21/ Encaisser et rester debout

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Katerine soupire. Elle avait toujours craint être l'enfant d'un viol. La propension de sa mère a toujours craindre le pire, sa spécialisation dans cette unité de secours aux victimes de violences...

— Nous savions que notre relation ne serait pas éternelle. Il était fiancé. Comme Arthur et Eleanor, sa famille lui avait trouvé une future épouse ravissante et issue du même genre de famille que lui.

— Arthur et Eleanor ont fait un mariage arrangé ?

— Oui et non. Ils se sont rencontrés et sont tombés amoureux. Ce qui arrangeait leurs deux familles. Je continue ?

— Oui. Pardon... Il était fiancé ? Et il disait qu'il t'aimait.

— Il appréciait sa fiancée. Moi, il m'aimait. Notre relation était pourtant vouée à ne pas durer parce que sa fiancée primait sur le reste. Les conventions. La famille... tout était plus important, même s'il m'aimait. Je le savais. Quand je suis tombée enceinte, il m'a assuré qu'il prendrait ses responsabilités. Il était prêt à m'installer comme une cocotte de l'ancien temps ! J'ai beaucoup ri et pleuré ce jour-là. Je ne voulais pas de ça, ni pour moi, ni pour toi. Je l'ai donc libéré. Il s'est alors montré très froid. Il m'a envoyé son homme de loi pour convenir d'un contrat qui me contraignait au silence sur notre relation et sur le fruit qui allait en naître contre une somme raisonnable pour assurer ton éducation. Il ne voulait rien savoir de toi. Je n'ai plus jamais été en relation avec lui. C'est son avocat qui gère tout. Je ne l'ai jamais revu. Voilà. Pas un aventurier, donc.

— Un salopard.

— Non plus, Kat. Je t'interdis de penser ça. Il n'a jamais voulu d'enfant avec moi. C'est moi qui en voulais un. Et je lui ai imposé ma grossesse. Je crois que je voulais rompre et je savais que ce serait un moyen radical pour le faire.

— Tu ne l'aimais pas ?

— Si. J'ai eu le cœur brisé pendant de longues semaines. Eleanor m'a soutenu sans jamais rien demander. Arthur aussi. Ils ont été avec moi. Puis Eleanor est aussi tombée enceinte. Ça a illuminé nos vies. Nous espérions avoir des filles pour vous voir lier autant que nous. C'est ce qui s'est passé...

— C'est vrai, dit Kat en enlaçant sa mère.

Katerine digère ce que vient de lui dire Lydia sur son père. Ce James Athelwood qui ne veut rien savoir d'elle. Ce James Athelwood que sa mère a chassé de sa vie pour ne pas devenir une simple maîtresse. Pour ne pas faire d'elle une « bâtarde »... Elle aimerait le détester mais n'y parvient pas. Elle aimerait en vouloir à sa mère mais n'y parvient pas plus. En fait, elle est comme anesthésiée. Est-ce la rupture avec Campbell qui l'empêche de ressentir avec la vivacité dont elle fait preuve d'habitude ? Elle l'ignore. D'un revers de main, elle chasse Campbell de ses pensées, se concentre sur ce James Athelwood qu'elle souhaiterait avoir la possibilité de connaître et qui se refuse à elle.

— Il était comment ? Je lui ressemble ?

— Pas du tout. Tu ressembles à ma mère, ma chérie. Une puce. Une brindille. Blonde et vive ! Enfin moins vive que toi quand même ! L'époque ne s'y prêtait guère ! Mais tu as ses yeux à lui. Et son intelligence... je n'aurais jamais pu concevoir seule une future ingénieur telle que toi ! C'est sûr !

— Maman ! Tu as fait des études ! Tu as un métier valorisant et indispensable ! Tous ne peuvent pas en dire autant !

— Merci, ma chérie... mais tout de même. Il est tellement brillant ! J'aime à croire que ton intelligence vient de lui !

— Finalement, tu n'as pas mal choisi mon géniteur.

— En termes de sélection naturelle, je crois que j'ai fait le bon choix, ma puce, dit-elle en riant. Ça va ?

— Ça va, dit-elle en posant son menton sur son épaule.

Elle fixe le rideau de la fenêtre.

— Ce qu'il est moche ce rideau, dit-elle.

— Je suis d'accord. Ne change pas de sujet, jeune fille. J'ai rempli ma part du contrat. À toi.

Faire le grand sautOù les histoires vivent. Découvrez maintenant