46/ Mensonge par omission et petite trahison

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L'appartement se situe au dernier étage d'un immeuble sobre aux allures dix-neuvième siècle. La vue est superbe. Pourtant, bien que Katerine se soit assise dans un fauteuil confortable face aux larges baies vitrées donnant sur l'Hudson et le parc de Riverside, elle ne regarde que l'album qu'elle a sur ses genoux.

La lettre est posée sur l'accoudoir droit. Elle ne l'a pas encore ouverte. En parallèle, son téléphone est posé sur l'accoudoir gauche. Elle n'a pas encore appelé sa mère. Elle lui a juste envoyé un message clinique pour lui dire qu'elle était bien arrivée et que ça c'était bien passé. Elle se doute que Lydia est morte d'inquiétude. Mais Kate n'est pas encore prête. Elle regrette que Sylvia ne soit pas là. Son téléphone vibre.

« Je serai là demain matin. Ne visite rien de la liste sans moi ! »

Katerine est si stupéfaite du message de Sylvia qu'elle vérifie deux fois qu'il est bien d'elle.

« Tu as pris un train ? »

« Nop ! Avion ! »

« Quoi ? »

« Je t'expliquerai demain... »

Katerine repose son téléphone l'air rêveuse. Son amie sera là demain. Elle prend conscience du besoin qu'elle a d'elle. De sa présence. De sa gentillesse et se son soutien. Elle est heureuse et en même temps un peu inquiète. Elle se demande comment va faire Sylvia en réalité. Elle se pose un milliards de questions.


— Vous lui avez dit ?

Sylvia fixe le flacon de somnifères qu'elle a posé sur ses genoux. Elle sait très bien de quoi veut parler Matthew Campbell. Elle garde le silence un bref instant. Puis elle soupire avant de répondre.

— Non. Je n'ai rien dit. C'est la première fois que je lui cache quelque chose. J'espère que vous ferez en sorte que je ne le regrette pas.

— J'espère ne pas le regretter non plus.

— Vous l'aimez toujours ?

Il ne répond pas. Il semble réfléchir. Avouer ses sentiments à sa jumelle n'a rien à voir avec l'affirmer à une tierce personne. Il n'est pas prêt à avoir cette conversation avec Sylvia Benford.

— J'imagine que oui. Sinon vous ne seriez pas dans cette voiture avec moi, dit finalement Sylvia.

Elle le voit sourire.

— J'imagine que oui, répond-il sur un ton rêveur.


Katerine a finalement ouvert la lettre. La lire a été aussi difficile qu'elle l'avait imaginé. Les larmes ont coulé abondamment. Elle a dû aller chercher le rouleau de papier toilette. Pas de mouchoir sous la main. Enfin, pas suffisamment.

Elle engloutit aussi le cheesecake en la lisant une seconde fois. M. Philips avait raison. C'était le meilleur qu'elle ait jamais mangé. Il la réconforte.

À la troisième lecture, elle décide d'appeler sa mère. Il est temps. Elle entend la tonalité pendant qu'elle fixe son regard sur l'incroyable spectacle du soir qui tombe sur la ville. Elle n'a pas vu le temps passer. L'appel vidéo se met en route.

— Maman ?

— Ma puce ! Ma puce ! Je me suis fait un sang d'encre ! Ça va ?

— Ça va, maman. Ça va. C'est juste que j'avais des choses à faire avant de pouvoir t'appeler. Je suis désolée...

— Mais ne t'excuse pas, ma puce... Ça n'a pas dû être facile. Je connais bien ce genre de famille...

— Ça n'a rien à voir avec la famille, maman. Il n'en avait pas beaucoup. En fait, il était assez seul...

Sa mère ne répond d'abord rien. Elle hésite. Elle voit le visage fatigué et défait de sa fille qui lui offre un petit sourire.

— Mais tu es où, là ?

— Ah ! Ça c'est la bonne nouvelle... regarde...

— La bonne nouvelle ?

— Je suis devenue une héritière ! Une vraie ! Avec un avocat pour gérer ma fortune et mes biens.

Le ton de Katerine n'est absolument pas réjoui comme le laisseraient entendre ses paroles. Elle fait faire le tour de l'appartement à sa mère grâce à son téléphone. Lydia n'a pas de mot pour exprimer sa surprise. Elle ne s'attendait pas à ça. Elle pensait à un petit pécule. Une somme pour aider sa fille à finir ses études sans s'endetter sur des années.

— C'est ... Mais, et sa veuve ? Sa famille...

— Il était suffisamment riche pour que tout le monde s'y retrouve... et il n'a pas eu d'autres enfants. Que moi. Tu aurais vu le regard de sa veuve ! Je crois que si elle avait pu me tuer sur place, elle l'aurait fait. Heureusement que tu n'étais pas là. Je crois que c'est toi qu'elle voulait atteindre à travers moi. Elle savait...

— Qu'est-ce qu'elle savait ?

— Il m'a laissé une lettre, maman

Faire le grand sautOù les histoires vivent. Découvrez maintenant