XX
Yerim s'est endormit dans mes bras. Il m'a réclamé comme s'il avait besoin de moi et évidemment j'ai répondu à son appel sans poser de question. Au début ça m'a surpris, je m'attendais déjà à refuser ses avances, mais lorsque je me suis rendue compte qu'il voulait simplement que je le prenne dans mes bras, mon cœur s'est adoucit.
Ça reste étrange.
Je ne l'avais pourtant jamais imaginé avoir besoin de moi ou de mon réconfort, du moins je ne m'attendais pas à ce que ça arrive aussi rapidement. Je n'étais pas encore préparée, puisqu'il ne m'a jamais fait part de quoi que ce soit le concernant intimement.
Lorsque j'ai senti son désespoir mon cœur s'est brisé, j'aurais voulu faire plus pour l'aider, effacer sa peine d'un claquement de doigt ou l'apaiser pleinement. Tout mon corps c'est mis à chauffer lorsque je me suis rendue compte que je ne pouvais rien faire d'autre pour l'aider à part le tenir contre moi en silence, j'étais frustrée et énervée d'être aussi impuissante.
Comme avec Imane.
Ma réaction me fait penser à ma meilleure amie, et me fait me rendre compte de la place que Yerim a pris désormais. Mon cœur se met à battre plus fort, c'est effrayant de savoir à quel point il s'est glissé profondément dans mon espace. Je ressens un sentiment nouveau, perdu entre peur et excitation, un sentiment qui me donne envie de le fuir, mais sans le vouloir vraiment.
Tu tombes d'un toit et tu te réjouis de la chute.
Je le sens qui me serre un peu plus fort dans son sommeil, je me sens comme une bouée de sauvetage, du moins j'ai envie de le croire assez fort pour que cela devienne vrai. J'ai tellement envie de lui dire que je l'aime, j'ai un méli-mélo de lettres dans ma tête qui ne se forment que pour prononcer ces trois mots, c'est incontrôlable et même si cela vient de mon propre cerveau, c'est indépendant de ma volonté. J'ai envie de le lui chuchoter, de le répéter encore et encore pour le lui faire comprendre, j'ai envie de le dire jusqu'à trouver un mot avec un sens plus puissant. J'ai envie d'épuiser l'essence du « je t'aime » à le lui dire, jour et nuit en le regardant dans les yeux.
Mais non.
Mais je ne peux pas, pour l'instant le mot semble avoir un sens interdit, je ne peux pas assouvir mon désir car la peur de ne pas recevoir de retour sincère me ronge l'esprit. Je garde les lettres au bout des lèvres, comme un poison puissant que je ne peux ni avaler ni transmettre. Depuis ce baiser sous la pluie, c'est comme si les vannes de mon cœur s'étaient ouvertes en grand, une multitude de choses souhaite s'en échapper et voir le jour, toute en même temps.
Les hommes sont mauvais.
Mon cerveau m'envoie des bribes de mes anciennes pensées, dans l'espoir de canaliser les nouvelles, mais rien n'y fait, elles sont noyées dans le flot d'amour qui s'abat sur mon être, je les entends en échos lointain. Mais je les entends quand même et elles ne sont pas sans effets, je les sens maintenant l'une contre l'autre en train de se débattre sur laquelle des deux m'emportera ; Amour ou Haine ? Envie ou Peur ?
Toi ou lui ?
Yerim me sort de mes réflexions en s'éveillant. Je délie mes bras de son corps pour le laisser se redresser doucement. Il regarde autour de lui d'un air perdu, puis se passe une main sur le visage. A cet instant précis, je le trouve adorable, complètement vulnérable, comme s'il s'était défait de son armure quotidienne. Je ne dis rien pour ne pas trop le bousculer et attend patiemment qu'il s'adresse à moi— Je dois rentrer, dit-il simplement en se levant.
L'information est froide, ne laissant place à aucune forme de négociation.— Ok.
Il ne m'accorde pas un regard. J'aurais aimé recevoir un baiser pour me remémorer la tendresse à laquelle j'ai eu droit quelques minutes plus tôt, mais rien. Mon cœur se pince mais je ne dis rien, il n'est sans doute pas dans l'envie de penser à ces choses-là et je ne peux pas lui quémander de la tendresse, je me sentirais bien trop ridicule. Je me contente de l'accompagner jusqu'à la porte et de le regarder s'éloigner dans les escaliers de mon immeuble, sans me dire au revoir.
J'ai fait quelque chose de mal ? Je ne comprends pas son soudain changement de comportement, on s'est à peine adressé la parole, je n'ai rien pu dire de vexant. A moins qu'il ait espéré que je parle pour le réconforter, sauf que je ne pouvais pas savoir, je ne sais même pas ce qu'il a. Penser à la possibilité que ce soit sa situation qui le mette dans cet état, me fait autant de mal que de savoir que c'est ma faute, car cela voudrait dire qu'il me repousse, m'empêchant d'être là pour lui et de partager sa peine sur mon dos. Il est peut-être trop tôt pour qu'il se mette à me parler de ce qu'il renferme dans son cœur, mais j'ai envie d'accélérer le processus, je veux pouvoir être sa confidente, je n'ai pas envie d'attendre, je veux pouvoir claquer des doigts pour devenir son repère.
Il viendra vers toi quand il sera prêt.
J'essaie de ne plus trop penser à lui, à la place je préfère appeler ma mère pour prendre de ses nouvelles, entendre sa voix me fera certainement oublier celles de mon esprit.
Mamounette : allô ?
Moi : ça va ?
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Tempête
RomanceC'est l'histoire de deux âmes opposées qui vont se rencontrer, qui vont s'apprivoiser, s'aimer peut être, mais qui vont apprendre mutuellement l'une de l'autre.