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Madinah.

Chez Madinah / 2 juin 1998 / 19h32.

- Je sais plus si je t'ai déjà raconté pourquoi je veux tant devenir psychologue... Ou du moins, travailler dans ce secteur. C'est cliché mais... Je veux comprendre, je veux juste côtoyer ce qui m'a toujours tourmentée. Mon ultime rêve serait d'être addictologue, tu sais, le genre de psychologue qui côtoie et travaille avec des patients accros à certaines choses. Et si j'avais l'occasion de réaliser ce rêve, alors je serais la plus heureuse, j'aurais peut-être l'impression d'être plus proche de ma mère à cet instant. Peut-être que je la comprendrais mieux, parce qu'après tout ce que j'ai entendu à son sujet, je suis juste plus perturbée qu'autre chose. Tu réalises, apparemment, elle aurait commencé à se droguer pour « faire plaisir » à une femme qui était censée être son amie ? C'est ridicule. Je sais qu'ils me mentent, ils pensent sans cesse à me « protéger » mais depuis toujours ils me cachent des choses et me mentent sans se soucier de ce que je peux ressentir, c'est ça la vérité. Et le pire c'est qu'ils font tous ça, je ne parle même pas que de ma famille, Kawtar...

J'ai senti mon cœur se briser à cet instant et ma voix s'est mise à trembler, malgré mes tentatives pour le camoufler.

- Elle m'a caché sa maladie, pendant des mois, comme si je ne méritais pas de savoir. Elle a agi de manière purement égoïste mais tu sais, le pire c'est que je la comprends... J'en ai juste marre d'avoir été prise pour une idiote pendant toute ma vie. J'me dis qu'il était peut-être temps que ma vie prenne un nouveau tournant, que je me détache de mon passé pour avancer... Ça a commencé avec le départ d'Ibtissem, puis celui de Kawtar... J'me dis que la prochaine personne, la seule personne qu'il reste de mon passé c'est...

J'ai souri nerveusement, et une larme s'est échappée de mon œil. Personne, il ne me reste plus personne de mon passé.

- En réalité, il n'y a déjà plus personne.

J'ai commencé à sangloter, sans avoir la force de faire semblant, cette fois. Sam a tenté de me consoler, en me prenant dans ses bras et, en me rassurant du mieux qu'il pouvait. J'avais beau essayer de me concentrer sur ses paroles, je n'y arrivais pas, et sa voix a fini par disparaître, couverte par mes sanglots. C'était une discussion banale, pourtant, alors comment est-ce qu'on en est arrivés là... ? Au fond, je suis triste, et encore plus lorsque mes pensées se tournent vers Kawtar. Elle n'est plus là... Je l'ai aimé, de tout mon être. Elle me manque tellement, c'est incroyable, même si on ne se parlait pas tous les jours, qu'on ne se voyait plus autant qu'avant... Pour moi, elle était toujours ma meilleure amie. Elle était la seule personne qui avait une aussi grande place dans mon cœur. Je m'en voudrais toute ma vie de ne pas avoir été là au cours de ses derniers instants, d'avoir pensé qu'il s'agissait d'une plaisanterie.

Je serais rongée par la culpabilité jusqu'à la mort, même si je ne dirai rien à personne... Ça fait si mal. Je mérite cette souffrance, tout ce que j'ai vécu, tout ce qui m'a blessée et rendue folle, oui c'est probablement mérité. Je ne suis qu'une égoïste au fond, je ne regarde jamais plus loin que le bout de mon nez. Alors c'est réel, nos actes se reflètent sur notre vie, alors ma vie n'est que le reflet de ma personne. Toutes ces fois où je me suis dit que j'allais me ressaisir, depuis sa mort, tout cela n'est qu'une façade. J'aurais aimé que cela soit si facile, mais ma détermination dure aussi longtemps qu'une publicité et je sombre de nouveau... Je me mens juste à moi-même pour m'empêcher de souffrir sauf que c'est sans effet.

Sam - Je sais que tu gardes tout pour toi, mais ça te fait du mal. Madinah, tu ne peux plus continuer... Parle-moi, ou alors confie toi à quelqu'un d'autre mais arrête de te la jouer « soldat ». T'es pas un robot, comprends-le, tu peux pas vivre tout ça et n'en parler à personne.

Madinah ~ Le reflet de soi-même. [EN CORRECTION]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant