'or et son physique de gringalet lui donnait l'apparence d'un enfant de chœur il restait mon compagnon d'arme. Dans le campement, ses cheveux dorés et sa tenue argentée faisaient tache à travers la cohue de soldat. Je jetai un regard aux deux incisions dans le dos de sa tenue. Mieux valait pour lui qu'il ne déploie pas ses ailes ici. Son visage innocent et son sourire candide lui donnait un côté enfantin qui surprenait les gardes sur son passage. J'esquissai un sourire en coin. Peu de gens savais qu'il approchait de son premier siècle. Je le rattrapai en quelques enjambées pour me positionner à son niveau. Je l'écoutai d'une oreille distraite me faire un rapport des derniers événements. Les affaires des hommes ne m'intéressaient guère. Si j'étais ici c'était juste parce que Skam y était aussi. Rien de plus.

Nous entrâmes dans le campement des hommes pour rejoindre la tente générale. J'attrapai l'ange pas le col pour lui éviter une collision avec une charrette. Quelle plaie ses équidés idiots, ils feraient mieux de finir en rôti. Celui-ci continuait d'avancer énergiquement sans prendre la peine de regarder où il mettait les pieds. Les soldats se poussaient sur notre passage, baissaient les yeux devant mon regard noir, laissant mon compagnon déambuler à sa guise à travers les tentes. Je tournai la tête vers l'autre côté du goulet où nous nous trouvions. Apparemment nous n'étions pas les seuls à se préparer. Nous traversâmes le champ de tentes kaki. Autour de nous, la garnison commençait enfin à se lever bouchant en partie le passage. Je laissai échapper un grognement de mécontentement. Les chevaux se mirent à piaffer provoquant une débandade dans le camps.

« - Tirek ce n'est pas bien de faire ça, s'indigna Skam, ces pauvres chevaux ne t'ont rien fait.

- Rien à faire, me contentai je de répondre. »

J'attrapai mon ami pour le jeter par dessus mon épaule. On ira beaucoup plus vite de cette manière. Je laissai mon aura effrayer les soldats qui étaient encore sur place sous les plaintes de l'ange. Ceux-ci détalèrent en vitesse laissant le passage entièrement libre. Avançant avec de puissantes enjambées, j'écoutais en souriant les reproches de Skam toujours ballotté sur mon épaule. Presque 10 ans que nous étions ici et rien avait changer. Mais aujourd'hui, tout était différent. Aujourd'hui marquait la fin d'une ère et le début d'une autre. Dans quelques heures tout allait se jouer et je frémissais déjà d'impatience. Je posai mon compagnon au sol juste devant la tente. Ce dernier me jeta un regard vexé et me fusilla des yeux. Des yeux bleus, aussi clairs que la glace et aussi électrisants que la foudre.

La Colère du Léviathan: Tome 1 : Cas particulierOù les histoires vivent. Découvrez maintenant