Yerim

85 11 10
                                    

XY

Si je ne m'étais pas lancé ce défi, j'aurais certainement laissé tomber depuis longtemps. J'ai l'impression d'être un clown, à force de toujours envoyer le premier message et d'attendre sa réponse, réponse qui semble être envoyée par la poste. Ma fierté prend le dessus, je ne lâcherais pas l'affaire avant d'avoir eu ce que je veux, et ce, peu importe ce qu'elle me fait subir, ça n'en sera que plus douloureux pour elle. J'ai bien trop de dignité pour qu'une fille, aussi dure soit elle, puisse me dérouter du chemin que j'ai choisi d'emprunter. Je défile son fil Instagram et je scrute chacune de ses photos. Tout m'énerve chez elle, même ce qui me semblait attirant est dissimulé derrière son mauvais caractère. Je suis tellement irrité que je suis tenté de la signaler.

Emmanuella : salut

Je l'avais presqu'oublié celle-là.

J'ai fini par rompre, sans toutefois réussir à m'en débarrasser. Elle considère que l'on peut rester amis, même si au fond elle espère que son geste me fera changer d'avis, en me montrant à quel point elle est compréhensible et avenante. Elles sont nombreuses à faire ça, à cacher leur douleur derrière une gentillesse calculée, et qui arrivent à se convaincre qu'elles peuvent rester amies avec leurs ex, alors qu'en réalité, elles sont incapables de passer à autre chose.

Moi : salut, ça va ?

Qui suis-je pour lui expliquer tout ça ? Si je peux tirer avantage de son attitude je le ferais, c'est elle qui aura initié cette situation. Si je me risque à lui expliquer, que me parler n'est pas la solution, elle prendra cela pour de la méchanceté gratuite et ne comprendra pas. Je préfère l'observer et profiter encore de ce qu'elle va décider de m'apporter.

Si ça lui fait plaisir, pourquoi s'en priver ?

En attendant je dois refaire l'inventaire de mes conquêtes, il faut que je remplace toute celles qui sont là depuis un peu trop longtemps, celles qui m'énerve et celles à qui je ne parle que rarement. Il me faut de nouveaux challenges. J'ai besoin de sentir que je n'ai pas perdu la main, j'ai l'impression d'être installé dans une routine et ça ne me convient pas. Je me mets à chercher dans les amies de mes abonnés et je parcours les comptes qui m'intéressent ; lorsque la fille est jolie et ne semble pas trop idiote je lui envoie un message, en vérifiant tout de même qu'il s'agisse de majeures.

Les limites.

Les coups d'un soir ne sont pas une difficulté, mais ce n'est pas ce que je veux, j'ai besoin de séduire, d'entrer dans la phase de découverte et de m'immiscer dans le cœur d'une fille jusqu'à sentir que dans ses yeux elle ne jure que par moi. Cerner le plaisir d'un corps n'est pas égal à la satisfaction de tenir le cœur d'une femme dans ses mains et d'en faire exactement ce que l'on veut. J'ai besoin de cette passion des tous débuts de relation, du feu des cœurs et de l'ivresse qu'une femme peut ressentir en m'aimant. L'amour routinier est bien trop stable, trop bancal pour me satisfaire, je m'en lasse vite. Tout ce que je veux c'est parcourir le chemin qui mène au cœur d'une femme, je n'aime pas m'y attarder. Je vois la séduction comme l'escalade d'une montagne, le bonheur c'est l'effort qui est fait en grimpant, puis la magnifique vue que l'on nous offre, personne ne reste en haut de la montagne, on redescend et   .

Nevitha : je t'invite quelque part.

J'arrête toutes mes activités pour lire le message que je viens de recevoir.

Sérieusement ?

Elle est tellement imprévisible, que son message semble trop beau pour être vrai. Depuis quand a-t-elle envie de me voir ? De m'inviter qui plus est. Mon charme commence-t-il à faire effet ? Est-ce un pari ? Je n'arrive pas à comprendre ce qui pourrait la motiver à m'envoyer ce genre de messages, alors qu'elle ne me répond qu'un jour sur deux.

Moi : tout va bien ?

Peut-être qu'elle s'est simplement trompée de destinataire, ça serait plus logique.

Nevitha : ha ha très drôle, tu es libre cet après-midi ?

Moi : heu ouais

Je suis toujours sous le choc, mais si je peux avoir une autre occasion de me rapprocher d'elle je n'hésiterais pas, surtout si l'invitation ne vient pas de moi. Je ne sais pas où elle compte m'emmener, mais peu m'importe, je vais me faire violence pour pouvoir lui faire croire qu'on a les mêmes centres d'intérêts, ça ne devrait pas être si compliqué que ça.

Nevitha : ok, soit prêt a 16h je te donne l'adresse d'ici-là.

Moi : ok

Quelle est cette habitude de donner les indications à la dernière minute ? Être mal organisé c'est quelque chose qui peut me rendre malade et elle est l'exemple parfait du type de personne qui me donne envie de me taper la tête contre le mur. On dirait qu'elle-même ne sait pas ce qu'elle fait, elle semble perdue dans sa propre vie.

Je jure intérieurement et extérieurement, je la traite de tous les noms, mais je sais que je vais faire ce qu'elle dit, je serais prêt à 16h comme un bon soldat et j'attendrais son message, lorsqu'on se verra je serais calme et j'éviterais de lui lancer des insultes au visage. Je sais déjà que cette sortie sera épuisante psychologiquement, mais je décide de ne pas trop y penser et je recommence à parcourir les comptes Instagram de jolies filles pour éviter de penser à autre chose qu'à mon palmarès de conquêtes.

TempêteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant