Katerine a retrouvé le chemin de la jetée. Mais elle s'arrête là. Elle se pose sur le bord des rochers et observe la foule autour d'elle. Sa mère lui a demandé de réfléchir à un moyen de réparer son histoire avec Matthew. Elle ne voit pas comment elle pourrait faire. Connaissant Matthew, et aux vues de sa réaction face à elle dans la chambre, de simples excuses ne suffiront pas. Il faut qu'elle frappe fort. Qu'elle imagine quelque chose de grandiose à son image. Enfin, non. Pas à son image. Parce qu'elle ne pourra jamais changer sa silhouette androgyne et menue. Donc à l'image de ce qu'elle est à l'intérieur.
Elle cogite. Elle aurait bien besoin de Sylvia. Mais son amie est partie avec son amoureux quelque part au bord d'un lac. M. Benford, lui a donné le nom, mais elle n'a pas retenu. Elle ne va pas y aller de toute façon. Sylvia a gagné ce moment de bonheur avec Charles. Kat lui a juste envoyé un petit message pour se faire pardonner. Pour éviter que Sylvia ne se gâche son week-end en se demandant comment elle va. Elle la connaît. Même si son amie est partie en colère, elle ne pourra s'empêcher de s'inquiéter pour elle.
Matthew s'est tu. Jane lui a servi une salade avec un morceau de poisson vapeur. Elle garde toujours à l'esprit que son corps doit abriter la vie un jour. Elle le bichonne. Elle commence à manger sachant très bien que c'est à elle de parler. Que son frère attend qu'elle lui révèle ce qu'elle sait. Elle fait durer le plaisir. Maintenant, elle sait pourquoi Katerine a fui. Parce que son frère est un idiot.
— Jane...
— C'est bon ! Mais le poisson va être froid si on ne le mange pas tout de suite !
— Je crois que tu es tout à fait capable de manger ce fichu poisson et me parler...
— Ok. Je l'ai vue hier soir.
— Hier soir ? Où ?
Jane se met à raconter la soirée en notant tous les détails qui l'avaient amenée jusqu'à sa déduction finale.
— Qu'est-ce qu'elle foutait là ? murmure Matthew pour lui-même.
— Je crois qu'elle ne savait pas elle-même...
— C'est elle qui a rompu !
— Oui, et ça n'est pas complètement incroyable ! Parce que, permets-moi de te dire, tu as été un idiot !
— Pardon ?! Moi, j'ai été un idiot ? Mais je lui ai juste demandé de venir à un dîner avec toi et Harry. Pas avec toute la famille ! Juste toi et Harry ! Et après, elle s'est ... enfuie !
— Et pour en rajouter, tu lui as dit que me la présenter était important pour toi ! Rien d'exceptionnel en somme !
— Mais... C'est vrai !
— Matthew ! Autant lui dire que tu l'aimais !
— Mais je...
— Tu l'aimes ?
Matthew se lève et commence à faire les cent pas. Il n'a cessé de se poser la question toute cette fin de semaine. Le soir de la rupture, face à l'océan, il a cru pouvoir tirer un trait sur Katerine. Il était convaincu qu'il en était capable. Mais les trois jours suivants avaient été un calvaire. Il n'avait pas cessé de penser à elle, alors même qu'il ne l'avait pas vue ! Son cœur était ravagé. Alors oui, il l'aimait. Mais qu'est-ce que cela pouvait faire puisque ça n'était pas réciproque ! À quoi cela servait de l'admettre.
— Matthew ?
— Oui ! Oui ! Je l'aime ! Mais à quoi bon remuer le couteau dans la plaie ? Oui, je voulais lui dire ! Lui faire comprendre ce soir-là ! Mais tu n'as pas vu ses yeux ! Son regard...
— Vous les mecs ! Vous n'êtes vraiment pas croyables ! Vous vous imaginez toujours que nous n'attendons que ça ! Qu'on nous dise « je t'aime » ! Et ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfant. Clape ! Fondu au noir... Ça ne te serait pas venu à l'esprit qu'elle pouvait paniquer ! Que ça allait trop vite pour elle ! Ça fait quoi ? Un mois que vous vous envoyez en l'air sans vous prendre la tête ? Et là, bam ! Repas de famille ! Présentation à la jumelle diabolique ! Et sentiments exposés de manière brutale en prime !!! Tu es vraiment incroyable, Matthew !!!
Matthew n'en croit pas ses oreilles !
— Ça va être de ma faute, en plus ! Bordel ! Elle m'a piétiné le cœur ! Elle m'a jeté avec un putain de message, Jane ! Un putain de message ! Et ensuite, elle a été incapable d'émettre le moindre son... Elle pouvait s'expliquer ! Dire les choses.
— Tu lui en as laissé le temps ? La possibilité ? Tu lui as dit calmement les choses ? Tu l'as apaisée ?
Matthew revoit la scène dans la chambre. Sa colère, froide implacable. La distance qu'il a mise entre eux d'entrée de jeu en la vouvoyant de nouveau. En l'appelant pas son nom de famille. Le visage de Katerine. Elle était en panique totale. En panique ! Même s'il ne comprenait pas totalement, Jane avait raison. Il lui avait fait peur. Bordel ! Il s'assoit brutalement sur sa chaise.
— C'est bon ? Tu imprimes maintenant ? demande sa sœur en mangeant tranquillement son poisson.
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Faire le grand saut
ChickLitQuand le père de Sylvia la contraint, elle et sa meilleure amie, à accepter un job d'été dans un hôtel, il n'imaginait pas qu'il allait non seulement changer l'existence de sa fille qu'il adore, mais aussi, et d'une manière bien plus radicale, celle...