43/ Voir le monde différemment

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— Ça vous a plu, Mlle Bridgewater ?

— Beaucoup. Je ne connais personne qui ne serait pas content d'hériter d'une telle fortune !

— Parfois, l'argent est un cadeau empoisonné.

— Peut-être. J'imagine que vous serez à même de m'aider à le gérer ?

— J'en serais très honoré. Mais peut-être préférerez-vous quelqu'un de plus proche de vous ? Je crois que vous êtes amis avec M. Arthur Benford. Il voudra peut-être vous conseiller ?

— Sans doute. Mais vous connaissez mieux le dossier, non ?

— En effet. En effet. Et je vous connais vous, puisque j'étais chargé de prendre soin de vous.

— La pension.

— La pension, et aussi ça, dit-il en lui tendant une boite en bois. Vous pouvez rester ici pour l'ouvrir. Je vous fais porter un rafraîchissement.

Katerine s'assoit et ouvre le couvercle de la boite avec précaution. À l'intérieur, elle découvre un album photo. Un album remplit de photos d'elle à tous les âges. Bébé. Enfant. Adolescente. Élève ingénieur. Soubrette. La dernière photo a été prise à l'hôtel de M. Greengard. Elle est assise sur un muret près du local à poubelle et elle regarde son téléphone en souriant. C'était avant la rupture avec Matthew Campbell.

Katerine ne s'est pas rendue compte qu'elle pleurait. C'est quand la secrétaire apporte un petit plateau avec un tasse de thé et quelques biscuits qu'elle en prend conscience. Elle ne s'excuse pas. Elle est bien trop bouleversée. Son père ! Son père qu'elle ne connaît pas ! Dont elle n'a même pas une seule photo ! Son père, lui, la connaissait un peu. Il l'a fait suivre pour avoir des souvenirs d'elle. Une multitude.

Elle pensait ne pas regretter sa mort. Comme elle se trompait ! Elle prend l'album en photo et l'envoie à sa mère. Puis, elle voit un bout d'enveloppe. Une lettre accrochée à la page de garde de l'album. Elle l'ouvre, mais ne la lit pas. Elle est de lui. Ça n'est pas encore le moment. Pas ici. Il faut qu'elle aille à l'hôtel. Maintenant !

Maître Lombardo patiente devant la porte. Il lit un dossier assis dans un confortable fauteuil. Il lève les yeux quand elle sort brusquement.

— Mlle Bridgewater ?

— Quand disposerais-je de l'argent de mon père ?

— Très bientôt. Mais si vous avez besoin, je peux vous faire une avance.

— Ce serait bien. Oui. Parce que je voudrais visiter un peu New York et ...

— Mais il n'y a pas de soucis, Mlle Bridgewater. Voulez-vous que je vous réserve une chambre... Mais non ! Suis-je bête ! Dans la liste des biens qui vous reviennent, il y a l'appartement à New-york.

— Pardon ? Un appartement !!

— Attention. C'est un petit appartement ! Il l'utilisait quand il avait à faire ici.

— Ce pourrait aussi bien être un cagibi ! Je prends !

— Très bien ! Très bien ! Laissez-moi appeler la société qui s'occupe de l'entretien et je vous donne l'adresse, ils vous attendront là-bas.

— Merci Maître Lombardo.

L'avocat lui pose la main sur l'épaule et sourit. Il voit comme elle serre la boite en bois contre elle.

— Il était très attaché à vous, Mlle Bridgewater. Même s'il n'interférait pas. Vous étiez son unique enfant. Il tenait à vous. Et à votre mère aussi, même s'il ne l'aurait jamais reconnu.

— Merci Maître, souffle Katerine en retenant de nouveau ses larmes.

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