Nevitha

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XX

Je regarde le message qui s'affiche sur mon téléphone avec une grimace :

Le solde de votre compte mérite votre attention, veuillez-vous connecter à votre espace client pour y remédier au plus vite.

Je n'ai pas besoin de me connecter à mon espace client pour avoir une idée claire de ladite situation de mon compte. Mon solde est très certainement négatif et l'unique solution que je possède est la patience, en attendant que mon père m'envoi mon argent de poche du mois.

Une vague d'angoisse s'empare de moi, j'ai l'impression d'avoir un poids au cœur qui me compresse. En avançant au milieu de la rue je me mets à penser à toutes les dépenses inutiles que j'ai faites et à réfléchir aux côtés positifs, pas très évidents, de cette situation.

Tu auras toujours de quoi manger avec Imane.

Je ne sais vraiment pas ce que je ferais sans cette fille, je ne pense même pas qu'elle soit au courant de toutes les fois où elle me sauve la mise.

Tu as un toit sur la tête.

Après avoir épuré tous mes besoins du plus inutile au plus nécessaire, je ne m'en sors pas si mal ; je peux manger, m'habiller, dormir sous un toit, me déplacer, parler au téléphone et me connecter à internet.

Ce qui continu de me compresser le cœur c'est de ne pas réussir à atteindre mes objectifs par ce manque de moyens. J'ai de grands rêves, qui flottent sur pas grand-chose et savoir ça entraine une frustration impossible à ignorer, elle me prend à la gorge et remplit mon cerveau.

J'évite de justesse un aveugle, balançant doucement sa canne devant lui et continu d'avancer dans la rue. Je me protège tant bien que mal du crachat froid qui tombes du ciel, en ne trouvant rien d'autre pour supporter, que d'adopter une attitude agacée.

-        J'en ai marre, je souffle.

Je fronce les sourcils, comme si cela pouvait changer quelque chose au climat, ou à la présence dérangeante des gens autour de moi. Je continu d'avancer, sans faire l'effort d'éviter les flaques d'eau qui ont élu domicile au milieu du chemin. Je finis par arriver devant le portail d'un immeuble, je fais le code et j'entre.

J'appuies sur le seul bouton d'interphone sans nom et j'attends d'avoir une réponse.

-        Ouvre, dis-je une fois que j'en ai l'occasion.

Le petit déclic que fait la porte en fer, m'invite à entrer et à monter les étages jusqu'à une porte en bois, avec, au milieu, un énorme trou recouvert de plastique.

La tête rousse de Veronica apparait quelques secondes après.

-        Tu as toujours pas fais réparer cette porte ?

-        Bonjour madame.

Je soupire en pénétrant son appartement. J'enlève mes chaussures et les remplace par des chaussons munis de grosses têtes de lapins. J'enlève mon manteau humide et me dirige directement vers la chambre, où je m'affale sur le lit, au milieu d'une énorme pile de vêtements.

-        Ne te gêne pas surtout.

-        Pourquoi tu n'as toujours pas réparé cette porte ? fais-je en me redressant sur mes coudes.

Elle hausse les épaules paresseusement et s'approche de son lit pour y mettre un peu d'ordre.

-        Ça te plait d'avoir un trou dans ta porte ?

-        Ce qui me plait c'est de ne pas dépenser pour le réparer.

Je rigole en levant les yeux au ciel. N'ayant rien de mieux à faire, je me mets à prendre ses vêtements un par un et à les lui passer, afin qu'elle les range dans son armoire.

TempêteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant