Chapitre 29

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Quand la porte de l'avion se ferme derrière nous Mick descend pour rejoindre le premier point que nous avons défini. Chaque point correspond au lieu où la première à partir doit s'arrêter pour couvrir l'autre. Jusqu'à lentrée du bâtiment on a établi quatre points afin de prendre le moins de risque. La pluie s'est stoppée environ quatre heures après la décision d'aller chercher la nourriture avec Mickaëla. Elle peut reprendre à tout moment et les nuages noirs qui remplissent le ciel ne nous donnent pas beaucoup de temps.

-   Oublie le prochain point, on doit aller plus vite !

Je crie le plus fort possible mais elle ne perçoit pas ma demande et s'arrête.

On arrive au bâtiment sans encombre mais nous n'avons pas encore accompli notre mission.

En entrant par la première porte qui s'ouvre, on tombe sur une grande pièce avec de nombreuses chaises, sûrement la salle d'attente avant l'embarquement.

-   On va où maintenant ?

-   Aucune idée.

Après un bon moment à regarder les alentours pour choisir une direction à prendre, Mick intervient :

-   Là.

Elle me désigne un escalator du doigt. C'est le bon chemin j'en suis sûre.

-   C'est partie.

Elle me fait signe de passer devant et je ne rechigne pas. Être devant signifie voir le danger en première alors ça me va. J'ai voulu venir seule pour que personne ne soit en danger, pour être sûre de ne tuer personne d'autre alors si je peux être en première ligne pour laisser le temps à Mickaëla de fuir, j'accepte volontiers.

-   A droite ça te va ?

Je ne lui laisse pas réellement le choix puisque je suis déjà partie dans la direction que je lui indique.

Le silence qui règne provoque un malaise. Je m'attendais à ce que Mick ne cherche pas à prendre des nouvelles ou apprendre à me connaître mais pas au point de m'ignorer. Aiden m'a confié qu'elle était très bavarde par moment mais là elle ne m'adresse pas un mot malgré mes regards à son attention.

-   Bon tu vas me dire à quoi tu penses ?

Je suis visiblement prise sur le fait. Son interrogation donne l'impression qu'elle se sent forcée de parler.

-   Oh non rien.

-   Tu me regardes depuis plus d'une demi-heure.

-   Je me demande simplement ce que tu penses. A quel point tu...

-   A quel point je te déteste ?

Elle est maligne c'est certain. Je n'ai pas besoin de répondre qu'elle reprend.

-   Je ne te déteste pas, je ne te cerne pas c'est différent.

Bien qu'elle ai l'air sincère, ses dires ne sont pas logiques. Je n'aurais pas eu un tier des mots qu'elle a eu envers moi ou dans mon dos si le seul souci était un problème de cernement.

-   Tu sais quoi ce n'est pas grave, tu penses ce que tu veux de moi.

Je suis presque reconnaissante qu'elle ne continue pas la conversation. Un jour j'apprendrai ce qui lui gêne chez moi bien que d'après Fred ce n'est qu'une histoire de jalousie.

-   Ici.

La pièce dans laquelle nous pénétrons est une lignée de distributeur, il faut croire que nous n'aurons pas à explorer le reste de l'aéroport. Une grande partie des distributeurs est explosée au sol mais il en reste encore qui sont intacts. On ouvre nos sacs pour les remplir au maximum et il ne nous faut qu'une voire deux minutes pour se regrouper et repartir vers la sortie.

-   Simple, efficace.

Son exaltation face au succès de la mission est bien trop prématurée. Nous ne sommes mêmes pas encore retournées dans l'avion.

-   Concentre-toi.

Mon ton est grave mais elle doit comprendre que l'on n'est jamais en sécurité à moins d'avoir vérifié toutes les pièces et d'avoir bloqué tous les accès possibles.

On rejoint la porte par laquelle nous sommes entrées sans encombre mais notre plus gros problème arrive maintenant. La pluie. Une pluie battante tombe et ça n'a pas l'air d'être simplement une averse. On va être coincé ici pour un bon moment.

-   Je vais chercher des chaises et toi sécurise la zone.

Je n'ai pas le temps de la retenir que Mickaëla est déjà partie. La pièce est trop grande pour couvrir chaque accès alors j'ouvre la porte et vérifie qu'il n'y a personne. Les infectés peuvent sortir sous la pluie mais il y a peu de chance qu'il en reste dehors.

-   Super tu veux nous tuer.

-   C'est la solution la plus simple et on respirera l'air frais au moins.

-   Pas faux.

Elle installe les deux chaises qu'elle a trouvé et on sassoit. Un silence de plomb s'installe immédiatement. Je n'avais pas envisagé que je me retrouverai coincé ici avec elle. Le temps va passer si lentement. On se jette quelques regards mais aucune de nous ne démarre une vraie conversation. Je prie pour que la pluie s'estompe la plus rapidement possible, Mickaëla doit sûrement en faire de même.

-   J'ai vu des toilettes là-bas, j'aimerais y aller si ça ne te dérange pas.

Une réponse verbale est trop demandée apparemment. Elle ne me regarde même pas et se contente de me faire signe d'y aller.

Je surveille mes arrières et inspecte chaque toilette avant de poser mon arme. Un grand miroir me permet d'admirer mon visage. Je fais peur. Au cours des premiers mois qui ont suivi la première pluie, je me regardais régulièrement pour garder une allure potable mais depuis que Ben et moi restons en mouvement constant, j'ai compris qu'une apparence convenable dans ce monde est un luxe. Il ne me faut pas plus d'une minute pour remarquer cette mèche de cheveux. Elle n'a pas la même couleur que le reste de ma chevelure. Elle paraît mouillée mais ce n'est pas ça, je le saurais si j'avais été touché par la pluie. Je regrette immédiatement mon geste lorsqu'en passant ma main à travers la mèche celle-ci devient rouge. Ce n'est pas de l'eau mais du sang. Aiden m'a nettoyé mais il a visiblement oublié cette partie. Le rouge sur ma main m'obnubile au point que je reste figée jusquà ce que Mick frappe à la porte.

-   Ça va là-dedans ?

-   Oui.

Je réponds instinctivement sans bouger d'un millimètre. Bien sur que ça ne va pas, quelle question mais elle ne doit pas le savoir. Je l'imagine entrer et me voir paralysée sur place, ce qui me fait réagir et je trouve de quoi m'essuyer les mains. Je me regarde une dernière fois dans le miroir, respire un grand coup et quitte la pièce.

-   Je n'ai pas vu le temps passer.

-   Ok.

Une réponse claire qui ne laisse pas de doute sur son envie de me faire la conversation. On repart en marchant à côté l'une de l'autre pour retourner sur nos chaises. La pluie s'est calmée mais elle ne nous permet pas de retourner jusqu'à l'avion.

-   Je suis désolée pour Fred, vous étiez très proche ?

Je ne pouvais pas rester sans parler plus longtemps mais j'essaie de ne pas chercher à poser des questions trop personnelles, ce serait déplacé de ma part.

-   Oui. Il était celui à qui tout le monde se confiait. On était tous proche.

Et je leur ai enlevé ça. Chaque instant avec ce groupe me rappellera mon acte. Je les ai peut-être sauvés c'est vrai mais je leur ai enlevé un être qu'ils aimaient et c'est bien pire.

After The RainOù les histoires vivent. Découvrez maintenant