Tempête

Nevitha

XX

Je regarde une énième fois mon téléphone dans l'espoir de recevoir un message de Yerim. Je ne sais pas ce qui se passe dans sa vie mais je suppose qu'il a besoin d'espace et je ne peux pas lui enlever ça. Je regarde autour de moi pour essayer de repérer Veronica, au milieu de toute cette foule de jeunes qui dansent. Lorsque j'entends de la dance hall à travers les baffles, je me mets à chercher mon amie de plus en plus vite, pour avoir l'occasion de danser avant que la musique ne se termine.

— Mais elle est où, je grogne.

Je vois des fesses se dandiner et des dos se tordre un peu partout autour de moi et mon cœur se serre à l'idée de ne pas pouvoir danser avec Vi ; je n'ai pas envie de me faire coller par un étranger et devoir me justifier sur le fait de ne pas en avoir envie. Je remarque des filles qui dansent les unes en face des autres en créant une file, je me mets à sourire en voyant leur visage exagérément concentré. Je me précipite sur la dernière afin de compléter la file et lui permettre elle aussi de danser sans avoir à se coltiner un homme collant. Elle m'adresse un sourire reconnaissant et se met à danser plus énergiquement. Tant pis pour Vi je la retrouverais plus tard, on a toute la soirée pour se chercher. Je cambre mon dos et roule mes hanches comme si j'allais me briser, consciente de l'attention que j'attire et des gouttes de sueur épaisses susceptibles de faire couler mon maquillage. Si je ne peux pas parler à Yerim, je ne vais certainement pas passer ma soirée à attendre ses messages, je vais m'amuser jusqu'à oublier lui avoir écrit. La musique prend fin et je recommence mon ascension dans la foule, après avoir adressé un salut aux filles avec qui j'ai dansé. Il faut vraiment que je retrouve mon amie maintenant, je ne suis pas venue ici pour me retrouver toute seule. Une autre musique entrainante retentit dans les baffles et je me force à continuer mon chemin, malgré la forte tentation de la mélodie. Si je m'arrête à chaque fois que j'entends une musique qui me plait je ne vais jamais y arriver. Je pourrais appeler Vi mais je doute que dans ce brouhaha elle n'entende sa sonnerie, ni même qu'on puisse réussir à communiquer. Je lui envoie un message au cas où, sans vraiment m'attendre à ce qu'elle réponde.

— Ce soir c'est soirée shattaaaaaaaa, annonce le dj dans le micro, entrainant une multitude de cris de joies.

Je m'avance dans la foule, en bousculant quelques personnes au passage. Je m'approche le plus du podium du dj où Vi m'a dit se trouver. Il y a tellement de monde que je compte sur la chance pour me permettre de la retrouver. Dans ce genre de situation mieux vaut ne pas hésiter, et continuer d'avancer tout droit. Par je-ne-sais quel miracle, j'arrive à voir une touffe de cheveux roux, plantée au milieu d'un groupe de garçon.
Pas de doute possible.
Je me précipite en les bousculant tous, pour me permettre d'arriver au niveau de mon amie, concentrée à danser avec un grand métis.

— Vitaaaa !! Hurle t'elle en me voyant.

Je m'approche pour qu'elle puisse me prendre dans ses bras sans se détacher de son partenaire, qui ne semble pas remarquer ma présence.

— C'est ta pote ? S'incruste un jeune homme avec un durag sur la tête.

— Ouais c'est Nevitha.

— Elle est aussi sucrée que toi hein, commente un autre avec un fort accent antillais.

— Ah par-contre vous allez vous calmer, je suis pas un bout de viande, je réplique.

— Ouais, elle mord, ricane Vi en changeant de partenaire.

— Je vois ça, mais je les aime avec du caractère, insiste le gars des iles en se léchant les lèvres.

— Tu vas moins aimer ça quand je vais t'en coller une.

— Houu, tigresse.

Je suis déjà fatiguée de parler avec eux, si Vi se décide à rester là, la soirée risque d'être longue. Je la regarde danser avec son partenaire, bien trop occupée pour remarquer que je me trouve au milieu d'une bande de mec lourds. Comment lui en vouloir ? Elle est en pleine chasse. Nos regards finissent par se croiser et j'en profite pour essayer de lui envoyer des signaux.

— Bon les gars, on va se chercher à boire, dit-elle finalement en me prenant la main.